“Le comptoir d'un café est le parlement du peuple.”

Honoré de Balzac (1799 - 1850)

Bienvenue en Arcadie

Vous êtes ici : Accueil > Comptes-rendus > La démocratie est-elle vraiment le moins mauvais des systèmes politiques ?

Compte-rendu analytique par Jean-Marie SeeuwsCafé Citoyen de Caen (27/10/2007)

Animateur du débat : Boris Vaisman

» Démocratie et Citoyenneté

La démocratie est-elle vraiment le moins mauvais des systèmes politiques ?

ShareThis

[Le président, Marc HOUSAYE, salue l’assistance et présente l’Arcadie et sa charte. Il passe ensuite la parole à l’animateur.]

Animateur - Aujourd’hui c’est moi qui suis chargé d'animer le débat. Alors hasard du calendrier, le thème c’est moi aussi qui l’avait proposé donc en trente secondes je vais vous dire ce que j’entends par là. La démocratie est-elle vraiment le moins mauvais de tous les systèmes politiques ? Déjà, j’avais comme idée de regarder la société dans laquelle on vit, de voir le système politique dans lequel on vit. On a toujours l’impression que ce système, finalement il n’y en a pas d’autres, c’est un système abouti, un système qui lui-même peut avoir ses propres contradictions mais je dirais que c’est plutôt lorsqu’il y a des contradictions que ces dernières viennent plutôt des hommes qui font le système que du système lui-même. Moi, je voudrais poser la question du système lui-même, de la démocratie en tant que système pour savoir si véritablement, alors évidemment avec une boutade, c’est vraiment le moins mauvais de tous ? Alors c’est "le pire de tous excepté tous les autres" avait dit Churchill. J’ai formulé "le moins mauvais". Donc essayer de comprendre le système démocratique, la façon dont il fonctionne, essayer peut-être aussi avec des exemples d’aujourd’hui de voir quelles peuvent être les failles, les dérives. Je pense par exemple aux dérives en terme de nécessité, de séduction pour être élu, un certain nombre de choses comme ça. Je laisse la parole à l’assemblée et puis j’essaierai de reformuler. Je voulais aussi vous signaler que le débat est enregistré, non pas pour faire Stasi, mais dans le but de réaliser des comptes-rendus analytiques. Donc forcément pour la qualité du compte-rendu c’est mieux d’avoir toutes les interventions. La cassette va s’arrêter à un moment. A la personne qui aura le micro je demanderai de reformuler ce qu’elle voulait dire pour que son intervention ne soit pas coupée.

1 - Pour savoir si la démocratie est la moins mauvaise méthode politique il faut la comparer à celles qui existent ou qui ont existé. Elles sont relativement limitées, si on passe de la monarchie absolue à la dictature en passant par les empires. Ce faisant on ne peut que répondre que certainement c’est peut-être la moins mauvaise mais qu’il ne faut surement pas changer. Pour autant on peut se demander quelles sont les formes de régime sont démocratiques, ça peut être une monarchie constitutionnelle, ça peut-être une république présidentielle, une république parlementaire. On peut là-dessus avoir des différences d’intensité. Mais lorsqu’ on pose la question telle qu’elle a été posée à savoir est-ce la moins mauvaise, c’est qu’on pense implicitement qu’elle peut être améliorée, que le système doit être amélioré, sinon on dirait est-ce la meilleure et point à la ligne. Il y a me semble-t-il dans toutes les formes de démocratie un point commun, c’est qu’elles assurent toutes la liberté, liberté d’expression, liberté de réunion, d’association, je pense que là-dessus il y a consensus. Pour autant et par contre si on pense que démocratie c’est le pouvoir au peuple on se fait de douces illusions, en tout cas si on entend le peuple dans son ensemble. Chaque individu, chaque membre, chaque citoyen peut très probablement se sentir frustré parce que, sauf exception, je ne vois pas comment il peut considérer participer au pouvoir de façon directe tout au moins. Alors une autre observation, si la démocratie assure la liberté, assure l’égalité, le pouvoir, même si ça n’a jamais été autrement, est réservé à une caste, ce n’est plus la même caste et ce n’est plus écrit que le pouvoir est réservé à untel ou à untel mais dans la pratique on s’aperçoit que le citoyen lambda a peu de chances d’accéder au pouvoir. Vous avez utilisé l’expression séduire. Il est vrai qu’aujourd’hui c’est beaucoup plus facile pour être élu de séduire que de convaincre. De façon générale d’ailleurs plus on s’adresse à un groupe restreint pour faire passer une idée, plus il faut savoir convaincre, plus au contraire on s’adresse à une foule et plus il suffit de savoir séduire. Les élections aujourd’hui c’est plus par séduction que par des idées qu’on les gagne, par conséquent l’électeur vote plus par sensibilité que par choix raisonné. Néanmoins il faut préserver la démocratie mais pour cela il faut que chacun joue le jeu. L’électeur pour respecter la démocratie devrait ne pas voter sans réfléchir. Déjà voter, on sait que sur cent personnes en âge de le faire il y a en a à peine soixante qui le font, 20% d’abstention et 20% qui ne s’inscrivent pas sur les listes. Il faut donc respecter la démocratie même s’il y a des failles, ces failles ont peut essayer de les corriger petit à petit, dans des instances comme le café citoyen par exemple. Malgré ces failles, ces défauts, une première règle fondamentale est de respecter le choix de la majorité, or il semble que de plus en plus des minorités plus ou moins agissantes contestent ce choix majoritaire. Plus on va jouer avec la démocratie plus on risque de la détruire.

Animateur - Beaucoup de choses ont été dites, je ne vais pas revenir sur toutes, je retiendrai deux. La première, vous avez donné une définition, c’est le pouvoir au peuple. Effectivement la démocratie se fonde sur un concept qui est celui de la souveraineté populaire, donc à savoir ce qu’est le peuple. Je pense qu’il faudrait essayer de définir, est-ce que le peuple c’est chacun d’entre nous, est-ce que c’est autre chose. Et puis vous êtes revenu sur la nécessité de séduction, sur le fait qu’on cherchait plus à séduire qu’à convaincre, ça me semble aussi intéressant dans l’idée de voter, le système de vote fait que celui qui se présente est obligé de parler à chacun d’entre nous et à chacun d’entre nous on sait qu’on peut parler de façon multiple.

