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Honoré de Balzac (1799 - 1850)

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Compte-rendu analytique par Jean-Marie SeeuwsCafé Citoyen de Caen (24/05/2008)

Animateur du débat : Boris Vaisman

» Politique et Société

Comment expliquer le phénomène « Bienvenue chez les Ch'tis ? »

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Animateur - Nous allons aujourd’hui de ce phénomène, car il faut bien appeler les choses comme cela, le phénomène du film « Bienvenue chez les ch’tis »un phénomène de société étonnant pour le moins puisqu’il va bientôt être le film, c’est même peut-être déjà fait aujourd’hui, le film qui dans l’histoire du cinéma aura fait le plus grand nombre d’entrées. Ce film est devenu un phénomène de société vous avez posé le thème comme ça. C’est vous madame qui avez proposé le thème, je vous donne la parole.

1 - Je ne m’explique pas pourquoi alors que d’autres thèmes intéressants étaient proposés, j’ai pensé à Dany Boon et à son film dont on n’arrête pas de parler et que ce thème a été choisi. Ce film est sorti le 27 Février dernier. Ce film que je n’avais pourtant pas vu et que je ne souhaitais pas voir, le sujet ne m’inspirait pas du tout, trop de tapage autour, je n’avais pas envie d’aller le voir malgré son succès phénoménal depuis sa sortie jusqu’à ce jour. Et ce n’est pas terminé puisque tout le monde sait qu’il est demandé partout dans le monde pour en faire un remake. Alors comment expliquer ce succès phénoménal. Ma famille du coté maternel est originaire du nord de la France, Lille et sa banlieue pour être plus précise. Ils n’ont jamais entendu ni parlé eux-mêmes le Ch’tis et ne sont pas très fiers d’être Ch’tis vus par Dany Boon, ils ne sont pas les seuls. Comme mon thème a été voté à l’unanimité, je me suis sentie dans l’obligation d’aller voir le film, à contre cœur, et de faire un micro trottoir sans micro, dans un café et dans les rues de Caen, avec un petit carnet. La première fois j’ai interrogé sept personnes, et jour-là, surprise, personne n’avait vu le film, ni souhaité le voir. La seconde fois les avis étaient partagés, j’ai noté quelques réflexions : »C’est un bon divertissement qui ne méritait pas un tel succès »- « J’ai passé de bons moments mais loin d’être excellent et comparable avec la grande vadrouille »- Ou « bof ! no comment-« « Malgré de bonnes intentions on se moque visiblement des gens du Nord, mais j’ai bien aimé quand même »- « Sorti de la séance je n’arrêtais pas entendre : hé Biloute ou Hein « ! J’ai posé entre autres cette question, quelle scène vous a particulièrement fait rire ou éclater de rire. Comme réponse j’avais des oh ! ou bah ! ah ! oui la scène où ils étaient tous les deux bourrés à vélo, ou la scène de la moto, ou la scène où ils faisaient pipi tous les deux. Bref ils ne savaient pas trop quoi répondre. J’ai aussi entendu, nous n’allons pas au cinéma, c’était un couple, nous n’allons jamais au cinéma, mais une partie de la famille qui habite le Nord a tellement insisté pour que nous fassions une exception, nous y sommes allés, nous avons passé un bon moment, sans plus. Ou autre réflexion, je vais le voir parce que je ne l’ai pas vu, ça m’a vraiment barbé, etc. etc. Donc je continue à m’interroger comme tant d’autres ceux qui n’ont pas aimé le film, sont traités de pisse-vinaigre, expression que je ne connaissais pas. J’ai rencontré des Th’tis qui ne sont pas fiers de ce film. J’ai entendu également que sous prétexte de rendre cette région sympathique, le film tombait dans les clichés dont ils sont déjà victimes. A ce jour malgré ce qui est dit et malgré les vingt millions d’entrées, le film de Dany Boon n’aurait toujours pas détrôné la grande vadrouille, je l’ai vu avec explication à la clef, il faudrait qu’il fasse trente et un millions d’entrées, il est sur la bonne voie certes, mais il n’a toujours pas détrôné la grande vadrouille et encore moins coulé le Titanic. Ce qui m’a le plus surprise, c’est que beaucoup, quand j’ai fait mon micro trottoir, beaucoup de personnes n’ont pas vu le film et ne souhaite pas le voir. Quelques unes m’ont quand même dit que quand sortirait le DVD ils l’achèteraient. Par contre d’autres l’ont vu quatre ou cinq fois, alors ça m’a sidérée. Je terminerai par ce que m’a dit une jeune fille, entre 20 et 25 ans qui était avec son petit copain dans un bistro : « je ne voulais pas aller voir ce film mais j’ai fini pas y aller un jour de désœuvrement et je n’ai pas aimé, personnellement je pense qu’il ne s’agit pas d’un film mais d’un téléfilm franchouillard ». Un mot qui est souvent revenu lorsque j’ai posé mes questions. Je ne sais pas, ajoute cette jeune, je n’ai aucune explication sur le succès de ce film, personnellement je l’ai trouvé chiant, j’a noté textuellement ce qu’elle m’a dit. Elle a terminé par peut-être que l’air du temps est à la sinistrose. Je terminerai par dire, je ne vois pas de différence entre le Nord, le Sud l’Est et l’Ouest de la France, je pense qu’il s’agit d’une question de personne. Dans le Nord, je connais un peu le Nord puisque ma mère, ma famille est là-bas. J’ai rencontré des gens très accueillants, très sympathiques, mais j’ai aussi rencontré des gens très antipathiques, voire même méchants. Ca c’est partout en France, dans n’importe quelle région. Je pense que c’est une question de comportement, de personne, c’est mon avis personnel. Je voulais aussi pour terminer parler de la grande vadrouille, du diner de cons, de madame Doubtfire, de toute l’équipe des gendarmes à Saint-Tropez, Bourvil , de Funès et du splendid de Balasko, Jugnot, Michel Blanc etc. qui ont en fait rire aux éclats plus d’un et ce à l’unanimité toutes générations confondues et on en redemande encore des années après. Les corons, une belle chanson de Pierre Bachelet, les mineurs de fond, de parler de terrils et aussi des autres, Coluche le Luron, de Fernand Raynaud, de jacqueline Mailland, de Fernandel etc. qui ne sont pourtant pas des gens de mon époque mais qui me font rire mais alors….

Animateur - Longue introduction qui reprends, alors ce qui est intéressant est que vous ayez fait un micro trottoir et vous êtes tombée sur des gens pour lesquels, si on extrapole votre statistique, on s’étonne, et vous-même vous vous étonnez pourquoi ce film a un tel succès, quelque soit d’ailleurs, et je pense qu’ici le but n’est pas de faire une critique positive ou négative du film, le fait qu’on ai ri ou pas, simplement d’expliquer le fait que si il y a quand même près de vingt millions d’entrées, après qu’il détrône ou non la grande vadrouille, n’est pas non plus le sujet à mon sens, mais de savoir pourquoi c’et devenu un tel phénomène médiatique, on entend des biloutes à cœur d’antenne à la radio, à la télévision, dans la rue, il y a plein de choses comme ça . Donc qu’est-ce qui fait que ce film, qu’on l’aime ou pas, soit devenu un tel phénomène de société, qu’autant de gens soient allés le voir. Manifestement il y a quand même un certain nombre de gens qui l’ont aimé, parce que jusqu’il y a très peu de temps à titre personnel, tous le gens autour de moi qui l’ont vu ont adoré. Là il se trouve un peu moins paradoxalement, peut-être aussi un effet masse qui fait qu’on commence à se lasser de tout.

