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Honoré de Balzac (1799 - 1850)

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Compte-rendu synthétique par Élisabeth RodotCafé Citoyen de Argentan (09/01/2003)

Animateur du débat : Élisabeth Rodot

» Politique et Société

Faut-il sauver les gens malgré eux ?

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Le débat est parti de la revendication d’un citoyen du droit de mettre sa propre vie en danger sans que la loi intervienne pour l’en empêcher : « au nom de quoi la loi m’impose-t-elle de porter le casque en moto ou de mettre ma ceinture de sécurité, si moi je préfère rouler cheveux au vent ?… ». A partir de cette question nous avons réfléchi à la prise de risque au niveau de l’individu, au discernement qu’elle implique chez celui-ci, au rôle de la loi dans la protection des personnes, et enfin au rapport entre norme sociale et marginalité.

La liberté de prendre des risques mettant ses propres jours en danger est inhérente à chaque individu : chacun devrait être responsable de la sauvegarde ou non de son existence physique. Mais jusqu’où un individu vivant en société peut-il exercer cette liberté ? Bien souvent c’est la société qui prend en charge les conséquences financières et médicales (assurance, sécurité sociale, hôpital) des accidents de la route ou des imprudences de certains. La prise de risque d’un individu entraîne aussi souvent, malheureusement, la mise en danger d’autrui (cf sauvetages périlleux en montagne ou en mer). Enfin cette prise de risque est souvent une démarche très égoïste de la part d’un individu qui oublie de prendre en compte tous ceux qui dépendent de lui de près ou de loin : enfants éventuels, ses proches, la personne qu’il aurait impliquée dans l’accident et pourrait se sentir coupable etc… Donc un individu vivant en société n’est pas vraiment libre de faire n’importe quoi : nous sommes tous dépendants les uns des autres et ceci limite notre liberté individuelle.

D’autre part cette démarche pose le problème du discernement nécessaire à la mesure du risque encouru, du libre-arbitre plus ou moins réel qui est le nôtre lorsque l’on fait de tels choix. Dans quelle mesure un SDF qui refuse d’être secouru exerce-t-il pleinement sa liberté de choix ? N’est-il pas influencé par des conditions de vie aliénantes qui faussent son jugement ? De même quelqu’un qui se suicide n’est-il pas acculé à un tel acte par un état psychologique dépressif ou une pression morale trop forte ? Ne faudrait-il pas l’aider à trouver des solutions plutôt que le laisser mourir ? De même l’adepte d’une secte ne prend-il pas des risques sous l’influence d’un conditionnement psychique aliénant sa liberté (ex : témoins de Jehovah et transfusion sanguine). En extrapolant, on peut de demander si TOUTE décision que nous prenons n’est pas déterminée par de multiples conditions extérieures qui rendent notre libre-arbitre bien mince et bien illusoire.

Reste le problème de la loi : dans quelle mesure doit-elle protéger les citoyens d’eux-mêmes, malgré eux ? Devant la recrudescence du nombre de tués sur la route en France, les lois concernant la sécurité routière se sont en effet durcies ces dernières années : on risque une contravention si on ne met pas sa ceinture ou son casque. Certains pensent que tous ces garde-fous enlèvent tout piment à la vie, que le risque est inhérent à celle-ci et qu’un encadrement excessif peut, a contrario, entraîner des comportements irréfléchis de ceux qui veulent se sentir libres malgré tout. D’autre part, en France (contrairement à la Grande-Bretagne), la « non-assistance à personne en danger » est punie par la loi : faut-il vraiment que celle-ci réglemente le secours que nous portons à autrui, ou doit-on laisser chacun réagir selon son propre code de valeurs ? L’existence de cette loi empêche-t-elle vraiment les lâches de fermer les yeux lors d’une agression dans le métro ? Est-ce les valeurs véhiculées par la société qui génèrent ce type de lois, ou celles-ci influencent-elles au contraire notre façon de penser ?

Enfin, nous avons abordé la difficulté d’aider certains marginaux à se réinsérer dans la société : comment apporter de l’aide ? Celle-ci est-elle vraiment désirée ? De quel droit imposer tel mode de vie comme « normal » au détriment d’un autre, plus marginal ? Ce que nous prenons pour des difficultés est peut-être l’expression d’un choix de vie qu’il nous faut apprendre à respecter. Comment savoir ce qui est bien pour autrui ?

Derrière toutes ces interrogations se profile une question de fond : faut-il privilégier la vie, ou la liberté ? Chacun ne peut tenter d’y répondre qu’en fonction de son système de valeurs, en son âme et conscience.

Thèmes proposés pour le Café Citoyen du jeudi 23/01/2003 :

- Qui doit décider de la guerre en Irak ?
- Démocratie participative ou représentative.
- Fantasmes et réalités de l’Islam.
- La manipulation par la publicité.
- Sondages : manipulation et/ou réalités ? Thème retenu

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