2 - Je voudrais revenir sur les classiques et notamment sur Montesquieu qui dans l’esprit des lois a parlé du principe de gouvernement des différents régimes. En parlant de la démocratie il disait, le principe qui guide la démocratie c’est la vertu, c'est-à-dire la disposition à faire le bien commun. Ca c’est important, il faut se dire que le citoyen dans un régime démocratique c’est la confiance dans ses représentants qu’il doit avoir pace que les représentants sont capables de faire le bien commun. L’autre régime est le régime monarchique, là c’est l’honneur, mais l’honneur c’est le respect du roi vers ses sujets et disons l’estime que les sujets ont vis-à-vis du roi. Il est évident qu’à l’époque les relations entre le roi et les sujets étaient plutôt basées effectivement sur le principe de l’investiture de droit divin donc il n’y avait pas vraiment de régime démocratique, on ne peut pas parler de démocratie. Et puis alors en parlant des autres régimes et notamment des régimes autoritaires, les liens entre le citoyen et le gouvernant c’est la crainte. Si on se base sur la crainte on peut parler effectivement des régimes dictatoriaux où il n’y a aucune relation entre disons celui qui gouverne et le peuple mais uniquement entre celui qui gouverne et son parti. Voilà un peu en gros ce qui est important à retenir si on veut parler d’une véritable démocratie.

Animateur - Donc là vous insistez sur la vertu, concept un peu difficile en tout cas la nécessité pour être l’élu du peuple, d’être exemplaire au regard de ce peuple. Forcément c’est une condition sine qua non au principe démocratique surtout quand il se base sur une représentativité.

3 - Moi je voudrais parler effectivement de cette image de la démocratie qui c’est vrai peut avoir des cotés très négatif, d’ailleurs Churchill disait aussi pour se rendre compte de la véritable identité de la démocratie il suffisait de parler avec l’électeur moyen pendant dix minutes puisqu’en fait il montrait que le fait de donner la parole à tout le monde, bien évidemment nécessitait aussi que ceux qui avaient envie de dire ce que d’autres considéraient comme des bêtises, pouvaient le dire. Donc il y a une grande liberté dans la démocratie et peut-être aussi que la démocratie nécessite autre chose que l’expression des gens. Quand on a remis sur pied l’esprit démocratique au 18°, ça ne s’est pas fait dans une grande volonté de faire en sorte que les gens s’expriment, il y avait aussi des grands esprits qui faisaient en sorte de diffuser le savoir, les encyclopédistes étaient là aussi pour faire en sorte que les gens s’éduquent au savoir et prennent part à la marche monde finalement, s’accaparent le monde pour pouvoir mieux en discuter. Donc la démocratie on pourra toujours casser du sucre dessus en disant que c’est le café du commerce ce que nous sommes en train de faire, on pourra toujours dire que les gens peuvent dire n’importe quoi mais ça nécessite aussi une part d’éducation et chacun doit se replacer dans un principe d’éducation vis-à-vis de l’autre. Donc c’est assez complexe parce que je crois qu’à trop vouloir faire de la démocratie on peut justement la tuer, peut-être que justement en voulant faire en sorte que tout le monde s’exprime en disant n’importe quoi n’importe comment on peut tuer l’esprit démocratique. Peut-être que le meilleur moyen de tuer la démocratie c’est d’en exacerber un certain coté c'est-à-dire le fait que tout le monde s’intéresse principalement à soi et non plus dans une recherche d’intérêt général et d’ humilité vis-à-vis de l’expression de l’intérêt général.

Animateur - Là on note déjà un premier problème entre l’idéal de ce qu’est la représentation populaire et ce que Churchill appelait l’électeur moyen, je dirais avec beaucoup de coté péjoratif, cette façon de chacun entre toute liberté peut se permettre de dire n’importe quoi. Alors peut-être faut –il relativiser ce qu’on peut appeler n’importe quoi, c’est toujours facile de dire celui d’en face dit n’importe quoi, par exemple au regard de la somme des savoirs etc, qu’est ce c’est n’importe quoi. Je pense que ce qui est intéressant dans cette intervention c’est vraiment de voir la place de l’électeur, de celui qui censé avec l’ensemble des autres avoir le pouvoir, pour voir comment fonctionne le système en entier. C’est un sujet par vraiment très simple, alors précises un peu

3bis - Juste pour préciser parce que je me suis certainement fourvoyé dans mes phrases alambiquées, ce que j’aime beaucoup dans la démocratie et je dirais que c’est le plus beau des systèmes finalement plutôt aller contre la formulation d’aujourd’hui, parce que ça nécessite autre chose, ca nécessite de faire confiance aux gens et ça nécessite de l’éducation. Pas de l’éducation du roi vis à vis de ses sujets, l’éducation citoyenne, faire confiance aux gens et petit à petit les gens vont arriver à découvrir leur citoyen « caché en eux »

Animateur - C’est très important la nécessité d’éduquer le citoyen pour justement éviter qu’il dise » n’importe quoi » Alors qui éduque, qui fait l’éducation, comment peut-on atteindre un niveau de conscience suffisant pour que le système fonctionne, que chacun puisse parler en toute connaissance de cause si tant est que ce soit possible.