2 - Un film, pour qu’il fonctionne, le marketing ne suffit pas. Il faut donc à mon point de vue qu’il y ait la rencontre entre un public et ce film. Manifestement je pense qu’il y a eu rencontre, à deux titres. Déjà une rencontre avec la région où ce film a été tourné, les images que j’en ai vu, même si elles sont partielle, les commentaires que j’ai pu entendre, même s’ils sont partiels, semblent vouloir démontré que l’accueil par la région a été très bon. Ceci a été confirmé par les plus de vingt millions de spectateurs et ce n’est pas fini. Alors, je ne suis pas critique de cinéma donc je ne discuterai pas sur la qualité du film, mais j’insiste sur le fait qu’un film ne peut fonctionner qu’à partir du moment où il correspond à une attente, qu’il y ait un public et qu’il y ait la rencontre du public avec ce film. C’est un premier point qui peut être établi. Alors maintenant on peut s’interroger sur les raisons qui ont fait que ce film a fonctionné. Je pense qu’il est arrivé à un moment optimum, autrement il n’aurait probablement pas fonctionné comme çà même avec le meilleur marketing du monde. C’est sur ces raisons qu’il nous faut nous interroger. J’émets quelques pistes, je peux parler de la région du Nord. Le Nord a été sinistré, toutes les unités d’extraction de minerai ou de traitement de minerai, puisqu’il y avait aussi la sidérurgie, ont été décimées. Le textile qui était aussi une activité importante dans la région a aussi pratiquement disparu du nord. Donc en fait sur le plan économique, une région dont les activités se recréent à nouveau, il y a une renaissance du nord aujourd’hui. C’est important parce que dans le fond on se dit qu’il faut que cela demeure. Donc par rapport à une sinistrose ambiante, et ça je vous rejoins ça fait partie, c’est un des aspects de ce climat économique ressenti sur le plan national, c’était aussi ce climat qui existait dans le Nord. Donc ça peut être une partie de l’explication. Ensuite il y a aussi le personnage, Dany Boon, indiscutablement bénéficie d’un à priori, d’un capital sympathie important. Je pense que c’est du à mon point de vue à son comportement, c'est-à-dire qu’à priori il ne me parait pas faire partie su star system, il est un petit peu en marge, c’est un humoristique, un humoristique jamais méchant, vous avez pu l’observer. Il y a aussi eu un postulat dans ce film qui est la rencontre d’un sudiste avec un nordiste, donc avec des différences culturelles importantes, donc avec aussi de la part du sudiste un à priori pas toujours très positif des gens du nord. Et puis dernier point je pense que ce film à ère préparé comme vous le faisait justement remarqué par un Jacques Brel, par les corons, par tout ça, une région qui bénéficie aussi d’une certaine sympathie.

Animateur - On commence à entrevoir quelques raisons. Alors le capital sympathie de l’acteur réalisateur Dany Boon, peut-être, la région aussi, le fait que cette région soit à la fois marquée économiquement et culturellement. Elle fait partie des grandes régions martyres françaises. Et puis vous avez dit aussi quelque chose d’intéressant, dans une époque de sinistrose c’est arrivé exactement comme il fallait, au bon moment. Alors c’est quoi le bon moment, est-ce que c’est vrai, est-ce qu’un an avant, ou un an après ce film serait peut-être passé inaperçu, ou ce film a t – il une réalité qualité intrinsèque qui fait que.

3 - Je voudrais éviter de trop revenir sur la première partie de votre intervention, c'est-à-dire est-ce que la raison de ce succès est due au marketing. Je pense en effet qu’il y a eu une très bonne opération marketing qui a été faite par Dany Boon et son équipe. D’abord et j’y vois un certain rapprochement. Quelques temps avant, deux ou trois ans, il a donné un spectacle à Lille, dans un grand théâtre de Lille, un spectacle qui s’appelait « A’s baraque en ch’tis". Il reprenait la plupart de ses sketches en patois, mais il commençait par un sketche et qui avait pour thème, sinon le désarroi, mais la perte de ses racines d’un gars du Nord exilé à Paris. On retrouve dans le film beaucoup de ses réparties essayées auparavant sur scène. Bien sur, vous avez raison de dire que le marketing ne suffit pas, mais à l’inverse on peut dire qu’un bon film (je ne dis pas que c’est un bon film) ne marche pas s’il y a un mauvais marketing. Ce marketing a consisté par des avant premières dans la région du Nord Pas de Calais, c’est quand même quatre millions et demi, quatre millions quatre cent mille habitants. Si on considère que le succès d’un film tient aussi en partie au bouche à oreille, c’est plus payant de faire ce type d’opération dans le Nord qu’en Lozère. La sympathie du personnage, vous avez raison, a joué. Et puis, j’en fais partie, je ne dirais pas expatrié du Nord, mais ayant quitté le Nord il y a maintenant pas mal d’années, mais me considérant toujours comme quelqu’un du Nord, (je n’ai jamais pu parler patois, mes parents me l’interdisait, chez nous on ne parlait pas le patois mais c’est ne n’est pas vraiment le problème), j’ai été voir le film dès qu’il est sorti à Caen. Je pensais retrouver autre chose que ce que j’ai vu, j’espérais retrouver des scènes, beaucoup plus marquées que celles qu’on voit, de la description du tempérament des gens du Nord. J’ai peut-être le tort de penser que les gens du Nord sont toujours ceux que j’ai connus. Ceux que j’ai connus, étant célibataire, étant plus jeune, et donc il y a quarante ans. J’ai la faiblesse de penser, c’est vrai que madame a dit qu’in n’y avait pas forcément 100% de caractère typique d’un individu dans une région donnée, mais il y a quand même un fond qui existe, un fond qui subsiste et la chaleur des gens du Nord je pense qu’elle existe encore. Peut-être qu’elle va disparaitre parce que la vie courante, la vie moderne fait que ces choses disparaissent, mais il y a une chaleur dans le Nord qui persiste. Je pensais que le film allait plus insister là-dessus. On voit des scènes qui sont quand même malgré tout le fond du film, mais peut-être gâchées par d’autres scènes disons plus triviales. Alors puisque le thème est d’essayer d’expliquer le phénomène de ce succès, je pense qu’avec la même opération marketing dans une autre circonstance, ce film aurait peut-être moins bien marché, mais ce n’est pas facile d’expliquer un succès. Pourquoi la grande vadrouille a fait 17 millions d’entrées il y a quarante ans, ce n’est pas facile à dire. Je pense néanmoins et pour conclure qu’ici le succès est du en bonne partie à une opération marketing bien faite et originale. La région du Nord a investi 600000 euros pour faire venir à Paris par un train spécial des tas de gens connus qui se sont répartis dans une centaine de salles de la région du Nord pas de calais, tout ça est bien un effet d’entrainement. Il y a des chiffres spectaculaires, Boulogne sur Mer, 45000 habitants, 48000 entrées. Et puis ensuite probablement ces gens du Nord répartis un peu partout en France ont été incités à voir ce film en espérant retrouver une partie de leur racine. Déçus ou pas, ce n’est pas le problème, mais en tout cas cela fait des entrées et ces entrées font boule de neige.

Animateur - Un argument classique effectivement, une bonne campagne marketing favorise ce genre de phénomène, je tiens quand même à signaler que dans le même temps, à peu près huit jours avant était sorti un film qui a eu un succès très mitigé, c’est Astérix aux jeux olympiques, qui a eu une campagne marketing dantesque, alors c’est vrai pas du même genre. Alors le marketing est peut-être une explication, il y en a surement d’autres à mon avis peut-être plus profondes qui fait quand même qu’au-delà de ce qu’on peut dire, au-delà des faits, de ce qu’on voit dans le film, c’est quand même un film qui a rencontré son public, vingt millions d’entrées on peut raisonnablement considérer, on peut dire ça sans se tromper, il a rencontré son public. Pourquoi a-t-il rencontré un public au-delà d’une consistance qui au moins à vous semble très modeste, voire vous avez dit certaines scènes triviales un peu inutiles etc.

