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Honoré de Balzac (1799 - 1850)

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Compte-rendu synthétique par Élisabeth RodotCafé Citoyen de Argentan (09/12/2003)

Animateur du débat : Élisabeth Rodot

» Économie

Consommation : superflu et nécessaire...

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Il est courant d'entendre nos concitoyens déplorer une consommation excessive généralisée dans notre société : « on consomme trop, on mange trop, on gaspille… ». Nous avons réfléchi au sens que revêt l'acte de consommer aujourd'hui pour nos concitoyens : où situer « l'excès » ? Dans quelle mesure cet acte est-il conditionné ? Peut-on consommer autrement ?

Il est très difficile de définir une norme en matière de consommation. En dehors des comportements pathologiques où l'excès est flagrant, on a du mal à établir la frontière entre ce qui nous est nécessaire et ce qui est superflu, deux notions éminemment subjectives : untel aura besoin d'acheter des vêtements à la mode, telle autre désirera des bijoux ou du parfum, ce qui pourra apparaître à une tierce personne le comble de la superficialité… Notre société nous offre une multitude d'objets de consommation bien inutiles par rapport au minimum vital (manger, avoir un toit, s'habiller chaudement…). De plus, ce qui est nécessaire ou superflu n'aura pas le même sens pour un occidental ou un habitant du Tiers Monde… Pourtant, dès le début de la civilisation l'homme a éprouvé le besoin d'entourer de beauté la satisfaction de ses besoins vitaux, en créant l'art culinaire, les bijoux, la beauté vestimentaire etc… Donc créer et consommer du superflu est peut-être précisément un besoin vital pour l'homme, un élément fondateur de la culture humaine, qui le distingue de l'animal.

Il est plus intéressant de se demander ce que représente pour chacun d'entre nous l'acte de consommer. Il est évident que dans cet acte banal et quotidien sont en jeu des pulsions profondes à travers lesquelles s'exprime notre moi : on achète généralement en obéissant à un désir, pour se faire plaisir. La manière dont chacun d'entre nous négocie son rapport à ses désirs va entraîner des comportements de consommateurs différents : certains se laissent aller à des achats compulsifs, sous l'injonction d'un désir ponctuel, d'autres prennent le temps de réfléchir et de choisir. Pour certaines personnes, acheter est aussi une manière de devenir sujet, une manière de combler un manque à être. Ce sont souvent les gens qui ont le moins de moyens qui consomment le plus, attendent le plus de la consommation. Le fait de posséder (par exemple d'avoir un congélateur plein) peut aussi rassurer une angoisse profonde du manque. Le problème est que notre société utilise ce désir latent en chacun de nous pour nous entraîner dans une spirale inflationniste de consommation d'objets vides de sens, qui ne comblent pas le désir. La surabondance d'objets vient remplacer le lien social, vient remplir le vide des existences.

Parce que la consommation est la pierre angulaire de la société dans laquelle nous vivons, tout est soigneusement pensé pour manipuler les consommateurs. Les modes vestimentaires ou l'engouement pour certaines marques chez les jeunes exploitent le besoin naturel d'être reconnu par le groupe. La publicité utilise l'attente préalable et légitime des gens pour les faire consommer, mais piège ceux-ci dans l'illusion qu'ils seront plus heureux s'ils achètent des produits de mauvaise qualité. La quantité a remplacé la qualité, on est pris au piège des campagnes de promotion, se précipiter sur les soldes est un phénomène courant à chaque début d'année, on se laisse tenter par les offres de paiement différé…On consomme d'avantage d'objets jetables bien que technologiquement on soit capable de fabriquer des objets solides. Tout est donc organisé pour un profit maximal et l'économie a pris en otage notre bonheur.

Cependant, même si nous sommes prisonniers d'un système, nous en sommes aussi quelque part les acteurs. Il est faux de penser qu'un « deus ex machina » se cache quelque part pour tirer les ficelles à notre insu. Même si beaucoup de choses nous échappent, le citoyen a les moyens de réfléchir à sa manière de consommer, de prendre du recul. Il faut apprendre aux enfants à rester maîtres d'eux-mêmes, à choisir, à ne pas céder à la pression du groupe. Consommer différemment peut être aussi un moyen de militer pour une autre mondialisation, par exemple en achetant des produits du commerce équitable, ou en privilégiant les petits commerces face au supermarché. Chacun de nous dispose donc d'une parcelle de pouvoir dans son comportement de consommateur.

Thèmes proposés pour le Café Citoyen du mardi 06/01/2004 :

- Comment rapprocher les citoyens des décideurs ?
- Quel avenir pour Argentan ? thème retenu
- Après nous le déluge ?

Interventions

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Anonyme

mardi 19 octobre 2010 11:53:41 +00:00

Essayer d'appliquer les notions de nécessaire et de superflu à la réforme des retraites....comme pour la consommation...finalement c'est peut être cela l'avenir du développement durable car qu'on le veuille ou non tôt ou tard il faudra bien modifier nos façons de voir et vivre autrement....

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