4 - Si on ne reste que tous les trois à parler ça va devenir une autocratie. Dans le système tel qu’il est aujourd’hui, ses conséquences plus exactement, on constate, je reviens sur ma première intervention, il me semble que poursuivre dans cette voie ne peut que détruire la démocratie. Si vous voulez je suis conscient que ça peut être discuté, mais si on compare avec ce qui se passait avant la révolution, il y avait une caste à laquelle le pouvoir était réservé, c’était sinon dans la constitution puisqu’il n’y en avait pas, mais dans les lois en vigueur, les habitudes en tout cas en vigueur. Aujourd’hui on ne trouve écrit nulle part que le pouvoir est réservé à untel ou à un autre, mais dans la pratique on constate bien que c’est comme ça que ça se passe. Ne parlons pas des élections locales qui sont encore accessibles à tous et encore c’est à discuter. On peut toujours parler, je ne sais plus qui a dit que la différence entre une démocratie et une dictature était que sous une dictature on dit fermes la et en démocratie parles toujours tu m’intéresses. C’est peut-être une boutade mais malheureusement on constate que c’est un peu ça. Il y a énormément d’instances où en principe on a le droit de d’exprimer, mais est-ce que ça aboutit sur des conséquences, est-ce que ça aboutit sur une relation entre le peuple et les décisions, c’est loin d’être évident. D’un autre coté il faut bien reconnaître que le peuple est versatile. On vient d’évoquer Churchill, il a été battu aux premières élections après la guerre. Si on considère qu’une élection c’est approuver ou désapprouver quelqu’un, il faut donc conclure que le peuple a désapprouvé Churchill à tort ou à raison mais on peut penser que juste après la guerre cette désapprobation est étonnante. Si vous regardez également dans beaucoup de circonstances les sondages interrogeant le peuple pour savoir ce qu’il pense sur tel ou tel sujet, la peine de mort par exemple, majoritairement le peuple était pour son maintien, il n’empêche que le candidat qui s’était déclarer contre a été élu. Plus récemment le gouvernement Jospin semblait avoir dans les sondages une certaine satisfaction, néanmoins il a été battu même si cela est aussi du au saucissonnage des candidatures. C’est une autre conséquence des règles électorales, mathématiquement il suffit de multiplier les candidatures pour faire battre quelqu’un de son camp. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Combien d’électeurs se déplacent, j’en vois autour de moi mais vous devez tous en connaître, qui se vantent d’absolument pas s’intéresser à la vie politique mais qui néanmoins vont faire un choix le jour du vote. Ca signifie quoi, ça signifie que le vote devient une loterie. Alors évidemment tout le monde participe à cette espèce de fantaisie. Lorsqu’on voit à une élection présidentielle 16 candidats saucissonnant ainsi son électorat et favorisant ainsi les extrêmes. On s’est inquiété à juste raison de la présence de Le Pen au deuxième tout en 2002, mais il n’avait pas fait de voix en plus de manière significative en tout cas, mais comme les autres se partageaient le gâteau il est arrivé ce qui devait arriver. Ce n’est pas la volonté d’un choix c’est la conséquence d’un amusement. Récemment aux dernières élections législatives on a vu des gens se présenter simplement pour récolter la manne financière. Ca devient ridicule mais non seulement ridicule c’est saper les bases de la démocratie. Si on veut la préserver il faut rapidement trouver d’autres moyens, il faut qu’on puisse choisir sciemment, que les gens choisis ne se fichent pas de nous, sinon à plus ou moins long terme on va avoir les mêmes conséquences que ce qui s’est passé en 1788, c’est à dire les gens, les bourgeois et la noblesse qui voulant le pouvoir pour eux, pas pour le peuple, ont provoqué la révolution.

Animateur - Je vais essayer de créer le débat peut-être par la contradiction. Vous avez tout à l’heure dit quelque chose qui pouvait apparenter la démocratie à l’ancien régime, qui est l’esprit de caste. Tout de suite vous dites qu’il y a un grand nombre de candidats et que finalement la pensée politique est diluée. Si on imagine, qu’en tout cas les voix, est- ce qu’il n’y a pas une contradiction entre le fait qu’il n’y ait pas de caste, pas de groupes puissants au pouvoir et en même temps le fait de dire que c’est dommage qu’il y ait tant de candidats. Effectivement si, on pourrait peut-être dire qu’il y a une contradiction là-dedans, si on refuse la multiplicité des candidats, ça veut dit qu’à un moment donné le pouvoir va se renouveler toujours entre les mêmes personnes donc créer des castes de pouvoir. Probablement qu’il y a un dé »bat même si ce que vous dites est bien réel et probablement une dérive. Je pense qu’on y arrivera mieux avec des exemples, des choses précises qui nous touchent, peut-être aussi pour trouver des parades, proposer des solutions aux dérives que l’on rencontre. Cette fois il y a plein de mains qui se sont levées. Damien, à toi.

5 - Après chaque intervention je suis dérouté parce que, ça arrive souvent d’ailleurs, c’est qu’avant qu’on puisse intervenir en réponse à une intervention, il y a une deux ou trois interventions qui se produisent, alors ça crée une problématique, il faut vraiment avoir l’esprit créatif. Je pense en particulier à la qualité des élections, j’ai proposé à plusieurs reprises de réfléchir au mode de scrutin et à la représentativité, mais j’ai senti collectivement bien que nous soyons dans un café citoyen, une sacrée résistance à remettre en question nos concepts à propos de la démocratie et la façon de la faire fonctionner. Alors la démocratie suppose à la fois des droits pour chaque citoyen mais aussi en même temps des devoirs, indiscutablement. Alors qu’on puisse assumer ses droits il faut que concurremment on prenne ses responsabilités. Il y aussi un gros problème, c’est ce qu’on appelle la démocratie. Actuellement on a évoqué tout à l’heure à propos de l’arrivée au niveau de ceux qui ont le pouvoir en main, des revendications du peuple. c’est extrêmement difficile parce que ce qu’on pourrait appeler le référendum populaire n’est pas reconnu. Il faudrait étudier différents types de démocratie, il y a des pays où la démocratie ne s’est pas mal réalisée dans le monde, mais tous les types de démocratie ne sont pas identiques. Voyez par exemple en suisse où à mon sens, c’est une opinion, est un pays où le sens de la démocratie est le mieux organisé et où il y a des référendums populaires et c’est le groupe qui prend une décision, quitte à ce que quelque temps après il remette en cause cette décision là. Il y a toute une époque par exemple où il refusait le vote des femmes, maintenant quelques années après c’est reconnu, il y a eu l’influence des autres démocraties. Je pense qu’il y a tout un effort qualitatif à faire pour améliorer la démocratie mais je pense que pour l’instant ça reste le système de base, même s’il est foireux sous beaucoup d’aspects, qui est le plus adéquat. Je crois que ce qui est le plus important c’est que le système démocratique responsabilise chaque citoyen, on n’a pas à pleurer quand on a mis sur le devant de la scène des personnes qu’on regrette d’avoir mis au pouvoir. C’est une bonne leçon mais il faut attendre les nouvelles élections.

6 - Je voulais réfléchir sur la notion d’hypothèse démocratique c'est-à-dire qu’est-ce qui aujourd’hui nous permet de dire, c’est une question rhétorique, que le système est démocratique ou pas, moi je pense qu’il faut partir, les gens apparemment partent de l’hypothèse qu’on vit en démocratie, je ne suis pas forcément de cet avis. Je me demande aussi si la démocratie est à l’heure actuelle un système politique qui sied monde dans le monde humain ? dans la société humaine telle qu’elle fonctionne. La démocratie, il y a la manière dont elle s’organise politiquement mais il y a tout le reste. Sans vouloir rentrer dans le détail, le système d’échange, la relation en famille, le statut de la famille, ce qui est pour moi la plus petite cellule humaine, qui organise une espèce, est-ce que déjà dans le fonctionnement d’une famille on a un système démocratique, je ne sais pas, ça dépend chez qui , ça dépend comment. Derrière est-ce que nos systèmes d’échange, dans une situation entre famille, est-ce que l’on est dans un système démocratique, moi je me pose la question, je ne suis pas sûr.