4 - Je pense qu’on ne peut pas nier l’effet marketing, enfin je ne dirai pas marketing, je dirai simplement qu’au départ, il y a eu une mobilisation dans le Nord, des gens l’ont vu quatre ou cinq fois. Je crois que les médias, comme d’habitude, ont pris le train en marche. Au départ les médias n’étaient pas tellement attachés à ce film quand il est sorti, quand ils ont vu le succès, le succès va au succès, tout d’un coup ça fait boule de neige et les médias s’y sont mis et alors ça a eu un effet multiplicateur, donc ça a joué dans un certain sens. Mais il faut revenir peut-être au fond et se demander pourquoi ça. Bon, moi je pense qu’il y a chez le français cet esprit provincial, c'est-à-dire que se sent tous provincial et à travers ce film, parce que le français est un peu dépaysé. Moi par exemple je suis du sud-ouest, je vis en Normandie depuis quarante ans, et c’est vrai que l’on a l’esprit provincial. Je dis ce n’est pas si mal que ça la province, qu’on soit ici ou dans le Nord ou ailleurs, on se dit c’est pas mal, on y vit bien quand même du moment qu’on sait vivre avec les autres. Je crois que c’est ça qui est important. D’autre part c’est vrai qu’on a entendu des mots, franchouillard, ringard etc. mais finalement il y a peut-être une réaction de la province contre l’élite parisienne dans ce film. Je crois que les gens se sentent très provinciaux et se disent qu’après tout Paris ce n’est pas le centre du monde, la province c’est important. Et alors parlons-en aussi, on a parlé du Nord, dans le Nord il y avait ce qu’on appelait les valeurs traditionnelles des mineurs, des corons, des gens du peuple qui fêtaient l’amitié, la solidarité, des principes vraiment mis en valeur. Peut-être que dans un monde difficile où l’on vit égoïstement et en individualiste, ça remue un peu les sentiments même si on se laisse emporté par, disons, le courant actuel, il y a des moments où l’on se dit ce n’est pas si mal que ça quand même l’amitié, la solidarité, même si quelquefois dans le film il y a quelques excès, mais ça c’est peut-être un peu forcé, c’est peut-être pour frapper un peu le spectateur. Et puis alors je dirais que dans ce film il y a aussi une anti dote contre les préjugés, et ça c’est important. Je ne sais si vous avez vu le film, moi je l’ai vu, j’y suis allé peut-être dans les derniers mais je l’ai vu, je ne suis pas le dernier, mais je croyais être le dernier. J’ai trouvé qu’il y avait, au départ on montre les préjugés, le père du gars qui dit : « le Nord quelle horreur !, il pleut, il fait froid, moins 40° », c’est l’exagération méridionale mais c’est vrai que c’était amusant et à la fois c’était vraiment un témoignage de cet esprit de préjugé qu’il faut abattre et dans ce film je crois qu’on voulait abattre ces préjugés.

Animateur - Là on entre un peu dans le fond du débat, on va au-delà des raisons marketing et financières, des raisons un peu plus consubstantielles au film. Le fait que des gens, je résume rapidement, ont quand même un esprit provincial, voire un peu anti parisien, parce que ça fait du bien de temps en temps que ce ne soit pas Paris, je reformule, qui nous montre un tas de choses, donc que la province puisse s’affirmer. Et puis le fait que, donc provincial c’est un mot important parce que c’est régional, voire régionaliste qui peut s’opposer à d’autres grandes tendances actuelles, et puis cette idée que c’est un film plein de bons sentiments et qu’on en a besoin. Donc peut-être pour rejoindre ce que disais monsieur, dans une période de sinistrose, peut-être est-il arrivé aussi au bon moment.

5 - Quelques idées en vrac et peut-être une piste à l’issue. D’abord je voudrais revenir sur l’aspect phénoménal du film puisque la question est formulée ainsi, comment expliquer le phénomène de bienvenue chez les ch’tis. Déjà il faut prendre en considération que les circuits de distribution aujourd’hui et ceux d’il y a quarante ans ne sont pas les mêmes. Du point de vue du scoring si on veut parler en commercial ou en marketeux, statistiquement parlant la grande vadrouille a fait mieux finalement. Alors je dis ça avec détachement car il s’avère que j’ai vu ce film, j’étais dans les vingt millions et je l’ai revu, je l’ai vu deux fois avec énormément de plaisir. D’ailleurs je me dis, pourquoi il marche ce film, il marche parce qu’on a d’abord, vous l’avez signalé tout à l’heure, quelqu’un qui a un capital sympathie incroyable, mais justement qui aime sa région, et qui peut vivre de ce qu’il aime faire. Il nous propose de joindre l’utile à l’agréable, il fait ce film, qui personnellement m’a bien fait rire, parce qu’il fuit la complexité. Je pense que s’il y a quelque chose de voulu dans ce film, c’est bel et bien de tordre le cou aux préjugés comme l’a dit monsieur mais c’est aussi de montrer qu’il faut arrêter de complexifier les choses simples, et c’est pour ça qu’il arrive au bon moment. On est dans une société où tout est compliqué, où tout est prétexte à légiférer, on ne met plus un pied devant l’autre sans savoir si on a le droit de le faire et pourquoi on a le droit de le faire etc. Moi je pense que c’est d’abord la simplicité de sentiments qui fait que ce film est attirant. Et puis quand on regarde bien, il répond, et là c’est peut-être construit comme ça à dessein, il répond à des besoins fondamentaux des gens, des besoins fondamentaux de l’homme. On y retrouve de l’affection, on y retrouve de l’intégration, on y retrouve de la participation, de la considération des uns pour les autres et donc forcément ça marche parce que ces besoins là on les a tous. Et je vous disais peut-être une piste pour sortir de ça, moi ce qui me trouble énormément là-dedans c’est que la région Nord Pas de Calais, elle a une forte identité régionale depuis toujours et depuis toujours c’est un carrefour ethnique incroyable. La région Nord Pas de calais, c’est des français, c’est des wallons, des flamands, mais c’est aussi des polonais, des turcs, des italiens qui sont venus pour descendre dans la mine et peupler les corons. Et malgré toutes ces différences, malgré toutes ces cultures et je dirais même ces cultes pour le coup, puisque le turc, le polonais et l’italien à mon avis n’ont pas du tout les même habitudes cultuelles et on sait que souvent cela peut faire basculer les choses dans le mauvais sens. Cela m’intéresse et c’est peut-être une piste, pourquoi une région comme celle là, qui a un patois, d’ailleurs on se demande comment un patois peut naitre lorsqu’on connait toutes ces ethnies qui ont traversé l’endroit, pourquoi une région comme celle là aujourd’hui nous amène à un tel engouement. Une question encore, quand on y songe, quelles sont les régions qui nous viennent à l’esprit lorsqu’on parle d’identité régionale, personnellement je n’en ai pas beaucoup. J’ai fait mon service militaire, les classe en tout cas, j’étais le seul normand dans une chambre de douze Nord Pas de Calais, ça a été admirable bien entendu, mais je me souviens du nord pas de calais comme région à forte identité, je me souviens de la Bretagne, je me souviens du Pays Basque, je me souviens de la Corse et après ? L’Alsace oui sans doute, mais ça ne me vient pas. Moi je pense que ça se compte sur les doigts d’une main.

Animateur - Donc en rentre dans les explications encore ici, le fait qu’on ait besoin de voir des choses simples, de se faire projeter un monde plus simple que celui dans lequel on vit où tout est compliqué, où on a l’impression d’être pris dans un certain carcan parfois un peu inutile. Donc besoin de simplicité, besoin de se retrouver dans des valeurs humaines, la solidarité, l’attention que l’on a vis-à-vis les uns des autres et puis aussi, et là vous le redites, le fait que quand même le Nord est une région à part, qui, malgré le fait que ce soit un carrefour culturel et cultuel, a quand même gardé une identité très, très forte et réussi un phénomène d’intégration, sur lequel on peut peut-être revenir, assez intéressant parce qu’il y a beaucoup de gens de différents pays qui sont là et malgré tout le patois reste encore bien vivant.

