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Compte-rendu synthétique par Marc HoussayeCafé Citoyen de Caen (12/03/2003)

Animateur du débat : Marc Houssaye

» Démocratie et Citoyenneté

La famille : noyau d'apprentissage de la démocratie ?

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De plus en plus conscients que notre société ronge notre démocratie, les Français dénoncent ses dérives et ses dysfonctionnements, sans d’ailleurs trop s’attarder sur leur propre responsabilité. La démocratie est perçue de nos jours uniquement comme un concept, un concept par ailleurs flou, pour ne pas dire vide, auquel on peut finalement faire dire n’importe quoi. Ce qu’il faudrait sûrement, c’est redonner vie à ce concept par la pratique.

D’où ces questions : comment se forme le citoyen en chacun de nous ? Dans quels cadres apprend-t-on l’exercice démocratique ? Est-ce dans le cercle familial, comme il l’est suggéré ici ?

La famille est évidemment la première structure de vie en communauté. Mais on ne peut pas dire pour autant que la structure familiale est une structure démocratique. Même si dans les familles les plus ouvertes débats et discussions animent la vie familiale, il n’y existe pas d’élection ni de pouvoir délégué. La hiérarchie est autocratique. Le ou les parents assurent l’autorité. Les enfants, parce que non responsables, sont soumis à cette autorité légale. Il n’y a donc pas égalité entre tous les membres d’une même famille.

Certes, des progrès sociaux corrigent les dérives d’une autorité parentale sur un enfant (les droits de l’enfant, 1959) ou sur un autre parent (répression de la violence conjugale). Mais ces lois émanent de l'État qui en quelques sortes s’ingèrent dans les affaires de la famille pour faire respecter la dignité et la valeur de la personne humaine.

La famille, que l’on accepte ou que l’on rejette, constitue néanmoins le premier cadre d’appréhension de la vie en société. Mais quoi qu’on en dise, le schéma familial détermine l’éducation de l’enfant. Son fonctionnement plus ou moins clanique peut s’opposer à l’expérience de l’altérité. En revanche, l’école républicaine est plus enclin à favoriser l’expérience de l’altérité, à placer l’enfant dans un cadre d’égalité où il apprend à accepter les différences de l’autre, bref à développer chez l’enfant la tolérance. D’une façon générale, les structures qui entourent et relaient le cercle familial tempèrent son protectionnisme naturel. D’où cette question : La réussite de l’assimilation des valeurs démocratiques au sein d’une famille ne se révèlerait-elle pas au sortir de l’adolescence ? C’est-à-dire lorsque l’enfant se confronte avec plus ou moins de difficulté à la diversité du monde extra-familial ?

Qui plus est, la famille est une structure naturelle. On ne la choisit pas. La démocratie par contre est fondée sur l’acte de volonté générale. L’individu, par un contrat social, intègre la société à laquelle il participe. Et ce contrat social lie chacun des individus à l’intérêt général, par ailleurs inexistant dans la famille.

Si les valeurs véhiculées par la famille ne sont pas les moteurs de l’apprentissage de la démocratie, gardons-nous de les dénigrer. Notons que les régimes communautaristes en niant ce socle social ont engendré des catastrophes sociales et humaines. Car la famille soude ses membres par des liens affectifs, ce qui est un obstacle à l’appréhension de l’intérêt général donc de la démocratie, mais ce qui constitue une véritable énergie pour les individus.

Et, finalement, ces valeurs d’affectivité, qui nous gênent dans le cadre démocratique, ne seraient-elles pas ce qui fait la valeur de la famille. La famille serait un cadre nous permettant d’acquérir l’affectivité nécessaire à la construction de notre propre individualité. Ni plus ni moins. Et c’est peut-être pour cela que nous souhaiterions intégrer la famille dans le processus d’apprentissage de la démocratie, alors qu’elle n’est, et c’est déjà énorme, qu’à l’origine de notre personnalité.

Aujourd’hui il existerait un manque d’affectif dans notre société. En dehors du débat sur la déstructuration ou la restructuration de la famille, nous constatons que les individus se réalisent de moins en moins avec le concours d’un environnement familial (famille, amis, etc.). Et les bandes ou clans qui reconstituent une structure familiale absente montrent à quel point nous sommes à la recherche de liens affectifs. Une part de la violence dans notre société résulterait, lance-t-on dans la salle, de ce manque d’affection.

Notre triptyque républicain « liberté, égalité, fraternité » lie trois concepts indissociables. Ici, suggère-t-on dans la salle, la fraternité serait ce sentiment d’appartenir à un groupe dans lequel nous reconnaissons comme nos frères (nos égaux et nos semblables) des individus qui peuvent avoir des idées en totale contradiction avec les nôtres. La fraternité républicaine représente-t-elle uniquement cela ? Toujours est-il que dans ce cadre l’altérité y est plus vaste et la tolérance plus prégnante que dans celui de la famille. De cette fraternité républicaine peut naître une amitié et donc de l’affection. Alors que pour la fraternité au sein d’une famille, ce simple fait d’être frères (ou sœurs) biologiques, l’affectivité est à son origine.

On s’interroge aujourd’hui sur le besoin de rendre plus accessible l’exercice de la démocratie aux citoyens. Pour certains, la nation serait une échelle trop grande (la poussée du régionalisme, la démocratie de proximité font figures d’exemples). Pour d’autres, la famille, parce que inscrite dans notre quotidien, pourrait faire revivre la pratique de la démocratie. Nous l’avons vu, la famille, même si elle possède des valeurs essentielles dans la construction de l’individu, ne peut assumer cette praxis démocratique. Un juste milieu est certainement à étudier.

Interventions

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Jacques

jeudi 06 décembre 2012 12:32:32 +00:00

La famille ne saurait être mesure de toutes choses, quand bien même en serait-elle le creuset originel, puisque chacun noue, à l'échelle familiale, des liens inter-personnels impossibles au niveau d'une grande cité...de la prison, de la caserne, de l'école, de l'atelier ou du consortium : à chaque entité était un code de civilité correspondant à la fois à ses buts et à ses effectifs.
La famille impliquait en outre des enfants infances, à traiter en infans.
Enfin, les types de famille les plus vantés risquaient fort d'être les plus tarés : y naître, c'était y mourir !!!

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Jacques

jeudi 06 décembre 2012 16:53:13 +00:00

La formule liberté-égalité-fraternité me semblait par trop individualiste pour fonder quelque lien ; historiquement, elle n'avait servi qu'à dessouder les bourbonniens...aussitôt remplacés par des napoléonnides, leurs neveux par alliance ; il semblait ici que les français n'étaient pas encore près de sortir d'affaires avec tous ces gentils gaullistes-pompidoliens-giscardiens- mittérandiens et autres sarkozistes, dans les bras desquels ils s'étaient tour-à-tour jetés, à leur insue, de leur plein gré !!!
Autrement plus consistant me semblait ce beau principe communal qui ordonnait au commun de ne laisser personne dans la rue.
Même le mouvement mutualiste avait pâle figure, en comparaison de l'idéal communal...qui concernait tout le monde, puisque personne ne pouvait décemment espèrer connaître ou échapper à sa propre fin-de-vie.
Ici, ce qui manquait le plus, ce n'était pas l'argent : c'était les hommes !...?

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