Animateur - Je reviens sur ce que vous avez dit au départ, effectivement on peut se poser la question de savoir si aujourd’hui en France, en Europe dans nos pays occidentaux on est en démocratie. A savoir si la démocratie est réalisée pleinement avec toutes ses dérives, ou est-ce quelque chose en réalisation permanente, ou est-ce un idéal peut-être impossible à atteindre. ca me semble intéressant de savoir si c’est un système à garder politiquement si c’est impossible à atteindre par exemple.

7 - Il ne faut pas confondre à mon avis démocratie dans l’idéal et la démocratie telle qu’on peut la vivre tous les jours parce qu’on vit dans un système dit démocratique, on nous dit que c’est démocratique et donc on le vit comme ça. A mon avis on pourrait très bien confondre les fondements, je dirais l’esprit de la monarchie, et son application et sa réalité. Je veux dire qu’il me semble que la monarchie de droit divin, c’était le roi qui devait considérer son peuple comme ses enfants et donc faire attention pour les élever pour les éduquer pour que tout se passe bien. Or la réalité nous montre que c’était plus l’oppression, le totalitarisme, entre l’idéal et la réalisation concrète de la chose il y a parfois des grandes distances. La démocratie me semble-t-il c’est un peu la même chose, que ce soit, si on prend la démocratie dans l’idéal, soit représentative soit directe, et la démocratie telle qu’on la vit actuellement, ne serait-ce que si on compare avec les société nordiques, certaines au moins où il n’y a pas dans ce qu’on appelle les élections maintenant une partie de la population mise de coté parce qu’ils ne voulaient pas les candidats qui se présentaient, donc ils pouvaient le dire en votant blanc, par exemple , ici on ne peut pas. Il y a la clef de voute qui a été exprimée au début de la démocratie qui est la vertu. Est-ce que la vertu est vécue sincèrement, pleinement par les hommes dits politiques de nos nations dites développées, c’est à mon avis une grande question, elle est ouverte.

Animateur - Ici, très rapidement, on revient entre l’idéal, entre ce que ça devrait être en employant le même mot démocratie , c’est à dire, la démocratie telle qu’on l’imagine peut-être ?même telle qu’on la fantasme aussi, il ne faut pas hésiter à Le dire et la démocratie telle qu’elle est maintenant avec des hommes et des femmes évidemment très imparfaits mais qui ont le pouvoir peu vertueux peut-être, je ne sais pas.

8 - Pour être court, quand on parle de vertu pour moi c’est effectivement la question de la vertu que la démocratie, ou à la limite entre la vertu et la nécessité je dirais la plus bestiale de tout un chacun, c'est-à-dire en revenir à l’aspect vertueux, l’aspect que l’homme essaie de développer. Et puis il y a ses nécessités, sa nourriture, son périmètre qui lui est propre, son individualisme, il a cette nécessité, il y a la notion de nécessité et après quand on a vaincu cette nécessité peut-être peut arriver la vertu. Je dirais que la nécessité ne sont pas les mêmes pour tous les hommes, ça c’est une évidence.

9 - Je voulais dire qu’il a peut-être la confusion qui s’établit entre la logique de massification et la démocratisation dans la mesure où j’ai l’impression parfois qu’on a plus affaire à certaines personnes, j’ai l’impression de côtoyer plus des consommateurs que des citoyens. Je reviens à ce que vous disiez tout à l’heure, l’éducation c’est vraiment ce qui pourra être le salut de la démocratie dans la mesure où j’ai vraiment l’impression qu’on entre dans une période où on a un recul très net de l’esprit critique. Dans l’espace public j’ai l’impression que ces espaces où l’on peut exercer l’esprit critique, où l’on peut discuter et comment remettre en cause tout ce qu’on lit dans les médias, ces espaces là se diminuent profondément. Je pends un exemple très concret, je trouve par exemple l’arrêt d’une émission comme « arrêt sur image » c’est quelque chose d’assez dramatique pour la démocratie dans la mesure où je trouve que les médias exercent une influence considérable sur nos opinions et je trouver qu’il y a beaucoup de gens que je côtoie qui ne remettent pas en question ce que disent les médias. De ce point de vue je trouve que la démocratie perd considérablement. J’ai l’impression que seule l’école apparait comme le dernier bastion où l’on exerce vraiment les individus à l’esprit critique. Or l’école ne peut pas tout faire, je pense que les médias de ce point de vue ont un rôle très, très important dans ce recul de l’esprit critique. Le salut de la démocratie je pense que ça passe par là.

Animateur - Vous avez dit un certain nombre de choses, défini deux aspects de la vie, le consommateur et le citoyen, vous vouliez le dire, excusez-moi.

9bis - Les médias sont de plus en plus confrontés à une logique de marché et même dans le service qui devrait assumer une mission d’éducation la citoyenneté, même dans le service public on tombe dans le piège de l’audimat et propose des émissions qui à mon avis n’éduque pas tellement le citoyen, loin de là, et quand elle le fait ce sont des émissions qui passent très, très tard. Donc je trouve qu’il y a un problème qui se situe du point de vue des médias qui sont trop soumis à la loi du marché

Animateur - donc nécessité d’une éducation pour arriver à une démocratie aboutie et adulte et en même un système perverti par une société de consommation, une société des marchés, on l’ad dit aussi, qui rentrerait peut-être en conflit direct avec l’idéal démocratique.

10 - Juste pour aller, pour continuer dans le sens de l’intervention précédente, pour marquer le rôle éminemment important des médias et notamment le plus grand la télévision, juste une petite chose que j’ai entendue sur les médias. En France il y a trois grandes télés, la un la deux la trois et il y en a quelques-unes derrière avec tous les satellites tous les machins. Il y a un tiers de la population française qui regarde la un, il y a un tiers de ce qui reste qui regarde la deux, un tiers de ce qui reste encore qui regarde la trois et le reste regarde, le quatrième tiers mais c’est un tiers de ce qui reste à chaque fois, donc ça fait des petites miettes pour la fin. Donc effectivement on a en terme d’information, en terme d’information d’énergie qui passe dans la population qui après induit des comportements, induit une vision du monde, induit pleine de choses il y a une uniformisation qui se fait et va au-delà, qui dépasse largement l’éducation nécessaire à la pleine et entière participation à la vie citoyenne de la cité et généralement de France et d’ici quelques années du monde.

Animateur - Là il y a des mots, je reviens, j’ai entendu massification j’ai entendu uniformisation, donc de la pensée de la façon de communiquer, etc qui va à l’encontre de l’esprit critique nécessaire. Et pourtant on peut aussi se demander à l’inverse, j’essaie de relancer le débat, à l’inverse si chacun pense ce qu’il veut comme il veut quand il veut est-ce qu’il n’y a pas nécessité à un moment donné d’avoir une cohérence sans parler de massification d’uniformisation, je laisse chacun le soin de répondre et à monsieur en particulier.