6 - Pour revenir sur les 17 ou 20 millions, on ne peut pas du tout comparer ces deux nombres là, il y en a un qui a été fait il y a quarante ans, l’autre maintenant. Tout le monde aujourd’hui a une voiture, il y a quarante ans ce n’était pas pareil, les pratiques n’étaient pas du tout les mêmes, donc je ne suis pas sur que ça puisse se comparer. Mon sentiment par rapport à pourquoi ce film a généré ce phénomène, effectivement il y a certaines idées qui ont déjà été présentées. La simplicité, ça change beaucoup de notre cadre habituel de complexité. C’est vrai qu’il y a encore 50 ans, 100 ans la vie et les repères qu’on pouvait avoir autour de nous étaient moins nombreux, on avait bien moins de repères. Tout était plus simple, c’était la famille, pour aller à la ville d’à coté il fallait y aller en charrette, maintenant on sait ce qui se passe à l’autre bout du monde à l’instant « t » quasiment. Donc on a beaucoup, énormément de repères dans le monde actuel et c’est vrai qu’on s’y perd un peu. donc voir des choses simples comme ça, pleines de bons sentiments portées par quelqu’un qui a un fort capital sympathie, je ne reviens par-dessus, c’est plein de choses qui génèrent des sentiments, des émotions agréables et qui à mon avis ont créé ce phénomène. C’est à mon avis la différence entre ce qui est montré et ce que chacun vit, cette bouffée d’oxygène, on est content, pour ce que j’ai pu entendre, on est content, on a un grand sourire et ça nous redonne une bouffée d’énergie pour la semaine qui arrive.

Animateur - D’accord, on retrouve ici des arguments qui ont déjà été donnés, l’idée que ça puisse redonner une bouffée d’énergie, de voir des choses simples dans un monde complexe. A titre personnel, je crois que c’est un des grands facteurs qui ont fait que ce film, voilà, vous le dites ici, la grande marge entre le monde à l’extérieur de la salle de cinéma, c'est-à-dire le monde dans lequel on vit, et le monde tel qu’il nous est projeté, ce n’est pas un monde, je dirais de science fiction, mais quasiment, ce monde là où finalement les quatre ou cinq postiers habitent au pâté de maison d’à coté, ils se déplacent à pied, ils vont manger à la baraque à frites, enfin tout ça dans le monde moderne c’est très étonnant. Alors peut-être qu’en province, comme disait monsieur, on a encore la possibilité de faire ça, chose qui à mon avis n’’existe plus tellement dans les grands pays occidentaux, enfin ce n’est pas le monde du travail tel qu’il nous est présenté aujourd’hui.

7 - Je partage les points de vue précédents sur le fait que ce film fait référence à la simplicité, à l’humanité, à la convivialité, à l’amitié mais aussi il y a une question d’humour. Il est intéressant de voir qu’il est facile de rire des autres mais qu’on peut aussi rire sur soi. Cette qualité là est un plus pour tous ceux qui savent le pratiquer. Et puis l’enrichissement qu’on a justement dans la découverte des autres quand on franchit les barrières, je trouve qu’on découvre en fait un besoin de rencontre, un besoin citoyen d’aller vers les autres. Toujours j’essaie toujours de trouver plutôt les effets positifs, en général, et là j'y ai trouvé du positif dans la démarche du film.

Animateur - D’accord donc un film positif, optimiste, un film qui coupe des barrières, qui nous éloigne, qui casse des préjugés. Mais aussi vous dites c’est un humour sur soi et pas seulement sur les autres. Dany Boon est régional, donc il fait de l’humour, encore une fois que l’on peut critiquer ce n’est pas le sujet, mais il fait de l’humour en tous cas sur lui, alors qu’on est habitué à une forme d’humour un peu plus cynique sur les autres.

8 - Dans le succès du film moi je pense qu’il y a quand même une particularité qui n’a pas été évoquée encore, c’est le décalage avec les films à succès de l’époque qui sont essentiellement des films d’action de type comme on le sait, américain avec beaucoup d’effets spéciaux, des scènes spectaculaires. On a parlé tout à l’heure du Titanic, on est compétemment là dans un autre champ. Je pense donc que c’est quand même très spécifique à ce film. Je pense aussi que dans l’humour qui ressort de ce film il y a une espèce d’évasion, c’est un film dans lequel on entre facilement, je suis allé le voir, c’est l’impression que j’ai, la salle rit de bon cœur. Il y a quand même dans la salle de cinéma quelque chose qu’on trouve assez rarement maintenant, cette espèce de communion du public. Chacun actuellement quand on va au cinéma, on est chacun dans son fauteuil, on regarde le film et puis voilà. Ici il y a quelque chose qui se partage avec les spectateurs et je pense que c’est particulier. L’autre élément qui a été un petit peu évoqué, je pense que c’est presque un film anti mondialisation, donc il répond là à une des préoccupations essentielles de notre temps. On est dans une vie de village, vous parliez des facteurs, c’est vrai que cette poste très centrée, la vie de village, il y a une espèce de nostalgie. Donc ces facteurs moi ça m’a frappé, on a l’impression d’être dans un autre monde, enfin il y a une science fiction mais pas un autre monde du futur, mais un autre monde du passé qui n’existe plus et que peut-être on aimerait revoir. Il n’y a pas de modernité, on a des vélos, on a des vieilles guimbardes, enfin bon, à part l’autoroute qui va du sud, on change de monde, on va du sud justement dans le Nord ce coin perdu qui fait un peu village gaulois, il y a peut-être de ça aussi. Et donc il n’y a pas d’ordinateur, très peu, la poste fonctionne comme on pouvait penser qu’elle fonctionnait il y a dix, vingt ans, peut-être trente ans. Je pense qu’il y a des choses comme ça qui jouent dans ce film.

Animateur - Alors effectivement un film un peu aux antipodes des grands succès actuels. Mais vous avez dit aussi, vous avez parlé de gaulois, c’est le mot que j’ai retenu. Ca expliquerait peut-être le fait que quand même actuellement il y a la volonté de tout un tas de pays de faire des adaptations de ce film, je ne sais même pas ce que ça pourrait donner, pour qu’on puisse dans toutes les langues voir les ch’tis. Alors quand vous dites gaulois peut-être que c’est encore une idée de la France, ce coté village, ce coté je dirais que ça irait un peu, sans aller trop loin, l’effet trente cinq heures, le fait qu’on n’essaie de ne pas sourire tout le temps, peut-être que tout ça donnerait au monde une image française un peu décalée par rapport à l’effet mondialisation tel que vous le décrivez et qu’on semble refuser au travers de ce film.

9 - J’ai l’impression d’avoir tout le monde contre moi, mais je reste sur ma position. J’espère simplement qu’on en reparlera dans un an. Je pense qu’il y a un effet d’engouement phénoménal pour le moment, mais qu’est-ce qu’on va entendre dans un an, dans six mois, au fil des mois, des biloutes et des hein ! Déjà il y en a de moins en moins, on verra, je ne connais pas l’avenir, je me pose la question. Les bon sentiments, c’est vrai, c’est positif je suis tout à fait d’accord. Dany Boon revient des années en arrière, à ce qui se passait dans le temps. Mais est-ce que c’est toujours aussi vrai aujourd’hui, c’est ça qui me dérange un petit peu. C’est facile de dire j’ai adoré ce film, c’était super, la sinistrose, ça donne un bon coup de fouet etc., mais pour moi Dany Boon est parti des années en arrière et aujourd’hui on est en 2008.

Animateur - Vous parlez de l’effet nostalgie, on est en 2008 et puis aussi après tout est-ce que ce n’est pas une mode et que dans un an ce sera complètement oublié. Personne ne peut le dire aujourd’hui, comme à l’époque de la grande vadrouille personne ne pouvait le dire non plus. Il se trouve qu’après l’histoire garde un certain nombre de choses qu’on ne sait pas aujourd’hui décrypter.

