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Honoré de Balzac (1799 - 1850)

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Compte-rendu analytique par Jean-Marie SeeuwsCafé Citoyen de Caen (09/02/2008)

Animateur du débat : Marc Houssaye

» Religion et Spiritualité

Existe-t-il une spiritualité laïque ?

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Animateur - Je vous donne d'abord un certain nombre d'informations concernant les Cafés Citoyens. Une personne de Saint-Brieuc nous a contacté pour monter un Café. Si vous connaissez du monde qui serait intéressé par la même démarche, n'hésitez à lui parler du principe des Cafés Citoyen et pourquoi pas l'inviter à Caen. Saint-Brieuc n'est pas très loin de Caen. Et puis si elle d'accord, nous en parler pour qu'on puisse en discuter ensemble.

[Rappel de la Charte]

Intervention n°1 - "Le jeudi 20 décembre 2007, le Président de la République en visite au Saint Siège prononçait le discours de Latran, dans lequel il se livrait à une habile critique de la loi de séparation des Églises et de l'État, en même temps qu'à celle d'une laïcité qualifiée « d'épuisée ». Dans son propos, il appelait même les chrétiens - en raison de leur liberté spirituelle - à participer ostentoirement, en tant que tels, au débat public. Pourtant, les Évangiles de Matthieu, de Marc et de Luc font dire à Jésus la désormais célèbre phrase : « Rendez donc à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. ». Ces mots expriment l'essence même de la laïcité qu'est la séparation du pouvoir temporel et du pouvoir spirituel. Le premier administre la Cité en dictant les règles de la collectivité et en s'attachant souvent au caractère illusoire de la matérialité, tandis que l'autre – si on en exclut le dogme - s'adresse à l'âme de chacun, charge à lui de trouver l'éveil (« Aide-toi le Ciel t'aidera »), le souci d'élévation, et la paix intérieure. Depuis que la France a cessé d'être « la fille aînée de l'Église », la laïcité est une constituante essentielle de notre République. Ses principes de tolérance, d'ouverture d'esprit et d'universalisme ont permis qu'aujourd'hui le spirituel soit effectivement dégagé du religieux. En son nom, chacun peut choisir ou non de suivre un chemin spirituel puisé dans telle ou telle tradition, sans que ce choix ne conduise à une quelconque primauté de sa pensée sur une autre. Alors ? L'esprit peut-il s'élever de la sorte ? Peut-on dire qu'il existe une « spiritualité laïque » ?"

Animateur - Voilà donc l'intervention de la personne qui a proposé le thème. C'est une question qui est d'actualité, on l'a entendu, suite au discours notamment de notre président de la République à Latran. Depuis, je crois, il y a eu un autre discours, celui de Ryad, qui va aussi dans ce sens d'ouverture. Alors c'est un débat d'actualité, mais il ne faut pas oublier que c'est surtout aussi un débat - c'est très important - qui a rythmé nombre d'époques. Donc on voudra aussi s'attacher à mon avis à ne pas rester ancré dans l'actualité, essayer de réfléchir à la spiritualité laïque et puis de savoir déjà ce que cela signifie.

2 - C'est un sujet qui me chauffe beaucoup, parce que ,disons qu'on a besoin pour faire le point sur cette question importante de se dégager de toutes les images qu'on a eu sur ma foi cette séparation de l'église et de l'état qui ne s'est pas faite images un peu grossières, un peu fortes j'allais dire. Là-dessus j'arrête et il faudrait peut-être qu'on se pose la question de ce qu'est la spiritualité. Je ne vois pas très bien d'ailleurs, on pourrait penser que le mot sagesse correspondrait peut-être sur le plan laïque, peut-être que la spiritualité laïque serait la sagesse, comme on voit des sages qui ne sont ni chrétiens, ni même croyants, des sages tout court. Chez les grecs il y avait des sages, peut-être que ça correspond à une certaine forme de l'esprit, à une transcendance de l'esprit, voilà. Définir ça et définir ce que c'est la laïcité, qui a mon goût, et c'est là que c'est important, doit se dégager tout en se dégageant des anciennes images, doit se faire, disons, plus positive. C'est-à-dire qu'elle accepte chez les individus d'avoir des croyances qui leur sont propres. Une institution laïque doit évidemment éviter de faire du prosélytisme, c'est évident, mais elle doit au contraire permettre aux gens d'exprimer, je ne veux pas dire porter le voile, on en parlera tout à l'heure, de pouvoir exprimer leur propre confession, voilà point.

Animateur - On est tout de suite entré dans le champs politique, moi j'ai envie de vous poser la question suivant, est-ce que le fait d'associer ces deux termes, spiritualité et laïcité, comment vous le sentez, comment vous voyez cette association, est-ce que ça vous semble naturel.

3 - Pas du tout, je pense justement que c'est capital qu'on respecte la libre pensée de chacun, mais dans l'attention à ce que les autres pensent, et sans vouloir en quoi que ce soit l'imposer. Il est évident que dans le domaine religieux, on n'a pas de certitude absolue, on est toujours en chemin. Alors c'est capital, chacun peut avoir ses convictions personnelles en fonction de son expérience personnelle mais être attentif aux autres et ne pas imposer ce qu'on a soi-même découvert. Je crois que c'est cela la démarche fondamentale. Hier j'ai eu à témoigner dans une institution catholique, à Sainte-Marie, sur l'exclusion. Justement j'ai dit que personnellement j'ai eu beaucoup de difficultés au point de vue social, parce que pour différentes raisons. Il y a des gens qui veulent imposer leur vision des choses. J'étais dans l'enseignement, c'était une certaine vision de la pédagogie qui était imposée par l'institution qui s'appelle l'éducation nationale, j'ai été foutu dehors, mais il y a quelque chose au fond de moi qui me disait non tu n'as pas nécessairement tort pas plus qu'eux ont nécessairement tort de leur coté. Il s'agit de trouver une autre solution mais toujours tenir debout. Je crois que c'est ça qui est essentiel. Bon ici, je sais bien que lorsqu'on arrive au café citoyen chacun arrive avec son conditionnement propre, en fonction de son éducation, de son enfance, du métier qu'il exerce, mais nous avons à exercer une vigilance constante pour savoir accueillir la parole de l'autre, même si d'une certaine manière elle peut éventuellement nous énerver et puis tirer un nouvel élan de créativité à partir de ce que l'autre dit.

Animateur - Vous nous parlez de la tolérance, l'esprit de tolérance, l'esprit d'ouverture, d'écoute des convictions des autres. Pour vous cela doit correspondre à la spiritualité laïque, c'est ça ? Est-ce que l'on peut essayer de savoir à quoi ça pourrait correspondre, essayer peut-être déjà de décortiquer, c'est la spiritualité, c'est quoi la laïcité. Avez-vous une idée. On va procéder par méthode cartésienne.

4 - Je voudrais revenir un petit peu, bon spiritualité, ce n'est pas toujours facile d'ajouter un adjectif au terme spiritualité. Donc je pense, je prendrais plutôt, en me référant au père fondateur de ce qui était l'idéal laïc. L'idéal laïc c'était de forger un homme nouveau, qui soit libéré des croyances, qui soit républicain et citoyen. Comment, par quel biais, par l'école, par l'enseignement scolaire. Cet enseignement était basé sur la morale laïque et sur l'instruction civique. Ce principe devait être universel et s'appliquer éventuellement à toute l'humanité pour arriver à la concorde. Voilà un petit peu ce qu'était l'idéal laïc. Bon malheureusement au jour d'aujourd'hui, cet idéal comme tous les autres idéaux par, disons, le mouvement libertaire et par le consumérisme, a disparu .Alors on peut se poser la question, qu'en est-il maintenant à l'école de cette moralité, l'enseignement de la morale je pense qu'il y a longtemps qu'on l'a supprimé, quant à l'instruction civique malheureusement elle n'est pas assez consistante pur avoir introduit le civisme à l'école. L'école est devenue malheureusement le reflet de la société actuelle qui n'a pas de repaire et qui ne croit plus en rien. Moi je ne dis pas qu'il faut croire en Dieu, attention ce n'est pas ça. Je me réfère un petit peu à un article très intéressant qui a paru dans le figaro, de Comte Sponville, un philosophe athée, très intéressant qui effectivement dit, actuellement ce qui est le plus à craindre pour la société actuelle, être laïc pour lui c'est être contre le fanatisme et le nihilisme.

Animateur - Intervention assez riche, je ne vais pas tout résumer, je ne vais pas tout prendre, mais il y a plein de pistes à mon avis. Vous avez rappelé André Comte-Sponville qui comme Rodolphe Steiner ont parlé beaucoup de spiritualité et de laïcité. Ce qui me semble intéressant ce sont deux points, premièrement vous nous dites que la laïcité pour Comte-Sponville c'est être entre le fanatisme et le nihilisme, on pourrait s'interroger sur l'état actuel de notre société par rapport à ça. Deuxième point, vous dites que la laïcité c'est créer un homme nouveau libéré de toutes les croyances. Alors on peut s'interroger sur les croyances aujourd'hui, et pourquoi fallait-il s'en libérer, plein de questions finalement. Alors laïcité c'est quoi pour vous, n'hésitez pas à prendre la parole, on est tous là pour dire des bêtises, il ne faut pas hésiter.