11 - Je voulais rebondir sur ce que disais monsieur et en même temps sur ce que tu viens de dire, la démocratie c’est effectivement donner la possibilité à chacun de penser, donc massification, si tout le monde pense la même chose, la démocratie il n’y en a plus. Effectivement quand on regarde les médias aujourd’hui on s’aperçoit que les médias vont plutôt dans le sens de la propagande, c’est le troisième pouvoir je crois, le quatrième pouvoir. Ils ont donc intérêt comme les autres pouvoirs à rester au pouvoir et donc à faire en sorte que les gens pensent peu, voir pas. Donc effectivement pour que les gens pensent et réfléchissent l’éducation, enfin ça passe par l’éducation. Or on s’aperçoit aujourd’hui que l’éducation nationale entre autres ne fait pas son travail et c’est pour ça que des instances, enfin des instances, des lieux comme le café citoyen se créent. Après c’est au citoyen, en tous les cas au citoyen conscient de multiplier ce genre de chose, d’en parler autour de lui de faire en sorte que, comme on ne peut pas attendre de la part du pouvoir qu’il nous éduque, qu’il éduque le citoyen lambda pour être trivial, c’est bien à nous de faire les choses, de nous prendre en main et d’aider l’autre à progresser aussi.

12 - Ce que je voudrais dire c’est que la démocratie s’est développée dans les pays où la classe moyenne est importante parce que quand on voit effectivement actuellement il y a un phénomène qui va se passer surement, nous n’y échapperons pas, l’exemple de la Chine. En Chine actuellement avec le développement du capitalisme il va y avoir une classe moyenne qui va se développer, de plus en plus importante et cette classe moyenne est toujours avide de réforme et de progrès. Donc inévitablement la Chine ira vers la démocratie peut-être plus lentement que les autres mais y arrivera. Il ne faut pas oublier que la démocratie est née avec le capitalisme. Ce qui est important à noter c’est qu’elle peut périr à cause du capitalisme aussi, il faut que le capitalisme, c'est-à-dire la loi du marché soir régulée par les états démocratiques. S’ils ne le font pas et bien la démocratie périra effectivement avec le capitalisme. On peut se poser des questions à ce sujet, je crois que c’est un phénomène important. Alors moi ce que je dis, quand je dis comment s’appelle les hommes politiques et les gouvernants dans une démocratie doivent être soucieux du bien commun, ça veut dire qu’effectivement ils ne peuvent pas se permettre de dire nous n’y pouvons rien, c’est comme ça, c’est la fatalité etc. S’ils ne maitrisent pas ce genre de fatalité, la démocratie est condamnée à terme.

Animateur - Je reprends le dernier point que vous avez dit parce que c’est un point qui me semble important, maitriser et ne pas sombrer devant la fatalité et pourtant ceux qui ont le pouvoir ne sont pas plus que des hommes et des femmes que l’on a élus et relativement normaux pas avec un cerveau surdimensionné comme on peut le croire .Est-ce dans un système complexe et dans une vie complexe comme la nôtre, c’est forcément possible de maitriser. Est-ce que justement le système tel qu’il s’est développé avec la massification des échanges, l’uniformisation des pensées etc, ne réduit pas l’homme politique ou la portion politique en tout cas, à une portion plus congrue qui fait que le système périclite.

13 - Il ne me semble pas que la démocratie soit née avec le capitalisme, la démocratie est née en Grèce et reprise ensuite par les romains, après on parle de démocratie plus ou moins moderne telle qu’on la voit aujourd’hui. Heureusement qu’elle n’est pas née avec le capitalisme parce qu’on peut se poser la question, si demain le capitalisme venait à mourir, est-ce que la démocratie survivrait.

14 - Je voulais simplement reprendre votre propos, vous avez dit que l’éducation nationale ne faisait plus correctement son boulot. Elle le fait avec les moyens qu’elle a, avec les élèves que lui renvoie la société telle qu’elle est aujourd’hui. La fonction d’éducation nationale est fondamentale en démocratie, donc la démocratie est bien le meilleur régime possible à condition que les citoyens soient éduqués. ça me semble une réalité fondamentale, encore faut-il que les élève soient aptes à développer l’esprit critique lequel est fourvoyé en ce moment par la société telle qu’elle est, par la télévision par les médias par toutes les nouvelles technologies, par tous ces moyens technique qui empêchent les élèves de se rencontrer, de faire ce qu’on fait en ce moment au café citoyen, s’asseoir autour du table , d’ouvrir un livre et d’apprendre tout simplement.

15 - Je n’ai pas pu assister au début du débat, j’essaie de raccrocher un peu le train de la démocratie on va dire. Je vais donner plusieurs éléments, peut-être pas très coordonnés, je pense qu’on mettra tout ça dans le bon sens. Pour moi la démocratie c’est le moyen donné au citoyen pour pouvoir exprimer ses sentiments, sa volonté face à une société qui se développe et face à des politiques au sens large qui sont mises en place, pouvoir réagir par rapport à l’intérêt général. Et puis dans la démocratie qui date de plusieurs centaines d’années, même si on prend l’origine grecque, mais la révolution française a développé cet esprit démocratique par notamment la déclaration des droits de l’homme. Donc en France on se dit le pays de, l’image de la démocratie qui peut se développer dans le monde. Maintenant il y a plusieurs types de démocratie, je ne parle pas des démocraties populaires communistes, mais des démocraties comme à l’américaine où les institutions sont un peu différentes, mais il y a toujours cet esprit de liberté qui caractérise pour moi la démocratie. A partir du moment où la liberté est entravée, on dit toujours la liberté commence où s’arrête celle des autres, peut-être entravée par l’état, la police etc. Juste une petite parenthèse, en venant j’ai cru des CRS en groupe place de la résistance, c’est vraiment la place pour la démocratie, des jeunes qui manifestaient, il y avait un groupe de CRS qui les attendaient, qui étaient autour d’eux ; Est-ce que c’est la démocratie contre l’état qui empêche la dérive de la démocratie, je ne sais pas. Sinon pour pouvoir aspirer à la démocratie, à la liberté d’expression il faut aussi, comme on disait tout à l’heure, avoir la possibilité d’être éduqué, éduqué par l’éducation nationale bien sur, mais aussi par la culture, par les médias, même si en ce moment les médias n’ont pas toujours des éditions qui peuvent accrocher l’esprit critique. Certains médias oui, il y a quand même des émissions sur des chaines thématiques, sur Arte, je ne vais pas faire de publicité, même sur France 2 quelquefois, sur d’autres, chaines satellites etc. Mais ce que je veux dire c’est qu’il y au aussi des gens qui ont eu une éducation par l’éducation nationale, qui n’ont pas maitrisé les fondamentaux notamment la lecture et qui sont devenue illettrés. J’ai vu un reportage il n’y a pas longtemps, quelqu’un qui avait caché à sa famille à son employeur qu’il était illettré, donc ces gens là qui sont illettrés, il y a en a beaucoup en France, il y en a malheureusement de plus en plus parce que ce sont des gens qui ont décroché de l’éducation nationale, qui n’ont pas forcément envie de se relancer dans un processus d’éducation, ces gens là ne peuvent pas s’exprimer comme d’autres qui maitriseraient les fondamentaux, la lecture, l’écriture etc. C’est quand même des gens qui lorsqu’ils vont voter peut-être peuvent comprendre ce qu’ils entendent mais ne peuvent pas exprimer réellement ce qu’ils souhaitent. Donc la démocratie est aussi liée à la maitrise des fondamentaux qu’on apprend à l’école mais qu’on peut très bien oublier. Le risque c’est qu’une part de la population soit exclue de l’expression démocratique.