10 - Sur ce dernier point je pense effectivement qu’il y a une récupération par la publicité et ça je pense en effet que ça va s’éteindre. Plusieurs choses à propos du débat. D’abord je pense que Dany Boon a choisi ce thème, ces thèmes parce qu’il a pensé que cela pouvait lui servir dans sa carrière comme d’autres comiques avaient leur thème de prédilection. Dany Boon a quarante et un ans, il a quitté le Nord à l’âge de 16 ans. Il est parti faire des études en Belgique, ensuite il est parti à Paris. Il est comme moi originaire du Nord mais il a perdu le Nord de vue depuis quelques temps. Je ne nie pas que son créneau soit d’y revenir et apparemment ça a marché. Dans plusieurs interventions on a évoqué le fait que le Nord subissait pas mal de préjugés, par conséquent beaucoup d’idées préconçues, c’est le propre des préjugés. Est-ce un hasard ou une conséquence, le titre du film prévu d’être monté aux USA s’appellerait « bienvenue à la cambrousse, ou peut-être chez les Ploucs. Je me demande donc si une bonne partie de ceux qui sont allés voir le film, en dehors des gens comme moi originaires du Nord qui y sont allés pour les raisons que j’ai dites tout à l’heure, ne sont pas allés voir le film un peu comme on va voir des objets préhistoriques. En effet les préjugés contre le Nord sont quelque chose d’assez marquée. J’ai retenu, pour aller passer huit jours de vacances fin Aout avec ma petite fille, une location en Belgique donc dans le Nord. Quand je dis cela aux gens ils me répondent, quoi des vacances dans le Nord, c’est tout juste s’ils ne me prennent pas une inscription au bon sauveur en se demandant comment on peut envisager d’aller passer des vacances dans le Nord. Fabrice a évoqué tout à l’heure l’intégration. C’est vrai que c’est une des régions, pas la seule, ou depuis longtemps il y a eu de nombreux étrangers qui y ont immigré. Mais ces étrangers n’étaient pas une minorité visible comme on dit aujourd’hui, ils se sont intégrés par conséquent beaucoup plus facilement. Une autre chose aussi qui a facilité cette intégration, celle-ci est vraie aussi pour les minorités visibles, c’est qu’il y avait une façon de vivre dans le Nord due, les mines d’un coté, (quand on parle du Nord on pense mines, mais il n’y avait pas que cela, il y avait aussi le textile d’ailleurs beaucoup plus important en nombre d’individus concernés), tous ces gens vivaient continuellement entre eux. Dans les mines vous avez les corons, c'est-à-dire les maisons construites par les industries minières, privées puis ensuite publiques, les gens travaillaient dans le même puits et logeaient dans le même quartier, le même coron. Ceci était vrai aussi pour les industries textiles parce déjà à l’époque il a fallu faire venir des étrangers, les premiers d’ailleurs étaient des belges, ce n’est pas loin, mais comme Victor disait tout à l’heure à l’époque on voyageait en charrette donc ils n’avaient pas le temps de rentrer chez eux le soir. Donc rapidement les patrons du textile on pensé intéressant de loger ces gens autour des usines. Donc tous ces gens vivaient, travaillaient ensemble, les enfants allaient dans la même école, vivaient dans le même quartier. Cela a créé cette cohésion et cette chaleur humaine qui en est une des conséquences. L’intégration, à l’époque j'avais une vingtaine d’années, je fréquentais des lieux où on ne laissait pas entrer les arabes. Cela semble contradictoire avec ce que je viens de vous dire mais cela était combattu et très vite a disparu et donc l’intégration a gagné parce que les gens au travail vivaient ensemble la semaine et cela devenait difficile d’expliquer ensuite que le Dimanche il n’avait pas le droit d’enter dans le même bal ou le même bistrot que vous. Donc ça a créé cette chaleur et je pense que cette chaleur subsiste. J’ai dit dans ma première intervention que je craignais qu’avec le temps et pour des raisons techniques, la télévision par exemple, elle puisse disparaître mais il en restera toujours les racines. On ne retrouve pas cette chaleur forcément dans chaque région, on est originaire d’une région, on s’y attache, c’est ainsi pour moi en tout mais je ne pense pas être une exception. Je reconnais que je ne suis pas très ouvert, pas très entreprenant, je ne suis pas d’un abord très aimable par conséquent je n’attire pas l’amitié comme l’aimant la limaille, mais j’ai quand même plusieurs constaté qu’en Normandie qu’il n’y avait pas ce même contact, les gens sont beaucoup plus froids, beaucoup plus réservés…. Certains ici le savent, j’ai été maire d’une commune pendant plus de dix ans et j’ai toujours été considéré par les anciens habitants de la commune comme un étranger. Je constate que dans le Nord cela n’est pas vrai. Dans le film pas autant que je l’espérais, il y a quelques scènes qui font la description de cela mais celles qui y font allusion sont des scènes réelles et touchantes.

Animateur-Là on vient dans cette idée du vivre ensemble. Vous expliquez que pour des raisons économiques les gens vivaient ensemble, même les entreprises accueillaient des gens, les faisaient vivre ensemble, les faisaient travailler ensemble. Il y a cette idée du vivre ensemble qui peut-être d’ailleurs peut s’opposer à la vision actuelle que l’on a du monde, un monde avant tout d’individus et donc décalage, décalage ou nostalgie ou décalage encore réel, à voir. Mais quand même ça peut expliquer aussi cette idée, on l’a dit de solidarité, le fait d’affronter la vie ensemble, c’est peut-être un petit peu cela aussi bien la semaine que le dimanche comme vous le disiez. Le Nord a réussi une intégration comme cela par effet, je dirais, économique, par regroupement de familles etc. Vous dites que dans des régions comme la nôtre ici en Normandie ça semble moins vrai, les gens semblent moins accueillants, moi je serais assez d’accord avec ça, il y a vraiment peut-être des effets régionaux qui font que dans une région plus que dans une autre il y a une cohésion, une cohérence, un mode de vie différent.

11 - En ce qui concerne le Nord, c’est là justement le paradoxe par rapport aux autres régions françaises parce que le métissage dans le Nord a été très, très important. Vous faisiez remarquer les habitations autour des unités de production quel qu’elles soient, c’est vrai, mais à l’intérieur de ces ensembles immobiliers il y avait le quartier polonais, il y avait le quartier italien, il y avait le quartier autre. Mais malgré ceci l’intégration s’est faite. Je réagissais aussi par rapport à l’effet gaulois, le paradoxe c’est qu’il y a un métissage parmi les plus importants en France, dans le Nord, parce que les horizons d’origine des habitants sont très, très larges. On retrouve un peu localement cette configuration avec la SMN, avec le plateau. On retrouvait sur le plateau ce climat aussi particulier, ce qui est dommageable d’ailleurs, de constater que c’était un peu singulier, d’une certaine disponibilité à autrui, d’acceptation d’autrui, et au plateau ça perdure encore, c’est quand même un fait très encourageant. On citait les régions, pays Basque, Bretagne etc. on fait appel dans ces régions beaucoup plus à l’aspect originel de la région et de ses habitants, on va avoir les mêmes auteurs pour le Béarn. Le nord c’est beaucoup plus ouvert, c’est quelque chose qui personnellement m’encourage, parce que rappelez-vous la chanson de Brassens quand même il jetait un anathème sur les gens qui étaient nés quelque part, il revendiquait une notion beaucoup plus large. Donc il y avait ce paradoxe que je voulais mettre en évidence.

Animateur - De votre intervention je retiens la dernière partie, il y a des oppositions qui se font, on l’a dit le régionalisme, le coté né quelque part, le coté enclavé à la limite, on pourrait aussi voir ça comme ça avec un peu de mépris, mais en même temps le coté humain, chaleureux. Et puis il y a le coté ouvert, alors ouvert jusqu’où, ouvert sur le monde, ouvert sur les autres, mais en même temps tout seul. Donc vous voyez il y aussi des interprétations un peu différentes, des oppositions qui se font entre l’ouverture au monde qui finalement fait que l’on est chacun tout seul et puis une fermeture dans une petite enclave, une petite région, un village d’irréductibles où finalement tout le monde est ensemble ou a l’impression d’être ensemble.