5 - Comme vous appelez à dire des bêtises, cela me rassure. J'arrive mal à comprendre ce que signifie ce terme de spiritualité laïque. C'est vrai que je suis plus habitué à raser les pâquerettes qu'à m'élever dans les nuages c'est peut-être pour ça. Mais la laïcité pour moi, c'est comme il est dit dans le préliminaire de Fabrice, distinguer, de ne pas mêler le temporel au religieux. Ca ne devrait pas aller au –delà. Donc déjà en faire une doctrine comme vient de rappeler monsieur, qui consiste à expurger toute croyance, c'est déjà pour moi dépasser le laïc tel que je le conçois, ça le transforme presque en une autre religion. C'est peut-être là qu'on pourrait trouver un lien entre la laïcité et le spirituel, peut-être. Pour comprendre cette laïcité et surtout pourquoi on en parle aujourd'hui, même si vous avez demandé de ne pas trop rapprocher du présent, mais si ce sujet a été proposé et retenu, c'est bien parce qu'il y a eu des déclarations dont personnellement je ne vois pas bien le but. En tout cas l'une des conséquences serait de réveiller cette « guerre » qui peut exister entre les religions et le pouvoir temporal. L'origine que rappelait monsieur, était quand même dans un contexte où il y avait de fortes oppositions entre le religieux et le temporel, à tort ou à raison mais c'est une constatation historique. Cela a abouti en 1901 à une première loi, dite aujourd'hui loi sur les associations, mais ses motivations principales était quand même de casser la puissance des religieux dans l'état. 9a a été renforcé en 1905, puis un peu calmé, le dernier réveil de cette guerre date de 1984. Donc ce n'est pas un conflit complètement éteint et le type de déclaration telle que celle qui a provoqué le débat d'aujourd'hui, risque précisément de réveiller cette querelle latente. Il y a quand même des gens qui sont fondamentalement anticléricaux, antireligieux et pour moi je dis que ce type de fanatisme est aussi dangereux que le fanatisme religieux. L'idéal de vie c'est de vivre chacun en fonction de ses pensées avec la tolérance sans partage et sans discussion.

Animateur - Donc là on est plus dans la modération, surtout de faire attention à ce qu'on ne ravive pas des combats qu'on a vu au siècle dernier pour imposer notamment la loi de 1905, séparation des églises et de l'État. Mais on peut aussi s'interroger sur cette loi de 1905, est-ce que c'est vraiment quelque chose qui correspond à la laïcité. Et puis n'oublions pas que la laïcité vient du grec avant tout, laïkos n'est-ce pas ?, qui signifie « peuple », « qui appartient au peuple ». On peut donc revenir sur cette nouvelle notion, de spiritualité laïque, donc est-ce qu'il pourrait y avoir une « spiritualité du peuple », pris au sens de communauté de destin.

6 - Justement je suis venue pour savoir ce qu'était la spiritualité laïque. La tolérance tout le monde le sait, on sait très bien qu'il faut être tolérant, mais est-ce qu'il n'y a pas autre chose dans la laïcité que la tolérance. Il y a peut-être une recherche de la valeur humaine en dehors de tout acte divin. Ca m'aurait intéressée d'avoir vos opinions là-dessus. Moi je suis athée, totalement athée depuis 100 ans, si on peut dire, je ne suis absolument pas anticlérical ni quoi que ce soit et je cherche toujours depuis l'enfance une raison à ma vie en dehors de tout culte puisque je suis athée. Ce qui m'intéressait c'est d'avoir vos recherches dans tout ça, sur la spiritualité, puisque la tolérance, nous devons tous être tolérant que nous soyons religieux ou pas, que nous soyons athée ou catholique ou protestant, la tolérance c'est une notion universelle pour tout le monde. Mon grand père disait si tu craches en l'aire ça te retombe dessus, c'est un proverbe qui est bon pour tout le monde. Donc ça m'intéresserait de savoir si vous trouvez qu'il y a quelque chose dans la laïcité qui fait intervenir l'essence même de l'homme, c'est-à-dire en dehors de toute croyance.

Animateur - Vous pourrez nous préciser ce que signifie pour vous l'athéisme

6bis - Pour moi parce que je suis en recherche, je ne dis pas que je détiens la vérité, pour moi l'absence de Dieu c'est que Dieu ne m'est pas extérieur.

Animateur - D'accord, alors, il y a plein de choses de dites. On peut s'interroger sur la vérité, vous nous dites que vous êtes en quête, vous recherchez. En parlant de religion, ce sont quand même des dogmes, des vérités révélées, donc il y a des vérités qui nous sont imposées, on accepte ou pas. Vous n'êtes pas dans ce créneau là et vous nous avez parlé d'un autre point qui me semble aussi important, c'est la recherche de valeurs humaines dans l'esprit de laïcité, qu'on pourrait rapprocher à une sorte d'humanisme. On peut creuser là-dessus et relier à notre thème d'aujourd'hui, existe- il une spiritualité laïque ?

7 - Pour moi la spiritualité dans son terme s'oppose à la rationalité à la matérialité. Dans l'esprit justement de la création de l'esprit laïque, de la recherche de la laïcité, c'est une élévation de l'esprit de croire quel que soit justement son dogme on peut avoir une spiritualité, donc il n'y a pas antinomie, ce n'est pas possible, sinon ce serait réduite l'homme à quelque chose sans esprit. Mais la laïcité c'est justement dans se spiritualité, c'est une recherche de l'homme en tant, sans calcul de différence, de pouvoir, sans qu'aucun dogme quel qu'il soit ne le rende ou meilleur ou pire, c'est-à-dire juste effectivement son humanisme, sa valeur humaine. La recherche de la laïcité c'est dans l'école, ne pas croire qu'un dogme quel qu'il soit apporte un plus. Chaque individu peut être pris en tant qu'être à part entière pour ce qu'il a de positif, de bien, de communication, de citoyenneté et on s'arrête là, il n'y a pas de jugement de valeur par rapport à un dogme. Le pouvoir catholique avant était justement un peu trop fort et étouffant.

Animateur - Vous rappelez sur la fin de votre intervention quelque chose qui correspond à une vérité historique, c'est le fait que lorsque la loi de 1905 a été votée il y avait quand même des tensions fortes avec l'église catholique, à l'époque c'était cette religion qui était la plus représentée en France, et que donc on a forcément assimilé la laïcité à un combat contre les religions. Alors ça c'est quelque chose qui correspond à une vérité historique, est-ce qu'on peut forcément associer la laïcité à ce combat contre la religion. Du coup on se pose la question de savoir si la spiritualité laïque a un sens ou pas. Effectivement du coup laïcité spiritualité il y a des étincelles.

8 - Je ne vais pas répondre à votre question tout de suite. Je venais aussi en me posant la question, qu'est-ce que c'est spiritualité laïque, pour moi ça ne veut rien dire du tout, je ne comprends pas bien en fait. Spiritualité pour moi, c'est une élévation, c'est une recherche de quelque chose ou de quelqu'un, c'est la recherche de notre âme, notre être intérieur, on peut donner des définitions différentes. La laïcité pour moi c'est justement le fait de permettre, quand on dit un état laïc, c'est de permettre à une personne à un individu de pratiquer la religion. Après il y a une différenciation entre religion et spiritualité, quelqu'un peut être spirituel et pas religieux, mais la laïcité c'est permettre à une personne de pratiquer quelle que soit sa religion. Je n'arrive pas à discerner le débat.

Animateur - Je crois qu'on arrive à une question intéressante, on parle de l'état laïc qui est là pour faire en sorte justement que des individus qui croient ou non, puissent vivre en communauté. C'est là que peut-être le terme de spiritualité, qui est un terme d'élévation de l'esprit peut poser une question.

9 - Si on se pose la question aujourd'hui pour moi c'est qu'on a toujours associé spiritualité et religion comme si la spiritualité ne pouvait pas être dissociée de la religion. Or moi je pense que la spiritualité c'est une quête, c'est une recherche qu'on a et une ouverture vers les autres. C'est comme ça que je ressens la spiritualité, je suis preneur des réflexions autour de ça. Je pense qu'effectivement c'est une ouverture sur des valeurs qui sont peut-être des valeurs assez proches des valeurs judéo-chrétiennes mais qui ne sont pas que celles là. Rien n'empêche dans une société d'avoir une spiritualité, après on s'appuie sur la religion éventuellement pour développer sa spiritualité, mais on peut tout à fait s'appuyer sur autre avec des valeurs qui sont des valeurs humanitaires.