Animateur - Un certain nombre d’interventions semblent admettre qu’il y a quand même des conditions à l’expression, on ne peut pas s’exprimer n’importe comment, un illettré aurait moins de capacité d’expression qu’un autre, on ne peut pas forcément dire n’importe quoi. Il y a quand même cette idée sous-jacente qui donne une exigence d’un certain niveau de qualité pour pouvoir prétendre à l’expression dans ce que j’entends. Est-ce que ce certain niveau de qualité ne va pas spécifiquement à l’encontre de ce qu’est la démocratie, je pose simplement une question vous n’êtes même pas obligés d’y répondre.

16 - Je vais essayer de me faire l’avocat du diable parce qu’on parle d’éducation, on dit qu’aujourd’hui on est de moins en moins éduqués. Pourtant aujourd’hui on a quand même beaucoup de choses sous la main, on a énormément de choses sous les mains, il y a plein de choses disponibles. Pour ceux qui ont Internet par exemple, plein de choses permettent de se cultiver, sans forcément parler d’éducation, wikipédia par exemple. Dans ce cadre là , il y a ça et aussi le fait qu’aujourd’hui on est super libre, on est tellement libre qu’on peut faire tout ce que l’on veut, on peut même partir en avion à l’autre bout du monde, acheter la dernière paire de basket à la mode, je veux dire à la fois on a la capacité de comprendre ou de prendre un maximum de choses pour comprendre l’univers. Donc il y a beaucoup de choses disponibles. Les bibliothèques sont ouvertes à tous, donc on a une certaine liberté qui nous permet de faire un maximum de choses aujourd’hui et dans ce cadre là comment on peut donner le pouvoir au peuple alors que sa principale préoccupation est quand même de consommer. Il faut quand même se poser la question, la principale préoccupation de nos contemporains c’est de consommer. D’ailleurs aux dernières élections ce qui a marché c’est « il faut travailler plus pour gagner plus » pour mieux consommer, plus consommer, c’est quand même ça qui a gagné. Donc face à cette liberté qu’on veut à tout prix préserver chacun d’entre nous, on peut aussi se dire il y a d’autres personnes qui veulent imposer un bien commun, préserver éventuellement l’environnement, on le sent bien ça aussi, si on veut faire le bien pour nous, on veut faire le bien pour nous aujourd’hui, parce qu’on est incapable justement de se maitriser, donc comment dans ce cadre là la démocratie peut-elle survivre, d’ailleurs est- ce qu’elle doit survivre, parce que finalement est-ce qu’on est assez responsable, est-ce qu’on ne doit pas déléguer à plusieurs personnes qui savent pour nous le bien qu’il faut pour la planète, est-ce qu’ils ne savent pas mieux que nous.

Animateur - C’était ici l’avocat du diable mais pourtant ce qui est quand même intéressant c’est l’idée de bien commun. Que d’aucuns savent pour nous ou pas, la question est : qui peut savoir, lequel d’entre nous peut prétendre savoir ce qu’est le bien commun et c’est quand même le fondement de la démocratie. On a parlé au début du débat de l’intérêt général, qui peut prétendre, on espère que c’est celui que l’on a élu, mas très objectivement est-ce que c’est même humain de pouvoir prétendre à connaitre le bien commun.

17 - La démocratie c’est bien, mais c’est pour faire quoi avec. Tout à l’heure on parlait des médias, des journaux d’internet etc, etc, on en fait quoi de tout ça à part de l’excès. D’ailleurs Obaldia disait la démocratie est la porte ouverte à tous les excès. Ne sommes nous pas en plein excès, de consommation, en excès « d’information » je dirais plutôt de sous-information, A mon avis on a un bel outil, la démocratie, qui est plus pour moi une éthique ou un art de vivre que quelque chose de politique. Le problème c’est que j’ai l’impression que pour les technologies modernes, à l’instar des technologies modernes que nous avons entre les mains, justement, il ne faudrait pas les mettre entre toutes les mains. J’ai l’impression que l’on donne plutôt de la confiture aux cochons avec certaines personnes. On parlait d’éducation, c’est vrai qu’il y a des gens qui je pense ne pourraient accéder à la démocratie ou à l’art de vivre comme je l’appelle que s’ils ont une éducation, comment dire dans son ensemble. On parlait d’illettrisme, je pense que les illettrés ont le droit de s’exprimer aussi, il faudrait peut-être leur donner la possibilité de s’exprimer. Est-ce que nous sommes vraiment en démocratie lorsqu’aujourd’hui il y a des gens qui ne savent pas lire ni écrire. Déjà ces gens là ont un problème, il y a un manque par rapport à ce que nous pouvons vivre tous les jours. Le gros problème de la démocratie aujourd’hui, surtout aujourd’hui, surtout maintenant, est qu’elle est frustrante. Alors il y a deux possibilités, soit on accède vers, soit on prend le pouvoir soi- même, soit on démissionne et on s’en va v ers l’ombre ou on rejoint des réseaux « subversifs ».

Animateur - sans reprendre votre expression de confiture aux cochons, je reviens quand même parce que vous avez exprimé vous-même ce que certains, en tout cas ceux qui ont parlé, pour ceux qui n’ont pas parlé je ne peux prétendre savoir à leur place, mais il y a quand même cette idée qu’à ce niveau d’exigence nécessaire pour pouvoir parler. Je vais simplement donner une définition de ce qu’est l’aristocratie. L’aristocratie c’est le pouvoir aux meilleurs, donc par rapport à tout ce que vous avez défini comme étant nécessaire pour la démocratie et avec ce mot d’aristocratie il y a probablement des clefs à trouver et probablement on va nous le dire.