12 - Tout ce qu’on a dit de la vie en société m’incite à vous parler d’un élément qui me parait très important dans le Nord comme dans certaines régions qui sont très traditionalistes, c’est le goût de la fête. On ne sait plus faire la fête. Il y a beaucoup de régions où l’on a perdu le sens de la fête, le goût de la fête. Regardez par exemple en Normandie il y a des endroits où il y a encore des traditions de fête très marquées, par exemple je parle de la Manche, le Calvados beaucoup moins. Le Calvados est beaucoup plus, je dirais, bourgeois, la Manche est beaucoup plus paysanne et traditionaliste. J’ai vu des fêtes organisées très, très bien, ils avaient fait venir une année les Gilles. Je trouve que c’est formidable les Gilles, c’est une tradition du Nord qui est formidable. Vous savez que de père en fils on est Gilles et c’est un véritable sacerdoce. Les Gilles se sont des danseurs, des gens, des familles avec des plumes, des superbes plumes d’autruche qui forme une espèce de chapeau, d’autres qui ont des bonnets, avec les plumes d’autruche se sont l’élite des Gilles si on peut dire, et puis les autres ont des bonnets, ils sont habillés un peu comme des pierrots, avec de grelots. Ils se promènent le jour du carnaval et distribuent des oranges, ils jettent des oranges à la foule et dans les fenêtres aux particuliers. C’est une fête formidable. Dans le Nord il y a la fête, il a le carnaval de Lille qui est formidable, vous avez aussi la grande braderie de Lille. Vraiment on fait la fête dans le Nord. Moi je leur reconnais cette qualité, ils font la fête, comme on fait la fête dans le pays basque, dans d’autres régions par exemple du coté de Nîmes pendant la fiera. Il y a un certain nombre de provinces où l’on fait des fêtes formidables où tout le monde est impliqué. Je vous parle par exemple bien que ça dégénéré quelque fois malheureusement, les fêtes de Bayonne, je les ai connues étant jeune, il y a six jours de fête, on les attend toute l’année, on ne parle que de ça. Le jour où il y a la fête et bien les employeurs laissaient à leurs employés du temps libre pour faire la fête. Donc c’est pour dire que la fête c’est important et c’est une tradition provinciale. Ca dans le film on ne montre pas la grande fête, mais on nous a montré quand même le match de foot Ball avec tout le public lensois. Les lensois, je ne sais pas si vous vous rappelez quand Lens a joué la coupe de France, il est venu à Caen. J’ai vu arriver tous les lensois habillés avec orchestre et tout, ils ont été formidables. C’est autre chose que les parisiens qui cassent tout où ils passent, il faut dire les choses comme elles sont. Ben oui chacun son truc, je veux dire qu’ils savent faire la fête, et ça pour moi c’est très important. Nous sommes dans une société un peu virtuelle, on joue avec les jeux virtuels mais on ne sait plus faire la fête. Le fête c’est l’ensemble, c’est la population, c’est la communion.

Animateur - J’imagine que quand vous parlez des parisiens qui cassent tout, vous pensez à certains supporters du Paris St-Germain à qui il arrive de commettre quelques actions malencontreuses, voilà je l’ai dit. Mais quand même je retiens cette idée que dans le Nord, en particulier puisque c’est quand même cette région qui nous intéresse aujourd’hui en particulier, mais aussi dans d’autres régions à identité comme par hasard un peu marquée on sait faire la fête, on sait se retrouver, on sait avoir des moments, vous avez dit de communion. On le voit dans le film avec les supporters lensois, on voit aussi des photos de Dany Boon au carnaval de Dunkerque, toutes ces choses là sont dites. La Belgique comme le Nord sont des régions où effectivement on a ce sens de la fête. Alors on pourrait relier ça au fait que se sont aussi des régions dans lesquelles économiquement les gens ont aussi beaucoup souffert, ils ont peut-être aussi le besoin de se retrouver pour communier, faire des choses ensemble qu’on n’a peut-être pas dans des régions comme la nôtre et dans le calvados en particulier, selon vous.

13 - Moi je pense que comme monsieur le soulignait tout à l’heure, il y a peu d’endroit où l’on fait la fête, mais je pense que c’est en train de revenir et que ça va prendre beaucoup de temps et de place dans l’avenir. Une anecdote, j’habite Mondeville, et cette semaine dans ma boite aux lettres j’ai découvert qu’une fête existait depuis de nombreuses années dans cette commune, c’est la fête du voisinage. C’est organisé par la commune qui met à disposition toute un grosse logistique de manière à ce que les voisins puissent diner entre eux, faire une espèce de grand piquenique et ça renforce je dirais l’esprit solidaire des uns et des autres . Tout à l’heure il y a eu une intervention concernant le coté un petit arriéré de ce qu’on voyait dans le film, c'est-à-dire le coté très ancien de la poste d’y il a cinquante ans. Il s’avère que dans mon parcours professionnel très atypique, j’ai dirigé un certain nombre de bureaux de poste. J’ai dirigé celui qui est là-bas, et j’ai dirigé ceux d’Arromanches, d’Asnelles, d’Isigny sur mer, Tilly sur seules, Villers bocage. Je peux vous dire que ce qu’on voit dans le film de Dany Boon est bel et bien un bureau de poste d’aujourd’hui. Les quelques bureaux de poste du futur ont commencé à voir le jour fin 2007, on s’est arête en marche parce qu’il n’y avait plus assez d’argent. Bref ce qu’on voit est très actuel et je pense que ce n’est surement pas pour rien d’ailleurs que Dany Boon a choisi un bureau de poste pour être le centre de son film. C’est aussi un lieu de rendez-vous, la Poste, dans la cité, plus que la mairie, on va beaucoup plus à la poste qu’à la mairie, donc c’est dommage. Donc tout ça pour vous dire que je pense que le film a été voulu comme très actuel, pour dire le monde d’aujourd’hui c’est aussi ça, non pas c’était mieux hier, c’est ça aussi. N’oublions pas quand même qu’il y a les deux tiers de la population qui vit à la campagne. J’ai été autrefois gendarme en zone rurale, et bien ce que j’ai vu dans le film m’a paru tout à fait en phase avec ce que j’ai vécu autrefois en tant que gendarme en zone rurale, ça n’a pas changé vraiment, c’est comme ça.

Animateur - Probablement que d’autres interventions suivront sur ce thème, mais je suis étonné sur la proportion des gens qui vivent à la campagne, 80% des gens vivent en ville ou en zone péri urbaine. C’est vrai que la zone périurbaine à Caen inclut, par exemple Louvigny, c’et vrai qu’on se demande si on est encore en ville ou à la campagne, tout ça est très flou, on ne va pas aller dans trop de statistiques. Donc le film de Dany Boon, je retiens ça dans votre intervention, ce film nous montrerait aussi le monde tel qu’il existe aujourd’hui, ce n’est pas une nostalgie, ce n’est pas quelque chose du passé, c’est aussi ça, et c’est peut-être ça qu’on ne nous montre pas assez dans le monde dans lequel on vit. Au-delà du coté nostalgie, c’était mieux avant, irréductible gaulois etc., dire simplement que la vie des gens humbles est aussi ça, elle ressemble aussi à ça et elle n’est pas seulement avec des gens qui courent au travail, dans le métro, qui subissent les grèves etc. tel qu’on peut les voir au quotidien à la télévision.