Animateur - Vous faites une différence entre spiritualité et religion, on pourra s'attarder là-dessus puisqu'effectivement c'est quelque chose d'assez différent, peut-être même des fois contraire, il y a une dimension collective à la religion. On peut aussi s'intéresser sur quel est l'esprit qui sous-tend, parce qu'on a du mal à voir ce que pourrait être la spiritualité laïque. Je ne dis pas si ça existe ou pas, mais quel est l'esprit qui sous tend cette mise en place d'organisation sociale, ça veut dire qu'il y a quand même un esprit derrière tout ça pour faire cohabiter les gens entre eux qui croient, qui ne croient pas, ce n'est pas un matérialiste pur qui s'intéresse à l'esprit.

10 - Je crois que tout simplement la réponse c'est l'amour, l'amour que l'on porte aux hommes.

Animateur - D'autres interventions, n'hésitez pas. Qu'est-ce que c'est pour vous, est-ce que déjà pour vous il a des choses qui pourraient se contredire dans le fait d'associer spiritualité avec la laïcité. Je pense que ce serait bien d'avoir cette position là.

11 - Peut-être une autre façon d'aborder le sujet, faire la différence, et peut-être que cela explique cette antinomie dont je parlais tout à l'heure, on assimile une croyance à une organisation. On arrive un peu à mélanger tout, quand on est contre l'église on n'est pas forcément contre la croyance des individus qui la composent, mais on est contre la puissance réelle ou supposée de l'église aujourd'hui ou dans le temps. Donc peut-être qu'à ce moment la spiritualité comme disait madame est quelque chose d'individuel. Dès l'instant où l'on s'adresse à une organisation elle devient matérielle, ce n'est plus la spiritualité. Si on considère qu'il existe une spiritualité laïque, j'arriverai à dire comme conclusion que l'on imagine un conglomérat laïc qui s'oppose au conglomérat religieux, sinon on ne comprend plus le terme spiritualité.

Animateur - On a toujours cette idée qu'il y a confrontation entre le religieux, les églises et les tenants d'une institution laïque, on peut s'interroger là-dessus.

12 - Ce que je voudrais dire c'est qu'en faisant table rase de toute cette différence qui opposerait le laïcisme et la spiritualité. A partir du moment où quelqu'un a besoin d'élever sons esprit, déjà tout le monde sait ce que c'est qu'élever son esprit, c'est faire des mathématiques, de la philosophie et aller plus loin dans la réflexion, je pense que c'est déjà ça. A partir du moment où l'on tendrait vers une élévation telle que l'on imaginerait une super puissance, un dieu, alors on n'oserait pas dire, on se crée un univers qui va faire en sorte que des gens vont s'associer à vous dans la pensée pour en faire, le mot religion c'est religare, être relié, c'est déjà être associé à quelque chose. Alors déjà on peut imaginer que dans les communautés, dans les pays, dans les régions vous avez des communautés, des associations de personnes qui se groupent autour de certaines croyances, je ne vais pas dire religieuses, mais ça revient presque à une religion. Alors dire que la laïcité c'est quelque chose, c'est quand même, c'est une religion, mais dire qu'il n'y a pas de religion dans la laïcité ça veut dire que, je vais continuer mon raisonnement, c'est le vide, c'est du nihilisme, c'est rien. Alors peut-être que, et en fait ça reviendrait à dire se priver des religions c'est un équilibre extrêmement instable, on revient nécessairement vers les religions. Donc vous voyez la réflexion fait que la religion de rien, ça ne ressemblerait à rien dire que la laïcité ce sont des gens qui ne croient à rien, ça n'a pas de sens.

Animateur - Il y a aussi une autre chose qui me semble intéressant, vous dites ça part et ça revient etc. mais ça me fait penser à la célèbre formule de Lavoisier, » rien ne se perd, rien ne se crée tout se transforme », on a pendant quelque dizaine d'années pensé que les religions avaient disparu du champ de la société, mais moi j'ai plutôt tendance à croire que tout se transforme. Comment peut-on considérer aujourd'hui que la société en quoi elle est religieux, où la religiosité s'est-elle mise en place.

13 - Peut-être que cette société recherche la spiritualité, bon elle ne l'a pas trouvée peut-être dans certains religions, elle ne l'a pas trouvée dans la non religion, moi je pense qu'elle est en perte de repère. Elle a besoin de repère, alors on ne sait pas très bien, il faut inventer peut-être une nouvelle spiritualité, je n'en sais rien. En tout cas, quand je lisais l'article de Comte-Sponville, j'ai été quand même assez frappé qu'un athée soit, un athée même je dirais qu'un athée est très tolérant finalement, un véritable athée, parce qu'il veut qu'on respecte sa non croyance et il veut qu'on respecte les croyants. C'est un peu ce qu'il disait dans son article, ce n'est pas parce que l'école est laïque que les enfants qu'on lui confie doivent être laïcs, ça c'est important je trouve. C'est-à-dire qu'il ne faut pas vouloir prendre un enfant, en faire un homme, en faire un tout qui finalement s'il est neutre, ce que disais mon voisin tout à l'heure, il y a un grand risque, la neutralité c'est le néant, qu'est-ce que le néant c'est le vide, et je pense que la nature a horreur du vide. Qu'est-ce qui peut remplacer le vide ?

Animateur - C'est une bonne question ça, qu'est-ce qui peut remplacer le vide, le plein ?

14 - La question était quels sont les lieux où se développent la religion aujourd'hui, je disais en aparté, dans les centres commerciaux qui sont un peu les nouveaux temples de notre société. C'est un peu une boutade mais ce n'est pas complètement par hasard. Sur la spiritualité laïque, si on considère que la laïcité est apparue comme un contre pouvoir tout simplement, à un pouvoir religieux et économique fort, la laïcité pour emmener les hommes derrière elle, pour être motrice aussi de quelque chose, à mon sens c'est créer une laïcité. Moi j'ai un exemple qui me revient en tête assez précis, bien avant la loi sur la laïcité, il y a eu la révolution française, et puis il y a eu la création d'un calendrier républicain dans lequel on a remplacé tous les noms des saints par des nomes d'arbres, de plantes, d'animaux etc. Ce qui veut bien dire qu'il a fallu que la société, il faut trouver une consistance spirituelle à un projet politique qu'il soit laïc ou religieux en définitive. La question après de savoir si la religion peut-être politique ou pas, c'est le pendant de la question laïque.

Animateur - C'est toute la question, la séparation entre le religieux et le politique, depuis des centaines d'années on a essayé de dissocier les deux. Et puis on nous l'a rappelé au début, Jésus était, on le prend comme quelqu'un d'important du point de vue de la religion, mais politiquement aussi c'était un personnage et donc on a rappelé sa citation, rendons à César ce qui est à César et rendons à Dieu ce qui est à Dieu. C'est aussi un grand acte politique.

15 - Pour en revenir à votre réflexion, Jésus a commencé par chasser les marchands du temple, donc en fait à cette période là on peut remarquer l'ordre marchand était bien en route ce qui a donné une réaction assez vive de la part de Jésus. Mais au départ tout cela n'était jamais que l'émergence d'une secte parmi d'autres sectes. Je crois que c'est Jean Baptiste qui défendait les croyances à coté de celle de Jésus, après il a rejoint Jésus dans son action auprès des foules. Je pense que dans la discussion que noua avons en l'état actuel, je crois que l'on ne prononce pas ce que nous avons tous en tête, c'est-à-dire que finalement le souhait qui apparait c'est qu'une volonté de séparer l'action politique qui est en fait, qui devrait être de régler les problèmes de telle façon que les hommes puissent vivre ensemble de façon cohérente et pleine, de façon à réduire les inégalités, et puis là zen retrouve aussi la démarche que Jésus avait à l'époque où il vivait. En fait ce que nous craignons, on ne l'exprime pas trop, c'est la place du religieux dans une société civile et j'ai l'impression que quelque part nous l'appréhendons. Alors on peut s'intéresser sur le pourquoi, peut-être aussi que les religieux ont eu une emprise trop forte à différentes époques sur le comportement de l'individu où la religion lui imposait une règle de comportement. On le retrouve aussi aujourd'hui avec un certain décalage avec les musulmans qui eux aussi par leurs prêches veulent imposer aux croyants une façon de fonctionner en société, pas tous les musulmans, je ne fais pas des affirmations, je m'en garderai bien, je sais simplement que de la même façon, c'est le problème des trois religions monothéistes, de la même façon qu'on peut observer en Israël, bon l'équilibre est très difficile à établir, la religion imprime dans le comportement de l'état parfois des actions qui vont à l'encontre d'un équilibre de la région. Peut-être, mais enfin c'est une question que je pose, peut-être que nous appréhendons une prédominance déterminante du religieux dans la vie politique, sociétale.

