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Honoré de Balzac (1799 - 1850)

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Compte-rendu synthétique par Marc HoussayeCafé Citoyen de Caen (25/09/1999)

Animateur du débat : Marc Houssaye

Y a-t-il contradiction entre le chômage et le bénévolat ?

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Des inquiétudes soulevées par ce grave problème de société qu'est le chômage, nous remettons souvent en cause l'organisation de la société. On en cherche toujours l'origine pour tenter de trouver des remèdes. Des citoyens se sont ainsi interrogés sur l'apparent décalage, l'apparent paradoxe, de la coexistence, au sein d'une société, du chômage et du bénévolat. "Le bénévole ne prendrait-il pas la place d'une personne ayant besoin d'un travail rémunéré ?" se demande le premier intervenant. Pour répondre à cette question, il nous a fallu tout d'abord distinguer ces deux types d'implications dans la société que sont le travail rémunéré et le bénévolat. Après avoir établi des frontières pour les définir et les caractériser, nous nous sommes intéressés à ce qu'ils signifient chez un individu. Enfin, les natures de ces deux implications sociales, que nous supposions se contredire, étant différentes, il nous est apparu qu'une redéfinition des valeurs marchandes était nécessaire.

Alors que certains individus de la société n'exerçant pas de travail, sont exclus des activités économiques et retirés du tissu social, d'autres travaillent sans rémunération. Il serait restrictif de considérer la question simplement sous l'angle financier, bien que celui-ci soit d'une grande importance. Il apparaît en effet essentiel d'étudier ici l'investissement respectif sous-entendu par chacune des deux activités.

Le bénévolat possède en effet un but différent de celui du travail salarié. Le bénévole veut avant tout, par définition, faire le bien et c'est dans une perspective d'aide, de soutien, en tout cas non personnelle, qu'il s'implique. Juridiquement, le bénévolat ne doit aucunement rapporter à quelqu'un. Il doit être non concurrentiel et ne doit s'appliquer qu'à des fins publiques. Aussi, les actions bénévoles se situent le plus souvent dans le domaine caritatif ou humanitaire. Les O.N.G. en sont l'illustration la plus connue. D'autres associations plus modestes, dans le domaine sportif par exemple, possèdent aussi ce caractère de don de soi ou d'éducation. Et les personnes qui s'y intéressent le plus, les retraités, les étudiants, possèdent d'ailleurs ce temps libre à consacrer aux autres. Ainsi, il faut différencier les deux activités sociales qui nous paraissaient antagonistes. Le bénévolat possède une générosité que le travail rémunéré ne contient pas, ses buts étant plus personnels.

Travailler bénévolement a donc une autre utilité que celle de travailler pour ses besoins personnels. Du point de vue des besoins d'un individu, ces deux types d'engagement paraissent non se contredire mais se compléter. Il est même possible de les distinguer selon une échelle de valeurs.
Aussi, pouvons nous faire référence à une pyramide des besoins commune à tous les individus. Les besoins primaires en sont la base, ensuite viennent les besoins de sécurité, les besoins affectifs, puis la reconnaissance sociale, et enfin le besoin de se finaliser. Il est évident que chacun des degrés inférieurs doit être assouvi pour que le degré supérieur prenne de l'intérêt. Les deux types d'implication sociale que nous venons de différencier correspondent donc chez un individu à deux niveaux de satisfactions. Le bénévolat se situe plus haut dans l'échelle que le besoin de se nourrir ou tout autre forme de contentement des nécessités de base. Aussi pourrait-on considérer le bénévolat comme une rétroaction au sein de cette hiérarchie des besoins.

Il arrive pourtant que le bénévolat subisse certaines dérives. C'est le cas du stagiaire qui, en dépit du fait de son travail utile fourni au sein d'une entreprise, n'est pas rémunéré à cause de son statut de novice. L'utilisation profiteuse de ce statisme flou de l'emploi est alors flagrant. Mais il est aussi possible de voir une dérive dans le sens contraire, le bénévolat qui ne respecte pas ses règles. On se remémore alors le scandale relatif aux détournements de fonds de l'association "ARC".
La frontière est mince entre l'engagement personnel à des fins salariales et l'implication bénévole ; et il n'est pas rare de voir se transformer une association en entreprise. Nous sommes donc amenés à nous demander ce que signifie ce bouleversement de l'ordre social ; le bénévolat et les activités d'intérêts publics prenant de l'importance par rapport au travail classique qui, lui, manque. Ne sommes nous pas en train d'assister à une métamorphose de la notion de travail, autrement dit à une transformation des liens unificateurs de la société ?

Le statisme général ne remet donc pas en cause l'implication sociale de chaque individu. L'envie de travailler et d'être utile est toujours présente mais la contexture sociale ne semble pas correspondre aux exigences des citoyens. Les valeurs marchandes qui définissent le commerce sont donc à remettre en question. En effet, beaucoup d'activités ne sont pas reconnues comme précieuses alors que leurs nécessités sont incontestables. C'est notamment le cas dans les domaines culturel, pédagogique, et relationnel. Les personnes aidant les détenus à se réinsérer, les bénévoles s'occupant des activités sportives des enfants, les cinémas de campagnes qui apportent une forme de culture, la femme au foyer qui possède la charge de l'éducation primaire de ses enfants, sont autant d'exemples illustrant l'alliance de l'utilité et du facteur humain dans le contexte économique.

On remarque alors que la notion actuelle du travail ne tient pas compte de la dimension humaine de certaines activités ; seuls les produits issus de l'appareil productif, facilement quantifiables, sont valorisés. L'insertion de ces activités bienfaisantes, hautement humaines, dans le secteur économique est souhaitable, non seulement pour revaloriser les relations entre les hommes mais aussi pour soulager le manque flagrant de synergie sociale et de cohésion.

En Bref, la réflexion citoyenne s'exprime :

Si le chômage prend autant d'ampleur et que, parallèlement, de multiples associations arrivent pourtant à s'édifier et à trouver des formes de travail utile et nécessaire, c'est que la définition même des valeurs marchandes est à restructurer. En effet, certains aspects du commerce entre les hommes sont ignorés et le travail rémunéré s'appuie seulement sur les bases restrictives de la production quantifiable. Mais il existe d'autres dimensions, notamment relationnelle et humaine, dans cette notion du travail en société! Les domaines culturel, éducatif et pédagogique illustrent bien les types d'activités sociales nécessaires, même difficilement quantifiables. Les citoyens suggèrent donc, pour résoudre ce manque de cohésion sociale lié au manque d'emploi, la valorisation et l'insertion dans le contexte économique de ces activités dont l'utilité n'est visible que du point de vue relationnel et humain.

Thèmes proposés pour le Café Citoyen du samedi 9 octobre 1999 :
- Le trou de la Sécurité Sociale.
- Les licenciements.
- Une société sans voiture individuelle ?
- L'interdiction et la responsabilité.
- Y-a-t'il une alternative à l'éducation permanente ?
- Comment éduquer les masses ? => thème retenu

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