14 - Il y a une autre chose dont on n’a pas parlé c’est la question de l’alcool, malgré tout, ça ressort beaucoup dans ce film. Je ne sais pas si c’est aussi actuel que la poste, mais il se trouve, ça me fait penser à autre chose, le succès de Nicolas Canteloup avec son fameux Schivardi sur Europe 1 où l’on a aussi une figure assez particulière, qui plait peut-être à notre coté un peu franchouillard, je ne sais pas dans quel sans ça peut nous flatter, je n’en sais rien, ou évoquer un certain nombre de souvenirs qui nous font bien rire apparemment [Interruption due à un retard dans le changement de cassette]

15 - [Interruption due à un retard dans le changement de cassette] J’ai lancé le pique-nique annuel à nouveau dans le quartier. J’ai observé que ces personnes qui ne s’adressaient pas la parole, aujourd’hui se parlent, s’arrêtent pour se parler. Donc vous parliez tout à l’heure de ce besoin renaissant de faire la fête, c’est un fait qu’il a existé et qu’il perdure encore dans bien des coins, mais ce besoin de faire la fête avait besoin d’être réactivé dans certaines localités, notamment celle où j’habite aujourd’hui. J’extrapole aussi à travers le monde associatif il y a là aussi le besoin de faire la fête. Prochainement on va accueillir des anglais dans notre commune, et bien on fait toute une préparation pour les accueillir honorablement. Ca passe par différentes activités y compris chorale, tout un ensemble de choses. Donc le besoin de faire la fête est réactivé, pourquoi, peut-être parce qu’il y a une vie peut-être un peu plus difficile aujourd’hui. Vous parliez aussi des différentes civilisations, je développe un peu plus. Nous avons encore aujourd’hui en France des agriculteurs à l’ancienne, et nous avons encore des artisans, je veux dire par là que dans un même pays différentes couches de civilisation existent toujours, alors si on extrapole à l’échelon du monde on verra qu’il y a encore des cueilleurs, chasseurs.

16 - Tout à l’heure monsieur a parlé de la poste. Il y a quelque chose qui me revient à l’esprit, en me remémorant un peu le film qui a été intéressant quand même, c’est le fait qu’on a sorti le directeur de son bureau. Ca c’est quelque chose de nouveau, c'est-à-dire que dans l’administration vous aviez le directeur qui se trouve dans son bureau, et puis les employés, là c’est un peu forcé, c’est vrai que l’amener à faire la bringue etc. au commissariat, c’était peut-être poussé. Mais c’était quand même, le faire sortir du bureau, j’ai trouvé ça quand même assez intéressant. Moi qui ai dirigé une équipe d’une cinquantaine de personnes, une fois j’ai éprouvé le besoin d’inviter tous mes gens à faire une véritable fête, on a fait une soirée, moi j’avais préparé le repas avec mon épouse, on était une cinquantaine, je trouve que c’est pas mal, j’ai trouvé que dans le film c’était pas mal. Et puis alors il y a une certaine nostalgie, la nostalgie du facteur d’autrefois qui rendait service aux gens. Evidemment ça a choqué certains, le facteur est venu prendre la goutte etc., etc., mais le facteur si on lui donnait la goutte c’était parce qu’il rendait beaucoup de services. Maintenant le facteur il passe, clac il vous met le courrier dans la boite, il ne vous dit même pas bonjour, il arrive près de la boites aux lettres il ne dit même pas bonjour ni rien. Bon à une époque il y avait le facteur qui venait dans les maisons, il discutait, il servait de relais, à la campagne surtout, avec les administrations. Maintenant ça se perd tout ça, je dirais même c’est symptomatique. Je me rappelle dans le village où est née mon épouse le village de Saint Martin de Bonfossé dans la manche, je ne sais pas si vous connaissez ce patelin, il y avait un facteur qui s’appelait Jules, on l’appelait parce qu’il était toujours en vélo, on l’appelait bécane à Jules, c’était son surnom, parce qu’il se cassait la gueule souvent le soir quand il rentrait, il était un peu pété, on le retrouvait dans le fossé, on l’appelait bécane à Jules. Alors évidemment ce coté un peu sympathique du facteur qui va boire son pot chez le client, évidemment ça ne va pas du tout avec le management moderne mais ça a un coté sympathique chez les gens.

Animateur - on en va pas redévelopper une énième fois le coté un peu nostalgique de ce qui se passait avant. A la poste avec les postiers rassure-vous j’ai eu quelques postiers qui me donnaient le courrier et qui n’avaient pas bu que de l’eau, donc ça existe encore, non, non je ne dénoncerai pas.

17 - Je veux revenir à ce que vous avez dit monsieur tout à l’heure, on ne fait plus la fête, c’est vrai. Je voudrais savoir même s’il ne faut pas revenir en arrière, ce que c’était la fête et qu’est-ce que la fête aujourd’hui avec les jeunes aujourd’hui. Est-ce qu’il faut boire, boire ce qui se voit beaucoup dans le film, est-ce qu’il faut faire le tournage en étant complètement bourré, est-ce que c’est un exemple. Peut-être que je décortique trop les choses, mais Kad Merrad qui est l’employeur a décidé d’accompagner Dany Boon, c’est justement pour empêcher son employé et ami, d’arrêter de boire. Donc il revient toujours complètement bourré. Donc en fait il s’est pris au jeu, il voulait entrer partout et entrainer son employé. Renversement de situation. J’ai quand même trouvé trois situations, j’ai ri trois fois quand même. Je tiens quand même à dire que j’étais la seule à rire dans la salle, nous n’étions pas très nombreux ce jour là, je n’ai entendu personne rire, il n’y a que moi qui riait. J’ai ri trois fois. La première fois à la scène de Galabru du début à la fin, c’était très drôle, on parle de moins 10 moins 20, et puis Galabru bon, bien avec sa voix, dans l’ombre, c’était très rigolo. La scène de la moto m’a paru très originale, où Dany Boon, normalement en règle générale il aurait plutôt cassé la figure du mec, de son concurrent, il est amoureux de la fille, de sa collègue, donc je pense que quelque part il y a un clin d’œil pour les motards qui briquent leur moto, et au lieu de donner un coup de poing dans la gueule, il donne un énorme coup de pied dans sa superbe moto. Evidemment ça m’a assez fait rire. Et il y a la scène où ils sont tous les deux dans la poste, Kad Merrad demande à Dany Boon, est-ce que vous pouvez aller porter cette lettre à tel endroit, et pendant cinq minutes, je vous dis quoi, j’ai trouvé cela assez drôle. Voilà les trois scènes qui m’ont fait tire. Donc qu’est-ce la fête aujourd’hui pour les jeunes, mis à part, je crois que c’est le maire de Paris qui a fait ça, les fêtes de quartier c’est très bien, c’est différent, les gens ne sont pas beurrés, peut-être quelques-uns. Qu’est-ce que c’est faire la fête autrefois et aujourd’hui.

Animateur - J’avoue être un peu surpris par la teneur du débat, là on est sur faire la fête, je ne me souviens pas dans le film avoir vu une scène de fête au-delà des quinze secondes où ils sont dans le chaudron lensois. Si on parle de fête telle que vous l’avez décrite, c'est-à-dire la fête collective, la communion etc., Alors c’est la fête mais pas au sens des arènes de Nîmes, des férias etc., c’est la fête conviviale entre amis.