Animateur - Une petite rectification, vous dites les musulmans imposent, alors c'est vrai que l'on a tous tendance le fit de mélanger avec les islamistes fanatiques mais il y a des fanatiques partout. C'est vrai qu'on a tendance à faire des raccourcis mais bien évidemment il s'agit plutôt de soutenir les musulmans modérés qui sont la grande majorité. Moi j'ai envie de vous poser la question, aujourd'hui, et on a rappelé tout à l'heure avec le fait de rapprocher la société consumériste avec une sorte de religion, est-ce qu'aujourd'hui en voyant s'effondrer, en tout cas les prémices de l'effondrement de cette société à laquelle on a cru pendant une dizaine d'années, est-ce que ce n'est pas ça qui réveille ce questionnement et cette quête de sens ? Finalement on est en train de chercher autre chose.

16 - Je ne pense pas que je vais répondre à la question, mais moi il me semble, enfin dans mon esprit, je me trompe peut-être, je me suis toujours dit que la laïcité peut être un idéal de l'esprit. Alors est-ce que c'est ça qu'on appellerait spiritualité laïque, mais ce qui me semble sur est que l'homme politique devrait être garant de la laïcité. Pour moi la laïcité c'est mettre l'homme au centre de tout. Ce que je voulais dire, il me semblait que la laïcité ? Et il me semble important que les hommes politiques en soient garant, c'était que l'homme est capable du pire comme du meilleur quelle que soit sa religion et que le fait de garantir la laïcité c'était, alors vraiment collectif aussi, d'arriver à donner à l'homme dans l'humanité une place centrale et que toute la politique soit basée autour de ça. Ce qui n'empêche pas à chacun d'avoir ou de ne pas avoir de religion à partir de ce moment-là, ça permet si on adhère à une religion, c'est souvent une question de foi d'ailleurs, et si celle-ci nous rend meilleur pour arriver à ce que la laïcité puisse, je veux dire pour moi la religion ne peut-être qu'un moyen que certains trouvent qui devrait abonder dans le sens d'une laïcité qui devrait arriver au bien de tous, de l'humain dans un esprit humaniste. Je crois qu'on peut arriver au même résultat avec ou sans religion, pour moi c'est ça la laïcité. Alors ça mis à part je modère ce que je dis, c'est vrai que je me pose la question, étant issue, bien que je m'en sois dégagée, d'une culture judéo-chrétienne, je me pose la question, quelqu'un pourra y répondre, que les vues humanistes qu'on peut avoir ou la vision de la laïcité qu'on a ,n'est pas forcément empreinte de nos notions de tolérance, d'amour qu'on a apprises dans une éducation religieuse. Ca c'est mon gros problème, enfin ma grande question c'est ça, ce qui m'énerve c'est de me dire dans le fond on m'a appris ça, est-ce que ça n'a pas dégénéré sur moi ou est-ce que, je ne sais pas. Donc je me pose toujours la question et je pense que je ne suis pas seule, mais moi je rêve d'un état laïque où l'on n'a pas besoin de religion pour arriver aux mêmes fins, et que la religion elle est multiple et elle devrait être une affaire de foi personnelle. Qu'on se regroupe en communauté qui croit à une même idée ça se fait dans tout, une association sportive c'est la même chose, la laïcité ça doit être une question de toute l'humanité.

17 - Je vais essayer de répondre en partie à ta question. Évidemment on est tous formés dès l'enfance par le milieu qui nous entoure, les parents, la famille, l'école etc. Tout au long de mon cheminement je me suis rendu compte que même si on appartient, comme tu te sens si mal à l'aise par ce que tu viens de dire, à une autre religion qui nous a formés, quelque part on se rend compte qu'il existe quelque chose d'individuel, il n'y a pas deux êtres humains identiques sur terre. Alors toute la problématique c'est de savoir rencontrer les autres, apprendre à les découvrir, à développer une fraternité, se dire qu'il y a une vision différente de ce qu'est la vie chez un autre, même si elle m'irrite, même si elle me met en colère, même si elle me donne envie de le trucider, mais elle a une signification, une valeur pour lui. Personnellement j'ai été élevé d'une manière extrêmement rigoureuse, très stricte dans une forme religieuse, mais c'est une chose que j'ai découverte, il y a tout de même une présence en moi, une force en moi, que l'on appellera comme on voudra, qui a fait que je résiste, je sais qu'il y a un cheminement possible et que je peux découvrir quelque chose de plus authentique. Ce que j'ai découvert maintenant, ici on est le 9 février 2008, ce n'est qu'une étape et je vais encore avoir des mutations en moi aussi, et je dois apprendre à être attentif par rapport aux autres aussi, à leurs propres mutations, cela demande un esprit extrêmement vigilant, extrêmement vivant. On peut être tolérant par rapport à l'autre et puis faire confiance que l'autre a une certaine tolérance vis-à-vis de nous aussi. J'ai relu il y a peu l'expérience d'un personnage qui est relativement connu, qui s'appelle Christian Murty, il y a tout un groupe de gens qui avaient fabriqué un nouveau messie avec lui. Un jour il a fait une démarche vigoureuse, il a dit non, et puis il dit la vérité ne l'a pas empêché d'être un être qui rayonnait d'une spiritualité authentique qui a éveillé, apaisé une quantité de gens autour de lui. Alors un autre aspect aussi qui m'a beaucoup frappé dans les derniers temps, j'ai travaillé un livre qui s'appelle « sociologie des religions » d'ailleurs j'ai beaucoup ri intérieurement, parce qu'il définissait aussi l'athéisme comme une religion. Religion il y a deux étymologies possibles, religare c'est-à-dire relier et relegere c'est-à-dire dire de nouveau, on ne s'est jamais entendu sur la définition vraiment indiscutable du mot religion, ce qui fait qu'à travers une religion des gens se mettent d'accord sur des valeurs. Nous ici quand on est d'accord sur la laïcité c'est qu'on a le souci de respecter des approches différentes de la réalité sur toutes ses formes, matérielle, mentales et spirituelles.

Animateur - On essaie, on voit qu'avec la laïcité on, essaie d'embrasser le plus de monde possible et si possible la totalité des êtres qui composent la société, c'est d'ailleurs peut-être pour ça Laïkos, le peuple, nous donne cette dimension sociétale. Si on voulait, parce qu'on a quand même une question à interroger, si on voulait savoir ce qu'est la spiritualité laïque, est-ce qu'on ne pourrait pas essayer de chercher ce qui au-delà des religions, ou à coté des religions fait qu'on se retrouve tous, finalement de trouver ce qui pourrait nous interroger sur ce qui nous dépasse finalement parce que la spiritualité c'est sortir en dehors de soi.

18 - Je pense que vouloir faire, il faut surtout éviter lorsqu'on parle de laïcité, de vouloir faire de l'homme un tout. Cet universalisme c'est peut-être actuellement une tentation, mais une tentation qui ne tient pas compte de la diversité des individus. C'est pour ça que je pense qu'effectivement comme disait un interlocuteur tout à l'heure, il faut tenir compte de l'individualisme de chacun. D'ailleurs Comte-Sponville le dit, on ne peut pas faire d'un enfant, disons un tout comme cela, l'école il y a de tout, il y a de la diversité, c'est justement ce qui doit faire la force d'une école laïque, c'est accepter la diversité, accepter la diversité avec ce qu'elle a de divers, avec ses cultures diverses, il faut le dialogue. Alors que peut-être effectivement il ne faut pas tomber dans une sorte de dogmatisme, c'est la pire des choses, c'est le dogmatisme pour moi. Je crois que quel que soit ce que l'on croit il ne faut pas être dogmatique, il faut être tolérant, je pense que c'est dans la tolérance qu'effectivement, mais tolérance ne veut pas dire non plus laisser n'importe quoi, c'est une tolérance acceptée et comprise par tout le mon de. Je pense qu'actuellement qu'est-ce qu'on demande le plus, moi ce que je trouve, ce que je voudrais trouver dans ce que j'appelle l'école, la première chose que je voudrais trouver c'est le respect. Quand je vois actuellement ce qui se passe, et on le voit dans beaucoup d'exemples actuellement, il n'y plus de respect, on ne se respecte pas entre élèves, on ne se respecte pas avec les enseignants, on ne respecte plus rien. Peut-être est-ce du à cet espèce, ce que disait Comte-Sponville, cet espèce de nihilisme, personne ne croit plus à rien, n'aime plus rien, il y a une sorte de désenchantement total, le désenchantement il est là. Alors justement, peut-être qu'il y a une crise politiquer là-dedans, ce que dit Comte-Sponville, la crise morale lui il n'y croit pas, il dit que chez les jeunes il y a des aspirations à des valeurs mais qu'on ne leur donne pas l'occasion de mettre ces valeurs en pratique.