18 - Justement je voudrais me porter en faux par rapport à ce que je peux entendre à savoir qu’il faut une bonne éducation pour être citoyen, il faut plein de trucs, par expérience j’anime avec Marc un café citoyen dans une zone défavorisée donc avec des personnes qui justement n’ont pas beaucoup d’éducation, qui ont des problèmes sociaux de manière générale, donc dans un milieu pas forcément bien éduqué. On est stupéfaits Marc et moi. Je trouve d’une grande richesse que d’animer ces débats. Les arcadiens de ce café de personnes dites défavorisées ont choisi un jour de travailler sur l’école. Ce qu’il en est sorti, je ne suis pas sur que l’esprit qui ressortait de tout ce qu’ils pouvaient dire avec leurs simples mots parfois, avec les images de leurs expériences, images qu’ils pouvaient donner sur l’éducation, sur l’école, et bien étaient de la même qualité, l’esprit était le même que celui qu’on trouve ici. Il y a déjà eu des débats sur l’récole, sur l’éducation de manière, les grandes idées qui en ressortaient étaient en fait les mêmes, les mêmes de par leurs expériences et en fait me semble-t-il c’est la sincérité de ces personnes qui font toute la force et la beauté de la chose, c’et la sincérité de vouloir trouver quelque chose de bien, cette bonne volonté de chercher. Ils sont arrivés à des considérations qui n’avaient en rien à rougir de ce qui a pu être dit par ailleurs, ici même sur l’éducation et sur l’école. Donc je trouve cela extraordinaire et même très beau. Effectivement peut-être sur des sujets bien techniques, très précis qui demandent une connaissance technique justement de la réalité de la chose telle qu’elle est faite, effectivement nécessite je dirais des connaissances sur la technique. Mais, l’esprit était identique et je pense que Marc peut confirmer on en a parlé ensemble de la beauté de la chose.

Animateur - Là on voit qu’il n’y a pas forcément, contrairement à ce qui a été dit précédemment, il n’y a pas nécessité d’avoir un certain niveau d’éducation pour avoir le sentiment du bien. Par contre vous dites que sur des sujets techniques, manifestement on ne sait pas et on vit dans un système de démocratie par délégation. Alors peut-être justement qu’il y a des clefs à trouver entre ce qu’on sait qui nous semble bien et ce qu’on pourrait déléguer à ceux qui savent mieux que nous, de manière très objective parce qu’ils ont un savoir qu’on n’a pas.

19 - J’abonde tout à fait dans ce sens parce que je me refuse à penser que la démocratie peut être réservée, laisser supposer qu’elle peut être réservée à une élite, je me refuse à cela. Je trouve très bien ce qu’il vient de dire, ça remet un peu les choses en place et en réalité. Par contre il y a un mot sur lequel je veux revenir et qui m’a interpellée, c’est peut-être ça qui fait qu’on autant de mal à définir ou à penser ce qu’est la démocratie, c’est un mot que monsieur a employé, la frustration. Je pense qu’effectivement ce qui est difficile dans la démocratie c’est parce que forcément il y en a toujours qui sont frustrés par rapport à ce qui s’applique, à ce qui se fait. Est-ce que la démocratie n’est pas à apprendre petit à petit que la frustration peut faire partie de la démocratie.

Animateur - Le débat a l’air de s’animer beaucoup plus vite que je ne le voudrais.

20 - Juste pour continuer dans mon propos précédent, le nécessaire qui peut être admis de la connaissance technique on s’on aperçoit qu’on on parle, j’ai l’impression que tout le monde prend la fonction d’homme politique comme un métier. Or ce n’est pas un métier, il ne faut pas que ce soit un métier, c’est justement là où toute la perversion se situe, c’est que l’homme politique, la fonction politique est devenue un métier, considérée comme telle. A chaque fois j’entends parler de ça même dans les conférences politiques, justement au moment des élections, ah ! C’est un super métier et voilà. Ce n’est pas un métier, ça l’est devenu à cause des connaissances techniques supposées nécessaires pour pouvoir le faire. On voit bien qu’il y a des ministres qui passent de l’environnement à l’éducation, à la science, à machin, ont-ils toutes ces connaissances ?

21 - Pour rebondir sur ça, pour moi la démocratie c’est ça, c’est la possibilité de donner à chacun le droit de se présenter à une élection s’il en a envie, peut importe le nombre de candidat. A partir du moment où on est en démocratie on considère que tout le monde a le droit de se présenter. S’il y a trente mille candidats, évidemment j’exagère, mais pour moi c’est ça la démocratie. Je voulais aussi rebondir sur l’éducation, moi quand je parle d’éducation je ne parle pas du tout d’excellence ?qu’on soit bien d’accord, je parle comme disais Victor. Il suffit de voir aux dernières élections présidentielles la prise de conscience qu’il y a eu dans les banlieues pour se rendre compte que l’intérêt pour la chose publique n’est pas mort, il suffit simplement de donner aux gens l’envie de s’intéresser. Je dis juste moi que l’acquisition de la connaissance permet aux gens de mieux comprendre quand on écoute les débats politiques ou autres. Je ne suis pas certain que ce soit très clair pour tout le monde, pour cause, plus c’est opaque et mieux c’est, donc parce que c’est technique, c’est un discours d’initié, donc le fait d’avoir acquis une certaine connaissance et pas forcément d’être devenu expert et excellent dans certains domaines, ça permet juste de comprendre un certain nombre de choses. J’imagine que chacun ici a pris au moment des élections les différents programmes des candidats et les la lu, ce n’est pas toujours très accessible à tout le monde, c’est le problème. J’imagine quelqu’un qui n’a pas eu beaucoup accès à la lecture, ça ne doit pas être facile pour lui. Tout ça pour dire que pour moi ce n’est pas l’excellence que je recherche au travers de l’éducation, c’est un niveau de connaissance qui permet de rendre les hommes libres et égaux.

Animateur - Libres et égaux dans la fraternité, ça c’est franco-français.