18 - Peut-être peut-on évoquer quelques scènes du film en faisant la distinction entre ce qui me parait vraisemblable par rapport aux souvenirs que j’ai du Nord, et ce qui me parait être une caricature propre à chaque film comique. Dans le premier film de Dany Boon, la maison du bonheur, qui traitait un peu de l’escroquerie dans le monde des agences immobilières, il y a aussi des scènes qui semblent vraisemblables et d’autres qui sont poussées, ce qui est normal. D’autre part le film me semble être une juxtaposition de scènes qui essaient de faire ressortir un des caractères du Nord, il n’y a pas forcément un fil conducteur. La première scène c’est l’accueil, cela me parait assez vraisemblable de ne pas laisser quelqu’un coucher dans la rue parce qu’il arrive dans une baraque où il n’y a plus rien. Moi ça m’est arrivé en Normandie, mais bon je ne vais pas m’étendre là-dessus. Une autre chose qui me parait vraisemblable, c’est la main mise de la mère sur le fils. L’ancrage familial est également quelque chose qui me semble être assez caractéristique du Nord. Quand j’ai annoncé à ma famille que j’allais partir pour la Normandie, j’aurais dit je pars en Patagonie cela n’aurait pas fait plus d’effet, mais quitter sa famille, à l’époque ! Cela a peut-être été modifie avec le temps, mais à l’époque c’était comme ça, un fils ne quittait le domicile familial. J’ai pris un appartement sans être marié ni même accompagné, je suis parti tout seul du domicile de mes parents, c’est quelque chose qui à l’époque ne se faisait pas. La fête comme dans le film c’est quelque chose que j’ai vécu. Je travaillais dans le textile quand j’ai commencé ma carrière, j’étais tout jeune. Il y avait une habitude en tout cas dans la boite où je travaillais, un cadre ne se « salissait » pas les mains pour dire bonjour à un employé. Par contre, et c’est tout à fait paradoxal, on fêtait nos anniversaires à l’intérieur du service, et ce jour là tout le monde se retrouvait ensemble, le cadre qui ne disait pas bonjour dans la semaine nous accompagnait dans le même bistrot. Là c’est vrai que celui qui n’était pas habitué ressortait dans une brouette. Alors pour revenir au film, ce qui me parait vraiment être une caricature est d’essayer de faire croire que dans le Nord tout le monde boit tout le temps pour se saouler. Ces scènes font partie de celles que j’appelais tout à l’heure triviales elles ne sont pas tellement représentatives. Le fait de manger ensemble le midi, il est vrai qu’à l’époque je n’aurais pas imaginé me retrouver dans le même bistrot le midi et manger à une table différente qu’un collègue. Ca je l’ai vu à Paris mais dans le Nord c’était quelque chose d’inimaginable. Donc le fait que le gars, étant célibataire par la force des choses, soit accaparé le midi me parait vraisemblable. La scène du restaurant un soir, admettons aussi, mais on peut être autour d’une même table sans forcément se saouler. J’ai vu plus d’alcooliques au travail en Normandie que dans le nord. Je me répète mais je crois que Dany Boon, a essayé de calquer, de montrer ce qui lui semble être les caractéristique du Nord, il y a des choses réussies, d’autres qui le sont moins.

Animateur - on ne va pas revenir sur ce qui a semblé plus ou moins vraisemblable etc. Vous avez signalé un certain nombre d’exemples plus ou moins vraisemblables ou qui pourraient être encore d’actualité aujourd’hui, d’autres beaucoup moins. On parlait de l’alcoolisme qui pourrait, chose un peu triviale, ne pas être montrée à ce niveau là, peut-être.

19 - Moi, votre exemple, on va déjeuner ensemble le midi, je l’ai vu en Normandie, c’est le contraire, le mec qui vient d’arriver reste tout seul dans son coin, je suis arrivé après je l’ai laissé tranquille, sinon si j’arrivais avant il ne venait pas. Une chose qui n’a pas été développée qui était dans le prolongement de ce que je disais tout à l’heure c’est la différence entre la régionalisation et les particularismes locaux. Le fait qu’avant on ne savait pas ce qui se passait à l’autre bout de la terre à l’instant »t » faisait qu’on avait connaissance de ce qui se passait autour de soi, on avait beaucoup plus de choses en commun avec son voisin puisqu’on savait après tous la même chose. Maintenant on s’occupe de ce qui se passe en Chine et le voisin s’occupe de ce qui se passe en Nouvelle Zélande. Donc du coup ça casse le lien, on est dans une société qui de plus en plus, et alors les médias, la télé où l’on nous montre toutes les valeurs a travers les publicités, favorisent aussi cette tendance à l’individualisme. Donc le retour au particularisme local, tout ce qui est à coté de chez soi, je dirais revient naturellement même si dans l’espace et dans les influences qu’on a actuellement ce n’est pas facile de le faire. A mon avis c’est ce qu’on retrouve dans ce film, cette chaleur, ils se connaissent tous, le facteur, bon je ne vais pas le redire. Donc cette grande différence, je veux juste revenir un peu là-dessus, entre la mondialisation, l’individualisme et le coté revenir à quelque chose de beaucoup plus local, de ce qui se passe près de chez soi.

Animateur - On sent que le débat s’essouffle un petit peu, on reprend un certain nombre d’ides qu’on avait. Je vais peut-être essayer, parce que moi quand je suis ressorti de ce film j’ai pensé immédiatement à un autre film qui avait évoqué chez moi à peu près les mêmes choses et pourtant il ne parlait pas du tout de la même chose, ça s’appelait « la vérité si je mens ». C’est un film qui se passe dans le milieu à Paris, dans le sentier, donc aussi avec des caractères du sentier. Là c’était le Nord et puis à Paris c’était les caractères du sentier. Moi je sais, dans ce film, j’ai eu à peu près la même impression en sortant de « Bienvenue chez les Ch’tis qu’en sortant de « la vérité si je mens » même si ça ne parlait pas de la même chose. Alors que peut-être il y a des liens à travers tous ces films, des points communs, des choses qui font qu’on se retrouve dans une caricature sur un microcosme etc. peut-être.

20 - Moi j’ai vu « la vérité si je mens » j’ai adoré, j’étais pliée de rire complètement parce que d’abord, j’étais assistante dentaire, j’ai connu beaucoup de monde du sentier et donc j’ai beaucoup ri à voir ce film. Par contre je n’ai pas senti ce que vous venez de dire, un lien, oui peut-être, si je comprends ce que vous dites. Une dernière chose qui n’a rien à voir avec ce que vous venez de dire mais c’est important de se remémorer certaines séquences du film. On parle d’accueil, dans le Nord ils sont très accueillants mais il faut se souvenir de la séquence où Dany Boon reçoit chez lui Kad Merrad, la tête de sa maman, la tête de Line Renaud, comment a réagi Line Renaud, vous vous en souvenez, était-elle accueillante, elle a changé après.

Animateur - Bon alors effectivement, je ne suis pas certain encore une fois que le but du débat était de voir les bons et les mauvais cotés du Nord. Parfois on se rend compte que les débats dévient dans des sens qu’on ne maitrise pas toujours, ce n’est pas forcément très grave. Comme je sens, à moins que vous ayez des choses absolument lumineuses et nouvelles surtout à dire sur le sujet qui effectivement comme je m’en doutais assez bien un sujet sur lequel on peut avoir le déclic pour voter mais qui n’est quand même pas si simple. Une dernière intervention.

21 - Il y a cinquante cinq ans j’ai été enlevée par un Parisien, je suis du Nord, de Lille, il m’a dit ah ! Oui forcément dans le Nord vous vous marriez avec le trottoir d’en face.

Animateur - Bon et bien une belle conclusion

21bis - Après la débâcle, on nous appelait les boches du Nord.

Animateur - Là conclusion moins drôle, parce que Bienvenue chez les Ch’tis effectivement, rappelons quand même que l’enclave du Nord envahie peu après la Belgique a été sous contrôle de l’Allemagne, mais il s’agit de propos malencontreux à une époque difficile. Bien on va arrêter là. Est venu maintenant le choix du thème pour le prochain café.

1 - Faut-il changer la constitution et si oui, dans quel sans ? 6 voix
2 - Que doit-on penser du marketing politique ? 3 voix
3 - Un Mai 68 est-il encore concevable ? 8 voix
4 - Le corporatisme un bien ou un mal pour la société ? 2 voix
5 - Les cercles philosophiques ont-ils encore une influence ? 8 voix
6 - Les nouveaux dispositifs de sécurité publique sont-ils abusifs ? 8 voix
7 - A-t-on perdu l’esprit olympique ? 4 voix

Compte tenu de l’égalité entre plusieurs thèmes, il est procédé à un deuxième vote pour départager ces trois thèmes

1 - Un mai 68 est-il encore concevable ? 2 voix
2 - Les cercles philosophiques ont-ils encore une influence ? 3 voix
3 - Les nouveaux dispositifs de sécurité publique sont-ils abusifs ? 5 voix

Prochain café le 14 Juin : Les nouveaux dispositifs de sécurité publique sont-ils abusifs ?

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