Animateur - Là on revient sur le coté politique au sens noble du terme, c'est-à-dire qu'est-ce qui régit la cité. On sent bien effectivement, on nous bassine pour prendre un terme qui n'est pas très joli mais, on nous parle beaucoup de la crise des valeurs, est-ce qu'on ne pourrait pas s'interroger et mettre cette crise que nous vivons notamment sur le plan de la spiritualité. Je vais donner la parole aux personnes qui n'ont pas encore parlé.

19 - Je voulais juste répondre à l'histoire de chaque individu, je crois que l'idée de l'unité de l'humanité est encore une idée assez neuve, on a encore beaucoup de travail au niveau du racisme, su sexisme, de l'âgisme. Moi je pense que l'unité profonde de l'humanité, la solidarité humine, c'est ça la vraie valeur laïque.

Animateur - Intervention courte mais qui nous permet de nous interroger sur cette indivisibilité de l'humanité et surtout cette recherche de rassembler des individus qui sont tous différents pour essayer de construire, mais construire quoi, c'est ça qui est peut-être intéressant de se poser comme question. Dans le terme de spiritualité il y a une notion d'élévation qui est personnelle, il ne faut pas oublier que spiritualité c'est personnel à la différence des religions.

20 - Moi je dirais, la spiritualité pour moi ce n'est pas forcément synonyme de religion. Je rejoins un peu ce que disait Marc, en fait la spiritualité c'est aussi prendre du recul par rapport à son propre cheminement personnel, par rapport à sa propre vie. On vit dans une société, il faut donc chercher quelle est sa propre place dans la société, quelle est sa propre action que l'on veut mener au sein de cette société et de savoir où l'on va, quelles sont les valeurs qu'on doit mettre en pratique et savoir prendre du recul, penser et pouvoir se placer dans la vie sociale et savoir quelle est sa place dans le futur de notre vie pour construire quelque chose au sein d'un groupe ou pour soi-même. Alors bien sur la spiritualité je pense que c'est prendre une élévation par rapport au matérialisme, comme monsieur a dit tout à l'heure, maintenant la religion est beaucoup plus proche dans les centres commerciaux, on a l'impression qu'actuellement la valeur dans laquelle on va devoir croire c'est consommer, acheter, gagner plus pour consommer de plus en plus et puis la valeur de la croissance qui devient presque une valeur religieuse. Ca n'empêche pas qu'on peut rejoindre cette volonté de faire son propre cheminement de pensée, sa propre vie, sa propre place dans la société pour peut-être mieux s'insérer au sein des autres tout en respectant aussi les autres tout en ayant une volonté d'accepter la croyance de chacun au dieu qu'il souhaite ou bien à la personne qu'il souhaite selon les différentes religions. On peut rejoindre spiritualité et laïcité, spiritualité je viens de le dire ce n'est pas forcément une pensée religieuse, c'est peut-être une pensée humaniste même si l'humanisme peut rejoindre des valeurs religieuses et donc la laïcité c'est vivre dans une société où on n'impose pas aux autres sa propre croyance qu'elle soit religieuse ou autre de façon à pouvoir accepter le plus grand nombre et avancer tous ensemble dans la société. Moi c'est, tout en sachant j'ai eu aussi étant jeune une éducation religieuse, je ne pratique pas forcément maintenant mais j'accepte certaines valeurs. C'est vrai que la laïcité peut aussi se compléter ou être certaines valeurs de liberté par rapport à l'église, qui pourrait imposer des choses à des gens avec une doctrine particulière sans que les gens aient du recul par rapport à ce qu'on leur impose.

21 - Je suis quand même perplexe, c'est la dame qui a parlé un peu avant qui disait si j'ai bien compris, qu'il serait souhaitable d'avoir un tronc commun dans la pensée de façon à unir, c'est un peu on peut qu'unir, faire en sorte qu'il n'y ait plus de religion ou qu'il n'y en ait plus qu'une, ça me gène beaucoup, si j'ai bien compris. L'uniformisation je ne suis pas sur qu'elle soit bonne qu'au contraire on respecte ce que pense l'autre, c'est différent et qu'on fasse une union des gens, une association de gens qui pensent et qui ont des modèles de croyance différents, je ne parle pas de religion encore, mais qui ont des modèles différents. En plus je suis peut-être plus éclectique en disant que dans chaque pays il y a un modèle de se représenter, j'allais dire Dieu, d'autres façons, à partir du moment où l'on aura compris ça, à partir du moment où l'on aura compris qu'il y a des dieux qui ont des barbes et d'autres qui n'en ont pas, par exemple, à partir du moment où l'on aura compris que , bon etc. etc., à partir du moment où on saura qu'il y a une différence on acceptera beaucoup mieux les autres plutôt que de penser comme je le dis toujours, comme pendant la révolution, je ne veux voir plus qu'une tête , la mienne.

Animateur - Alors c'est intéressant aussi de se poser la question de la religion unique parce que ce qui sous-tend le fait de rassembler les différents individus sous une même valeur, on parle de la laïcité mais on parle aussi de ce qui pourrait nous amener à nous retrouver et c'est ça aussi le projet de société. On a parlé de contrat comme Jean Jacques Rousseau nous le rappeler, le contrat social. Qu'est-ce qui nous lie en tant qu'individu à une entité collective à laquelle on adhère et ces valeurs qui nous unissent, justement il faut faire attention à ce que ça ne devienne pas une religion unique puisque sinon on tarit la source de la diversité.

22 - Je voulais faire une remarque et en même temps poser une question sous le contrôle de tous. On parle de laïcité, je ne crois pas que la laïcité soit majoritaire dans le monde et en tout cas elle ne l'est pas en Europe. Quand tout à l'heure on disait que la religion pouvait avoir une incidence sur la forme de la laïcité, moi je connais deux pays en Europe qui sont laïcs, la France et la Turquie. Je crois effectivement que la laïcité n'a pas le même goût en France et en Turquie, à cause des origines religieuses de l'histoire religieuse du pays.

Animateur - Jusqu'à preuve du contraire la Turquie n'est pas encore dans l'union européenne, mais on va dire que physiquement parlant elle est dans l'Europe. Mais il y a un autre pays qui est en Europe et qui est aussi laïc c'est le Portugal. Mais effectivement on sent bien que la laïcité à la Française est différente de la laïcité d'Atatürk qui l'a mise en place en Turquie et aussi la laïcité au Portugal. Mais c'est parce que il y a une histoire derrière tout ça.

22bis - Question subsidiaire, on, parle de spiritualité laïque, quelle est la spiritualité des pays qui ne sont pas laïcs. Dans le projet commun collectif de l'Allemagne, de l'Angleterre, de la Grèce, des pays qui ne sont pas laïcs, autour de quelle valeur spirituelle ils arrivent à faire évoluer leur société.

Animateur - Dans la notion spirituelle il y a tout de même une liberté de conscience qui est assez antinomique avec une religion qui impose aux individus. Quand un état possède une religion d'état on peut quand même dire qu'il y a une spiritualité un peu moins étayée.

23 - Je ne comprends pas bien parce qu'en fait j'ai l'impression qu'on fait un amalgame, alors est-ce que je me trompe, j'ai l'impression qu'on fait un amalgame entre spiritualité et religion. Ce n'est pas du tout la même chose. J'ai envie d'être un peu provocante en disant on peut parler de spiritualité, j'ai l'impression que c'est dans l'air du temps actuellement, on parle de spiritualité à toutes les sauces, on parle de spiritualité marchande, spiritualité zen, on peut mettre la sagesse à toutes les sauces. Mais ce n'est pas la même chose qu'ici on a un débat, on associe le mot spiritualité à laïc, on peut associer spiritualité à toutes les sauces en ce moment, mais ce n'est pas la même chose que la religion. J'ai l'impression que le débat, c'est intéressant, mais c'est ce n'est pas la même chose.

Animateur - C'est intéressant on peut s'interroger, mais en même temps est-ce qu'il n'y a pas un sentiment religieux qui même en delà de l'église, de l'institution religieuse, est-ce qu'il n'y a pas non plus dans la spiritualité un sentiment religieux, au sens premier, c'est-à-dire une volonté de dépasser notre propre individualité.

24 - Ce que je pense c'est qu'il ne faut pas renier ses racines, quelles qu'elles soient, qu'elles soient philosophiques c'est-à-dire qu'elles remontent à l'antiquité grecques, qu'elles remontent aux religions il faut prendre ce qui est bon, ce qui est bon pour l'humanité dans toutes ses racines pour effectivement aller de l'avant et donner un sens à l'humanité actuelle. Ça, ça demande effectivement un dialogue entre les religions, les laïcs et tous les autres, ce n'est pas dans la confrontation que l'on arrivera à trouver une voix, une issue intéressante pour l'humanité, je pense.

Animateur - Ce qui me semble intéressant dans votre intervention est qu'on s'interroge sur la méthode qui nous permette d'arriver à déterminer ce qui est bon pour l'humanité. Ceci dit il serait intéressant de se pencher sur comment faire en sorte de ne pas retomber, comment dire, dans des schémas dictatoriaux et donc que finalement des personnes qui veulent imposer le bien à l'humanité le fassent de façon contrainte, amènent des contraintes et contraignent les autres ? Pour vous qu'est-ce qui vous amènerez à penser notre propre collectivité ?

