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Compte-rendu synthétique par Marc HoussayeCafé Citoyen de Caen (11/03/2000)

Animateur du débat : Marc Houssaye

» Politique et Société

Liberté et égalité sont-elles deux notions incompatibles ?

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Du point de vue de l'individu, la liberté se base sur la notion de choix. Ainsi, être libre, c'est posséder un pouvoir d'autodétermination. Du point de vue social, la notion de liberté se complexifie car elle nécessite la prise en compte des interactions entre les individus.

La liberté est souvent perçue comme la négation des contraintes. Le mythe de l'indépendance individuelle absolue s'est cémentée dans tous les secteurs de notre société et dans son organisation même. L'automobile symbolise parfaitement cet idéal d'autonomie : la faculté de se mouvoir sans contrainte venant de la collectivité exceptés les embouteillages. La déferlante des téléphones portables montre également cette quête d'indépendance. Les gênes occasionnées dans les espaces publics s'effacent alors devant la liberté souveraine pour l'individu de disposer de son mobile. «Nous vivons dans une ère profondément individualiste» s'accorde à dire l'assemblée. Ainsi, les libertés non régulées des autres peuvent faire obstacle à la nôtre. Inversement, tenir compte des libertés d'autrui pourrait être perçu comme une limitation, une aliénation, de notre propre liberté.

De l'égalité entre les hommes dérive l'égalitarisme à savoir l'établissement d'un même niveau de richesse pour tout le monde et l'absence de classe. Pour atteindre un tel but, une modération et une mesure du libéralisme individuel s'avère nécessaire. C'est alors un nivellement de la communauté. L'égalité entre les hommes suppose l'établissement et l'application de lois communément admises. La justice assure la reconnaissance et le respect des droits de chacun. Les règles de vie en communauté s'accompagnent donc de l'obéissance à la loi établie par l'ensemble du corps social. Vivre dans une société, c'est en accepter ses règles. Un paradoxe, né de la confrontation entre libéralisme individuel et égalitarisme communautaire, semble donc s'esquisser.

La devise républicaine "Liberté, Égalité, Fraternité" est un tout indivisible. Cette devise relie les valeurs de liberté, d'égalité et de fraternité, par ailleurs non quantifiables, et ne les exprime nullement indépendamment les unes des autres. Mais, si liberté et égalité résonnent de façon familière à nos oreilles, la fraternité, elle, semble faire défaut dans notre société. Et l'on parle plus facilement de solidarité, qui, d'après un intervenant, ne serait «qu'une restriction et une déviance de la fraternité en des termes économiques». Nous pouvons également observer en ce sens l'altération des valeurs de liberté et d'égalité, la liberté se résumant, dans notre société de consommation, à la possibilité d'acquérir des biens matériels, l'égalité entre les hommes à l'égalité des pouvoirs d'achat.

Notre société individualiste fait passer les intérêts particuliers devant ceux de la collectivité. Ce libéralisme débouche alors sur un désintérêt de la chose publique, sur la passivité et la dépolitisation. De plus, le triomphe de l'individualisme risquerait de mener à la loi du plus fort.

L'égalité entre les hommes n'existe que devant la loi, cet établissement de règles de vie en communauté consenties par l'ensemble du corps social. Et c'est justement parce que tous les citoyens élaborent ces lois qu'ils forment une unité. Cependant, l'égalitarisme pourrait aboutir à la négation de l'individu.

Liberté et égalité n'ont donc de sens que lorsqu'elles sont liées à la fraternité. Pensées isolément, liberté et égalité conduisent à des visions partielles de la société où se discutent continuellement les relations entre l'individu et la collectivité.

En bref, la réflexion citoyenne s'exprime :

Nous pouvons observer dans notre société une tendance à l'individualisme. Notre propre liberté ne se soucie guère de la liberté d'autrui. Ainsi se sont développés quelques mythes de l'indépendance absolue, entre autres, l'automobile et le téléphone portable. Ce mouvement libertaire semble alors se heurter à l'égalitarisme. Cette apparente opposition entre liberté et égalité ne reflète cependant que la sempiternelle question de la relation entre l'individu et la société.

La devise républicaine "Liberté, Égalité, Fraternité" est un tout indivisible. La fraternité fait pourtant défaut dans notre société. Remarquons que les termes de liberté et d'égalité sont largement déviés vers un sens économique. Et la fraternité fait place par ailleurs à son altération économique : la solidarité.

La construction d'une société s'accompagne de lois conçues par l'ensemble du corps social. Ainsi, liberté et égalité ne peuvent avoir de commune entente que dans leur alliance à la fraternité.

Annexes :

- Article premier de la déclaration des Droits de l'homme et du citoyen du 26 Août 1789 :
"Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune."

- Article quatrième de la déclaration des Droits de l'homme et du citoyen du 26 Août 1789 :
"La liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi."

Thèmes proposés pour le Café Citoyen du 25 mars 2000 :
- Quel avenir pour les OGM ? 7 voix
- Faire respecter les lois, c'est d'abord les faire accepter. 7 voix
- L'assurance et la retraite. 5 voix
- Droit et devoir d'ingérence. 6 voix
- Internet et citoyenneté. 4 voix
- Existe-t-il une morale du droit de grève ? 10 voix

Interventions

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ABELEGUE ALLIANCE

mercredi 17 septembre 2014 17:12:47 +00:00

Liberté et égalité sont compatibles dans le droit, mais dans les faits, la liberté menace l'égalité et l'égalité menace la liberté. L'intervention de la loi peut sembler être le moyen terme entre ces deux notions

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ABELEGUE ALLIANCE

lundi 24 août 2015 02:46:04 +00:00

On a tendance à croire que l'égalité est facteur de liberté. Ceci est vrai dans une certaine mesure, car plus vous êtes supérieur à un tiers, plus vous jouissez d'une plus grande liberté que lui. Mais en matière de connaissance, je vois plus le contraire. Les scientifiques qui élaborent des théories et des formules sont plus intelligents, mais en même temps plus esclaves que les autres: ils sont fortement préoccupés par leur recherche qu'ils peuvent facilement oublier de vivre. Les scientifiques qui produisent des objets techniques et des biens industriels sont aussi esclaves, car ils ne peuvent aller outre que les lois et formules déjà établie. Quant au petit consommateur Lamda, il peut ne pas savoir le nom de la marque de son véhicule, il s'en fout perdument, mais il sait et décide lui-même de ce qu'ilveut faire avec cette voiture...

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