“Le comptoir d'un café est le parlement du peuple.”

Honoré de Balzac (1799 - 1850)

Bienvenue en Arcadie

Vous êtes ici : Accueil > Comptes-rendus > Euthanasie : faut-il légiférer ?

Compte-rendu synthétique par Élisabeth RodotCafé Citoyen de Argentan (28/10/2003)

Animateur du débat : Élisabeth Rodot

» Politique et Société

Euthanasie : faut-il légiférer ?

ShareThis

Les affaires récemment médiatisées ont posé le problème sur la place publique : faut-il, à l’instar de nos voisins européens, légiférer sur l’euthanasie ? Nos hommes politiques ainsi que l’opinion publique sont très partagés sur cette question, qui touche à l’intimité de chacun face à la souffrance et à la mort. Nous avons tenté d’y voir plus clair.

Une loi qui autoriserait, dans certaines conditions (à définir), les médecins à mettre un terme à la vie, présenterait l’avantage de déculpabiliser un acte qui se fait, de toute façon, de manière plus ou moins cachée, à la demande des patients qui n’en peuvent plus, ou de leurs proches. L’énorme responsabilité de celui qui « débranche » serait en quelque sorte assumée par la collectivité. Cette loi permettrait en outre d’offrir également à chacun la possibilité de bénéficier d’un « service » que certains médecins refusent d’accomplir de crainte d’être accusés de meurtre. Les patients, qui sauraient qu’ils peuvent avoir recours à l’euthanasie, pourraient ainsi se préparer plus sereinement à la mort, libérés de la perspective d’une souffrance intolérable. Le fait de légiférer devrait aussi donner un cadre, poser des barrières à un acte qui se fait de manière plus ou moins sauvage.

Mais les choses ne sont pas si simples : pour certains d’entre nous, cette loi pourrait être la porte ouverte à de nombreux abus. Que faire lorsqu’une personne n’est plus en état de choisir elle-même de mourir (vieillards, handicapés…) ? Qui choisirait pour elle ? Le risque est que certaines familles en profitent pour se « débarrasser » ainsi de personnes encombrantes ou trop lourdes à prendre en charge. D’autre part, une loi pourrait-elle être assez souple pour prévoir tous les cas particuliers des personnes en fin de vie, pour laisser encore aux proches la liberté et l’initiative d’accompagner les leurs jusqu’à la mort ?

Légiférer pourrait être aussi un moyen pour la société d’évacuer un peu facilement le problème des personnes lourdement handicapées, au lieu de chercher à améliorer leurs conditions de prise en charge. Il ne faudrait pas que cette loi freine un progrès social possible. Elle présenterait aussi le risque d’apporter une alternative trop facile pour tous les vieillards à qui la société offre une fin de vie indigne : « autant en finir tout de suite plutôt que de faire durer ce que je vis actuellement » se diraient certains… Ne devrait-on pas chercher au contraire à leur rendre la vie agréable jusqu’au bout ?

Cette question nous a aussi conduits à parler du progrès médical : en quoi est-ce un progrès de réanimer des gens coûte que coûte, au risque de les maintenir dans une survie artificielle ? Jusqu’où faut-il s’acharner à maintenir quelqu’un en vie ? Ne faudrait-il pas parfois laisser la nature faire son œuvre ? Pour certains, la vie est une valeur absolue et source d’espoir. Pour d’autres elle ne vaut d’être vécue que dans une certaine dignité. Nous remarquons toutefois le paradoxe flagrant de notre société qui, d’un côté s’acharne à faire reculer les frontières de la mort, de l’autre, revendique le droit à l’euthanasie.

Cette délicate question, même si elle nous met mal à l’aise, a au moins le mérite de nous faire aborder des questions éthiques, comme la souffrance, la mort. La société a du mal à parler ouvertement de ces sujets plus ou moins tabous. C’est d’autant plus difficile de donner une réponse collective à des questions aussi intimes. Si tout le monde est d’accord pour dire que la souffrance est inacceptable et que les médecins doivent tout faire pour l’atténuer, savoir quand et comment on est prêt à affronter la mort reste une question éminemment personnelle. Personne ne peut décider à notre place, et il n’est même pas sûr que nous soyons en mesure de décider pour nous-mêmes. Entre ce qu’on affirme un jour de déprime ou de découragement, et ce qu’on pourrait dire un jour où la douleur est moindre, il y a toute une vie… Comment donc faire une loi là où une décision personnelle nous paraît si difficile ?

Thèmes proposés pour le Café Citoyen du mercredi 12/11/2003 :

- La place du sacré dans notre société.
- Superstition ou sacré ?
- Quelle dignité pour les personnes âgées ? Thème retenu
- Quel sens donner à sa vie ?
- Avons-nous conscience d’être manipulés ?
- L’autre a-t-il quelque chose à me dire ?

Interventions

Participer au débat

Les champ marqués d'une * sont obligatoires

Marre de retaper vos coordonnées ? Créez un compte ! Créer un compte permet d'être averti des nouvelles contributions, d'être reconnu et donc de ne pas avoir à taper ses coordonnées pour participer aux débats.

Premier ouvrage des Cafés Citoyens

Où en est l'esprit démocratique aujourd'hui ?

La démocratie, c'est nous !

En savoir plus