25 - Je ne vais poursuivre sur ce que tu viens de dire, mais en écoutant le débat et en me repositionnant sur le sujet je me dis que quelque part la laïcité, pour moi, ce sont des faits, des actes, un peu comme un règlement, une loi qu'on nous propose. On tolère des différentes manières de penser, de croire en quelque chose de supérieur, on tolère toutes les manières de faire et derrière la spiritualité c'est qu'il faut travailler autour de son opinion et de ses sentiments avec ça. C'est-à-dire qu'en fait on a le droit d'avoir chacune ses opinions, chacun ses sentiments mais avec cette règle de la tolérance. C'est peut-être ça la différence avec le phénomène religieux, ou une religion donnée, où effectivement on va au temple et la règle est toute autre, on va prier, pourquoi ça dépend, dans les religions monothéistes pour l'au-delà, pour l'après. On apprend aussi des règles de comportement en société, mais il y a tout un rite. La laïcité, pour moi, à part le fait de dire quand je pense, j'agis avec l'idée que je tolère mon prochain, mon voisin quel qu'il soit, je dirais que c'est ça la spiritualité laïque. Ets-vous d'accord ?

Animateur - C'est vrai qu'on a très peu parlé de la différence, enfin les deux plans, le temporel et le spirituel et qu'aujourd'hui dans les religions c'était bien distinct, on va dans un lieu, d'ailleurs c'est sacré, donc c'est en dehors de la société civile ? Mais alors où peut-on la sentir, si elle existe cette spiritualité laïque ?

26 - Je veux revenir, ce n'est pas seulement la tolérance, si on parle d'amour ce n'est pas seulement la tolérance, c'est tout à fait différent.

27 - Je me disais, quelque part, ce qu'on appelle les valeurs laïques ne sont pas venues comme ça de rien. On s'appuie sur des traditions qui nous viennent de la religion, du passé judéo-chrétien. Il me semble qu'il y a des valeurs communes dans toutes les religions, les philosophies sérieuses, grecques, les religions, évidemment il faut faire le tri. Mais dans tout il y le fond sérieux que l'humanité a produit au niveau de la pensée on retrouve toujours les valeurs de base. Il me semble que même quand on passe au plan de la laïcité, ce qui va unir l'humanité dans son ensemble, on retrouve toujours ces mêmes valeurs sérieuses. Alors après, comment les établir ces valeurs, puisqu'on disait on ne va pas dicter, bon c'est quand même une question de bon sens, ce sont des valeurs qui vont vers le bonheur de l'humanité, d'une identification des uns aux autres, c'est fondé sur le raisonnement, ce n'est pas un amour d'état, c'est un amour qui est fondé sur le raisonnement, qui est appuyé sur une prise de conscience de l'identité de l'autre et de moi, on est tous dans le même bateau on est tous destinés au même destin humain très difficile et très fragile. Il faut être solidaire, c'est quelque chose de rationnel et ça on le partage à mon avis avec le meilleur des grandes religions.

Animateur - Alors vous nous le rappeler, et même d'ailleurs les petites ont des questionnements qui sont communs et que finalement, et on pourrait s'interroger notamment en analysant la période humaniste qui est importante en Europe au 17°siècle, c'était intense, et on sentait qu'il y avait une recherche commune et puis de savoir ce qui nous faisait homme. Peut-être qu'aujourd'hui ces questions reviennent à la mode comme on l'a dit parce que peut-être il y a des dangers qui arrivent, peut-être ce qui est en danger c'est l'humanité. Alors peut-être que ça revient parce qu'on sent qu'il y a un danger qui arrive, on est très catastrophique sur ces choses là mais le réchauffement climatique, les dangers qu'encourent l'humanité face à ce qu'elle génère sur la planète, peut-être que c'est aussi ça qui réveille un peu notre volonté de se questionner sur la question existentielle. Alors la spiritualité laïque, comment on peut la sentir et la voir se pratiquer

28 - Je me demande justement si dans notre pays la spiritualité laïque ce n'est pas fondée sur trois mots qui sont la liberté l'égalité et la fraternité.

29 - Oui c'est vrai que c'est un triptyque important. Alors ce triptyque, après il y a le comportement de chacun parce qu'on a beau l'avoir sur le fronton des bâtiments publics, c'est peut-être des valeurs qu'on a écrites quelque part mais on ne l'a pas forcément gravé à tout moment dans la tête. je pense que dans la spiritualité dite laïque il y a la manière dont on partage ses opinions avec les autres, c'est un peu l'école du café citoyen, comment est-ce qu'on apprend à débattre ensemble et à pouvoir se mettre à la place de l'autre dans ses point de vue et je dirais, qu'il y ait cet échange , cette manière de pouvoir écouter l'autre, reformuler ce qu'il a dit, voir ce que nous on pense, éventuellement formuler son opinion et la faire reformuler à l'autre. Donc je dirais que c'est bouclé, si on a des opinions divergentes, c'est bouclé et de là faire sortir une idée plus commune, un point de vue un peu plus commun, je dirais quelque part tendre pas forcément vers une concorde universelle mais éviter de se confronter systématiquement en ayant un comportement qui psychologiquement ne nous enrichi pas. C'est ce que je vois à travers de la spiritualité laïque. Après on peut croire à n'importe quel dieu, ça ne me dérange pas.

Animateur - Vous nous parlez d'attitude et de comportement, c'est peut-être là l'une des clefs de la spiritualité laïque. Elle n'est peut-être pas forcément dans les prières, elle est dans l'action ou dans la pratique même au sein de la société et qui nous permet justement d'avoir une attitude de quête personnelle qui nous enrichisse tout en maintenant une tolérance mutuelle, ce n'est pas seulement une tolérance, elle est mutuelle, il faut que les autres nous tolèrent aussi. Alors on a rebondi sur le triptyque Liberté égalité fraternité, on pourrait s'interroger sur quelles sont les valeurs qui ont émergé à cette époque là pour qu'on arrive à déterminer ce qui a mis en place ses trois valeurs communes qui sont indissociables et qui en même temps ont fondé la république, fondé la France, refondé plutôt la France.

30 - Je vais revenir un peu sur terre car comme je l'ai dit la spiritualité laïque je ne sais pas trop ce que c'est. Je voudrais presque poser une question, sinon faire une constatation. Monsieur rappelait tout à l'heure avec raison que l'on est un des rares pays d'Europe officiellement laïcs avec la Turquie et vous avez ajouté le Portugal. Ça veut dire que les autres ne le sont pas, mais parmi ceux qui ne sont pas officiellement laïcs, il faudrait faire une distinction. Je connais assez bien la Belgique, je connais un peu moins bien l'Angleterre, la Grande Bretagne mais j'ai fréquenté les instances officielles de la Grande Bretagne pendant quelques années, ce sont effectivement des pays qui ne sont pas laïcs. Mais dans la vie quotidienne franchement je ne vois pas très bien la différence, sauf une c'est qu'on parle beaucoup moins de la laïcité que chez nous, parce que cela parait tellement naturel et peut-être moins hypocrite. Par exemple les conseils de district désignent officiellement un prêtre, enfin un religieux qui devient le religieux de la paroisse, il assiste à la séance du conseil. En France on ne voit pas les curés assister aux conseils municipaux mais on ne peut pas dire qu'il y a antinomie, en ne se voit pas officiellement on se voit officieusement. Donc on parle chez nous sans arrêt de la laïcité alors qu'on en parle beaucoup moins dans les autres pays. Alors l'histoire, vous vous demandez pourquoi on en est là, c'est peut-être aussi parce que comme dans d'autres domaines on fait les choses à moitié. La loi de 1905 n'a jamais été appliquée intégralement, peut-être que c'est l'une des raisons pour laquelle aujourd'hui on se pose la question de savoir s'il faut la modifier ou pas. Dans l'une de ses décisions les bâtiments religieux ont été étatisés et mis à la disposition des églises moyennant une convention qui devait être signée entre les églises catholiques, protestantes judaïques etc. convention par laquelle les bâtiments étaient mis à leur disposition sous réserves qu'elles en assurent l'entretien. Les églises ont signé cette convention sauf l'église catholique qui a refusé. Après quelques années l'état a dit puisqu'elle n'entretient pas on va le faire. C'est pourquoi aujourd'hui les églises catholiques sont entretenues par les communes. Une autre décision interdisait aux collectivités publiques de financer de nouvelles constructions. Au début des années 80 il y a eu le cas de la fameuse cathédrale d'Évry qui a été financée au travers d'artifices juridiques. Officiellement la cathédrale a été construite par une association culturelle qui loue ses locaux à une association cultuelle. Toutes ces choses là si les évoque c'est que peut-être c'est ce qui entretient cette interrogation entre le laïc théorique et le laïc vécu. Je l'ai dit tout à l'heure, les dernières déclarations du Président Sarkozy c'est un peu jeter de l'huile sur un feu qui n'est pas complètement éteint.

Animateur - Alors justement pour revenir à ces deux dernières interventions du Président de la République, est-ce que vous avez le sentiment que la laïcité est en danger, en quoi, on est à un quart de la fin du débat et je relance un autre débat, ceci dit on pourra toujours refaire un autre débat, c'est tous les quinze jours ici. Mais voilà, est-ce que vous avez le sentiment est en quoi elle serait en danger, est-ce qu'il ne faudrait pas revisiter cette notion à l'aube de ce nouveau millénaire et Malraux ne nous avait pas dit le 21° siècle sera spirituel ou ne sera pas. En tout cas voilà qu'est-ce que vous pensez de la laïcité aujourd'hui en France, est-elle malmenée ou faut-il la revisiter.

31 - Moi je pense que la laïcité serait en danger si c'était vraiment un dogme, mais ce n'est pas un dogme. La laïcité effectivement ce n'est pas une doctrine parce que je trouve qu'on a parlé de la spiritualité laïque et finalement j'aurais préféré qu'on parle finalement que de la spiritualité parce que comme a dit madame c'était intéressant elle a dit, elle a parlé finalement du mariage de l'âme et de la raison. Un homme qui a de la spiritualité c'est un homme qui sait marier intimement en lui l'âme et la raison. L'âme c'est quelque chose qui est propre, c'est le sentiment humain, ça ne s'apprend pas à l'école, la raison on peut l'apprendre à l'école, mais l'âme c'est un peu différent, c'est quelque chose de plus profond. Alors je pense que si on veut effectivement parler de spiritualité laïque, ça veut dire que pratiquement on va enseigner la spiritualité et on va dire aux gens voilà comment il faut avoir une spiritualité. Je pense que c'est un peu dangereux dans un certain sens, laissons à l'individu avec toute sa capacité d'élever son esprit et à condition effectivement qu'il ait quand même la connaissance, la connaissance c'est important.

Animateur - Je pose simplement cette question, comment on fait pour entretenir cet esprit laïc. Effectivement il serait dangereux de l'enseigner de manière dogmatique ou doctorale, mais comment fait-on pratiquement pour faire en sorte que cet esprit reste.

32 - J'ai entendu à la radio que l'archevêque de Canterburry très récemment avait proposé d'appliquer la charria aux musulmans anglais. Alors voilà un bel exemple de mise en danger de la laïcité anglaise, c'est énorme non ? Don c là on voit que la laïcité a quelque chose à voir avec les lois qui sont les même pour tout le monde etc., etc.

33 - Il me vient quelque chose quand même à propos de ce que vous disiez monsieur sur la raison, n'est-ce pas qui inspirerez largement la spiritualité. Mais il y a le cœur aussi, le cœur de l'homme si on peut définir ce que c'est, déjà c'est beaucoup, c'est quand même, il y a une chose qui n'a pas été prononcée, que les religions, certaines, beaucoup, enseignent l'amour du prochain. Ça n'a pas été évoqué mais ça pourrait quand même intervenir comme modèle de certaines religions qui quand même nous appartiennent dans le patrimoine. C'est tout, je ne veux pas en dire plus.

34 - La question était posée tout à l'heure de savoir si la laïcité est en danger. Justement si on dit la spiritualité de la laïcité, ses fondements spirituels sont la liberté, l'égalité, la fraternité, la question est, est-ce que la liberté est en danger, l'égalité est en danger, est-ce que la fraternité est en danger.

Animateur - Effectivement on a le soin de savoir, de décortiquer ce qui sous-tend cette notion de laïcité et non pas partir dans tous les sens en criant que la laïcité est en danger. Il y une méthode, en quoi la laïcité est vraiment en danger.

35 - Effectivement c'est exactement ça, savoir si ces trois choses là sont en danger. Et par rapport à ce que disait madame, c'est vrai, elle est en danger qu'on on n'applique les lois qui sont communes à tous, dans le respect de l'identité de la religion et de l'identité de chacun et que ce soit la même pour tous. Je suis désolée, mais moi je trouve qu'elle est en danger actuellement, et c'est d'autant plus dommageable que c'est un président de la république, qui compare les qualités d'un ecclésiastique et d'un enseignant, c'est quand même monstrueux, c'est quelque chose de grave au niveau de la laïcité. Je me demande où on va, pour moi elle est en danger, il faut être vigilant.

36 - Je rejoins madame et monsieur sur le fait que la laïcité peut être en danger. Effectivement on voit quelles dérives peuvent avoir comme conséquence, le fait que le pouvoir religieux peut prendre le pas, dans les discours aux Etats-Unis on voit etc. je suis d'accord par rapport à notre président il y a des choses, le pouvoir religieux et le pouvoir étatique sont indifférenciés. Ceci dit pour moi liberté égalité fraternité sont des valeurs fondamentales de notre pays, mais pour moi ce n'est pas une spiritualité laïque, pour moi c'est être citoyen. Moi aujourd'hui je suis citoyenne et je veux tendre vers ces valeurs et je veux les mettre en application dans ma vie, mais pour moi ce n'est pas la spiritualité qui est quelque chose de beaucoup plus intime de beaucoup personnelle.

Animateur - On revient à la notion même de citoyen qui finalement est plutôt bien pour un café citoyen de revenir à ce qui fonde ce qui fait un citoyen.

37 - Je vais peut-être faire sourire les personnes ici. On a parlé de liberté d'égalité et de fraternité, c'est vrai que pour moi c'est une citoyenneté. Mais il n'y a pas si longtemps de ça, j'ai vu sur les pièces quand j'étais enfant, il y avait travail, famille, patrie. Quand je pense à travail pour moi c'est une forme de spiritualité, j'entends quand c'est un travail noble. Je vais donner un exemple, le bois, la sculpture, je ne suis pas sculpteur mais. La famille aussi pour moi est une forme de spiritualité, on peut la vivre ensemble avec ses enfants. Je crois que c'est ça en fait pour moi. La patrie, ben, chacun trouve sa spiritualité et puis ça peut faire grandir, moi personnellement la spiritualité c'est un travail intérieur, personnel, je ne vais chercher ce voir le voisin comment il est, c'est assez personnel et avec ça je suis en accord ou en désaccord et j'essaie d'être en application avec ce que je pense. C'est quelque chose de très difficile, et en même temps la patrie tout le monde en profite, si je suis bien avec les autres je pense que je suis dans une certaine forme de spiritualité.

Animateur - On voit qu'il y a une recherche de faire en sorte que justement on se rapproche, en tout cas que notre pratique soit attentive aux lois qui sont censées être pour le bine commun et donc on s'interroge sur la citoyenneté et finalement cette notion de citoyenne n'est pas si éloignée de l'interrogation sur notre propre action dans la société et note propre recherche.

38 - Je rebondis sur la réflexion qui a été faite incidemment au cours du débat à propos d'athéisme. Ce n'est pas rejeter Dieu mais dire que le centre de l'existence c'est l'homme. On peut poser la question, qu'est-ce que c'est que Dieu d'abord et après qu'est-ce que c'est que l'homme. On en sait plus sur l'homme qu'on en sait sur Dieu. Alors le débat est nécessairement relancé. On est arrivé à la question de la citoyenneté, alors il y a quelqu'un qui aurait bien voulu venir ici mais qui n'a pas pu le faire, qui m'a confié quelques lignes, c'est un certain André Nataf qui a écrit un livre sur la libre pensée, justement il met en relation la citoyenneté et cette question de la spiritualité : « La laïcité n'est ni une inféodation de l'église à l'état comme le voudraient certains laïcistes, ni un partage de pouvoir entre différentes confessions comme d'autres le voudraient, mais l'émergence d'un espace neutre de religiosité où l'individu peut s'il fait l'effort indispensable devenir un citoyen » Et puis un peu plus loin »la spiritualité, la convivialité citoyenne n'existe dans les esprits et dans les faits que tant que le combat existe, le problème est que l'action laïque s'est figée sur le seul combat contre l'église et qu'elle n'a su découvrir son champs réel »Merci André

Animateur - On voit que c'est intimement lié à la question de la citoyenneté cette recherche de la laïcité. D'ailleurs quand on regarde la révolution française, il y avait aussi des fêtes religieuses, révolutionnaires qui mêlaient la citoyenneté à la spiritualité, la fête de la fédération c'était un, peu ça quand même. On va prendre les dernières interventions.

39 - Je voulais juste dire par rapport à ça qu'il ne faut pas oublier que la révolution, c'est peut-être aussi pour ça qu'on est un des rares états laïcs, les plus revendicatifs sur cette question là, c'est que la France avant la révolution était la fille ainée de l'église, c'est effectivement en réaction à cette emprise d'un pouvoir religieux particulier que la laïcité a été particulièrement développée chez nous. Quand on parlait tout à l'heure de liberté, d'égalité et de fraternité, je voudrais ajouter que c'est aussi naturellement dans la laïcité la liberté de croire ou de ne pas croire, l'égalité des croyances et la fraternité entre toutes ou aucune.

40 - C'est très difficile de se débarrasser comme ça des croyances parce quand on voit, je ne sais si vous vous rappelez la première république a voulu intégrer le clergé dans la laïcité, il y a eu la constituions civile du clergé, c'est assez curieux quand même. A une époque Constantin, c'est lui qui a laïcisé l'église puisqu'il l'a intégrée dans l'empire romain en lui donnant la primauté. C'est pour ça qu'en général beaucoup essaient de s'accaparer les religions, mais il est évident que ça n'a pas toujours réussi. Alors moi ce que je voudrais dire simplement, c'est que quand même il y a des réminiscences, il y a des racines et on ne peut pas y échapper, la preuve quand on a voulu supprimer le lundi de Pentecôtes cela a été un véritable tollé et il n'y pas que les chrétiens qui ont réagi. Il n'y a pas que les curés qui ont réagi, au contraire j'ai entendu certains curés qui ont dit ca ne nous gène pas, le lundi de pentecôtes n'est pas une fête chrétienne. Par contre on a vu des choses quand même assez curieuses en parlant de ces racines, on a vu le baptême civil, on a voulu laïciser le baptême, on a eu le mariage civil, ca a été la laïcisation du sacrement du mariage, les obsèques civiles c'est pareil. Quand on voit toutes les fêtes religieuse qui sont maintenues on se dit quand même bon malgré tout il y a quand même des racines. Alors il ne faut pas jeter comme on dit le bébé avec l'eau du bain.

Animateur - d'autant que ces racines, ne sont pas uniquement chrétiennes, elles sont plus lointaines que ça druidiques, celtiques.

41 - C'est peut-être un peu gênant de dire cela juste à la fin d'un débat, mais je crois qu'il faudrait revoir l'histoire dans sa réalité. Juridiquement l'église n'avait pas de pouvoir, elle avait un pouvoir de fait parce qu'elle était responsable de l'éducation, responsable des soins, du social. Donc elle était dans l'état mais il n'y avait pas, non dans la constitution qui n'existait pas, mais dans les usages jusqu'à la révolution, l'église n'avait pas de pouvoir en tant qu'institution. Alors ce qui a été fait pendant la révolution, ce qui a été fait plus tard pour casser cette présence, on a voulu les exclure de l'enseignement mais on n'a pas mis en place un enseignement correspondant pour le remplacer, donc les religieux sont restés jusqu'en 1905. La loi Guizot et plus tard la loi Duruy, la loi Guizot sous Louis Philippe, la loi Duruy sous Napoléon III, qui obligeait les communes à mettre en place des écoles primaires, Guizot pour les garçons, Duruy a ajouté pour les filles. Ces lois n'ont jamais été respectées intégralement, c'était insuffisant donc les gens ont continué à se retourner vers l'Église. On a voulu se débarrasser de l'église mais en s'y prenant d'une façon qui n'était pas la bonne, pour vraiment s'en débarrasser il aurait fallu mettre en place les services qu'elle assurait. Jusque dans les années 50 il y avait encore dans les hôpitaux publics, en tout cas là où j'habitais à Roubaix, en majorité c'étaient des religieuses qui étaient infirmières ou responsables. La encore c'était une descendance d'habitudes historiques mais l'état s'y est mal pris pour s'en débarrasser. Mais dire que l'église avait un pouvoir dans la direction de l'état, juridiquement ça n'est pas vrai.

Animateur - Effectivement un pouvoir tel qu'on l'imagine aujourd'hui, c'est-à-dire institué avec des codes etc., ceci dit le roi c'était quand même le représentant de Dieu sur terre, et le roi c'était l'état, il y avait les sujets et le roi c'était l'état. Ceci dit c'est intéressant ce que vous dites, par exemple tout ne s'est pas fait en même temps, qu'on n'a mis en place une école digne de ce nom pour instaurer véritablement la laïcité suite à la révolution, mais on peut dire que finalement on ne peut pas tout mettre en place quand on révolutionne un système, c'est énorme comme travail.

42 - Très court parce que je ne voudrais pas qu'on confonde quand on dit qu'on a besoin de racine et pas forcément de religion, c'est ce que je voulais dire, parce qu'on peut avoir depuis des générations des familles où la religion n'a jamais été le centre moteur et cela n'empêche que les enfants, les petits enfants et les autres vont apprendre les valeurs laïques de liberté égalité fraternité. On ne peut pas dire que ce soit, je ne veux pas dire racine, mais leur éducation religieuse qui influe dans ce sens, et ils ont une spiritualité, c'est totalement différent mais ce n'est pas lié à des racines religieuses.

Animateur - On va clore le débat d'aujourd'hui, rappelons tout simplement que si on a découvert des choses aujourd'hui c'est surtout par notre pratique, par notre écoute et peut-être que c'est aussi la première étape pour pouvoir arriver à s'entendre, c'est arriver à s'écouter avant tout et s'il y a quelque chose à préserver c'est justement ça.
Pour ceux qui ne connaissent pas vous pouvez proposer un ou plusieurs sujets et ensuite nous voterons démocratiquement.

1 - Qu'attendons-nous aujourd'hui de l'action de nos politiques ? 8 voix
2 - Le maire peut-il répondre encore aux besoins de ses concitoyens ? 5 voix
3 - La langue française est-elle en danger ? 15 voix
4 - Avons-nous peur de l'avenir ? 5 voix
5 - La laïcité est-elle en danger ? 12 voix
6 - Éduquer mieux mais comment ? 3 voix
7 - L'immigration est-elle une richesse ? 11 voix
8 - Comment le consommateur peut-il agir sur le pouvoir d'achat ? 7 voix
9 - Est-il souhaitable d'abolir les frontières ? 8 voix
10 - Est-il souhaitable de réformer le système électoral ? 5 voix
11 - Comment le citoyen peut-il contrôler l'impôt ? 3 voix
12 - La Chine s'est-elle déjà réveillée ? 9 voix

PROCHAIN DÉBAT SAMEDI 23 FÉVRIER 15 HEURES : La langue française est-elle en danger ?

Interventions

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Jacques

mercredi 16 janvier 2013 17:03:47 +00:00

Moi qui ai bien connu Jésus et même les dinosaures, je puis vous dire que NUMERO-UN ne comprends rien à rien : le but de la question posée à Jésus était de le faire tomber, soit pour intelligence avec l'ennemie romain, soit pour provocation à la rebellion fiscale ; Jésus qui n'était pas sot, réussissait à traiter son tombeur de collabo...sans le dire ouvertement...tout en le disant...sans allumer le moulin à paroles !...
Maintenant, la grande tradition juive était que prêtres et docteurs de la Loi se mêlent de tout. Extérieur au clergé comme au tribunal talmudique, il semontrait volontiers anti-clérical...ou très-très modérément clérical.
Maintenant, le peuple hébreux se débrouillait guère mieux que les autres : même si sa loi fondamentale interdisait de tuer, lui était toujours en guerre !?!
Pour moi, il fallait laisser Jésus à son temps :l'actuelle séparation de l'EGLISE et de l'ETAT, ce releverait plutôt de la nécessité de distinguer ce qui relève de la bonne gouvernance de ce qui relève du rêve, de la démence, en sachant qu'on ne saurait être clair totalement : les ultra-rationnalistes sont irrationnels, dans leur genre à eux, exactement comme les autres.
Si les juges sont trois et les députés trois cent, c'est précisément pour n'avoir pas à aller fouiller les sub-conscients : faire se neutraliser les dingueries était la seule chose à laquelle on pouvait raisonnablement aspirer.
Si vous-même étiez parfait, sans doute seriez-vous parti pour le désert depuis longtemps ; le temps viendra où tout le monde reconnaîtra vos mérites, cependant...mais fallait mourir d'abord.

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Jacques

jeudi 17 janvier 2013 13:31:29 +00:00

Pour moi, la laïcité, en 2013, ç'est offrir un lieu de réunion dans chaque village, dans chaque quartier, aux gens désargentés ou un peu pingres : c'est une baraque avec quatre murs, une table, un toit, un poêle, cent chaises et de la lumière toute la nuit ; on pouvait fair le bruit qu'on veut : c'est un droit si merveilleux, que le droit de se réunir pour causer au chaud, qu'on l'a baptisé "liberté".
Maintenant, payer une salle de réunion spécifique à chaque professionnel de chaque culte enregistré, pour refuser au simple citoyen le droit de se réunir, c'était vraiment vider de son contenu la lettre du droit de réunion : à défaut de pouvoir vider l'esprit d'une loi, en violait-on sans vergogne la lettre...toutes écuries électorales confondues.

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