22 - Ca y est il y a un foisonnement de réactions qui font des bulles en moi, mais enfin il faut que je fasse un choix. A propos de la représentativité et du choix du peuple, je pense qu’il est intéressant de signaler que la démocratie, quand elle va jusqu’au bout, c’est la possibilité pour une personne élue et disposant de pouvoir d’être rejetée par le peuple. Dans la tradition grecque il y avait ce qu’on appelait l’ostracisme. Périclès, l’illustre Périclès, s’est incliné devant la décision du peuple qui lui a dit : "tu as trop de prestige, tu as trop d’influence, ça devient insupportable". Aussi il y a une difficulté à propos de ton intervention, Monique, c’est cette réaction qui à mon avis représente une pensée récurrente, c’est le rejet de toute élite. Il y a une élite que cela plaise ou non. J’ai peut-être mal compris, mal interprété, c’est le terme élite qui m’a interpellé. C’est important d’être éduqué de manière à reconnaitre que quelquefois on reconnaît quelqu’un comme une personnalité d’élite même si les décisions, les pensées qu’elle exprime ne nous plaisent pas au fond de nous-mêmes, on dit "je m’incline parce que j’ai conscience que tu es quelqu’un de remarquable". Je le sens, ça ne peut pas nécessairement s’expliquer logiquement mais c’est comme ça. Alors l’une des difficultés de la démocratie c’est trop souvent, j’abrège le plus possible, trop souvent quand des personnes sont arrivées au pouvoir, le peuple n’a pas la possibilité de l’amener à se retirer du pouvoir quand ils ont fait des abus de pouvoir. Je pense par exemple à ce qu’on appelle des délits d’initiés, les trafics de biens sociaux, les accords entre chefs d’état internationaux, sur lesquels le peuple n’a plus aucun contrôle. Alors là il y a une limite qui est imposée à la démocratie par ceux qui sont au pouvoir qui une fois qu’ils y sont, ils ne se sentent plus pisser. Il faut que dans les institutions il y ait quelque chose de prévu pour permettre, une fois que quelqu’un n’a a pas respecté ses engagements et que c’est reconnu par le peuple, on puisse même avant la fin de son mandat le mettre sur la touche et le faire passer en jugement.

Animateur - L’incontinence du pouvoir !

23 - Je rassure les âmes sensibles, je n’ai rien contre les illettrés, ce qui exacerbe mes sens c’est qu’à cause du système aujourd’hui, il y a effectivement des illettrés .Ceci dit il ne faut pas faire non plus d’angélisme. Aujourd’hui grâce à la démocratie tout le monde peut accéder à la connaissance, à la culture, à l’éducation par le biais des technologies, par le biais des bibliothèques, la plupart sont gratuites, par tout un tas d’intervenants, qu’ils soient sociaux ou je ne sais pas quoi para sociaux. On parle d’excès, il y a un excès effectivement dans cette démocratie, c’est que maintenant on a de plus en plus de gens qui sont ou d’un coté ou de l’autre. Il y a donc une espèce de radicalisation d’un coté ou de l’autre et ça c’est un des excès de la démocratie. S’il y avait vraiment une démocratie dans ce pays, d’ailleurs il n’y aurait pas d’illettrés, il n’y aurait pas de pauvres, les gens mangeraient à leur faim, il n’y aurait pas de chômage, encore que le chômage c’est un contexte politique, etc, etc mais enfin le chômage arrange beaucoup de gens.

Animateur - Ce que vous avez dit, je reprends, s’il y avait de la démocratie il n’y aurait pas de pauvres. Est-ce même si c’est caricatural on voit bien ce que vous voulez dire par là. Est-ce qu’il y a une corrélation entre un système politique et le fait qu’il y ait des gens plus ou moins aisés, plus ou moins lettrés, est-ce qu’on peut demander à un système politique de tout résoudre, est-ce que le champ politique est un champ qui englobe tous les aspects de la vie. C’est aussi une question qui peut être intéressante.

24 - Tout est verrouillé de nos jours, on ne peut pas accéder à ce que vous venez de dire, il y a un verrouillage, il y a des codes, un stéréotype qui font que maintenant vous êtes catalogué comme tel. A mon avis ce n’est pas tellement démocratique d’être catalogué une fois pour toute dans un rôle que vous avez eu un jour bon gré mal, vous avez envie de changer, vous ne pouvez pas le faire parce que ça a été décidé, on considère que c’est dans vos gènes.

Animateur - Ou sans être dans les gènes, c’est tellement présent que ça finit par être permanent.

25 - Quand j’ai pris tout à l’heure l’exemple d’illettrisme, c’est un peu pour préciser quand on parlait d’éducation, mais je ne voudrais qu’on comprenne que les illettrés n’ont pas le droit à l’expression démocratique. Ce que je voulais dire c’est qu’en fait ils ont peut-être plus de difficulté que d’autres à comprendre les mécanismes institutionnels, démocratiques, médiatiques qui sont diffusés, pour faire leur propre jugement. Ce qui ne veut pas dire, on a dit tout à l’heure l’expérience du café citoyen de personnes défavorisées, je pense que ces personnes ont une vision quelquefois plus démocratique, ce n’est pas le mot, plus distancié que des gens qui sont baignés dans une culture politique, ils vivent des choses au quotidien qui font qu’ils expriment des frustrations, de souffrances. Donc pour ce qui concerne l’illettrisme, je pense que la personne qui est illettrée, soit parce qu’il y a eu un parcours qui l’a amené à l’illettrisme doit souffrir de ne pouvoir comprendre ce qu’il lit, ou ne pas pouvoir écrire. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’a pas envie de s’exprimer, qui ne peut pas s’exprimer d’une manière ou d’une autre mais par contre le risque, justement ça peut-être la dérive démocratique vers un système qui peut exploiter ce genre de choses. C’est à dire que les hommes politiques peuvent très bien exploiter le fait que les gens ne comprennent pas certaines choses et annoncer des choses peut-être contraires à l’intérêt de ces personnes. Donc c’est vrai qu’il y a des moyens de pouvoir accéder à la culture, on a parlé d’internet etc, mais si les gens n’ont pas les clefs pour pouvoir s’’exprimer c’est vrai que c’est plus difficile. Bon il y a, j’ai pris cet exemple pour ça, ca ne veut pas dire que ces gens là ont une infériorité par rapport autres, je pense que la démocratie c’est la possibilité pour chaque citoyen d’un pays de pouvoir s’exprimer quelque que soit son mode d’expression. Je prendrai un dernier exemple, une catégorie qui d’ailleurs dans la campagne électorale a été peut être plus prise en compte, les malentendants, les non-voyants qui ont peut-être aussi, non pas par illettrisme, mais par difficulté à comprendre les codes du langage etc, on leur a permis pendant la campagne de pouvoir suivre certains discours par une présentation qui exprimait le langage des signes. Donc ces gens là aussi ont la volonté, la possibilité de pouvoir s’exprimer même si leur langage est différent. C’est pour cela que je voulais montrer le champ de l’illettrisme.

26 - Je suis surpris qu’on parle tellement de ces questions d’instruction, de connaissances etc il y a des gens qui n’ont pas ça et qui ont du bon sens et le bon sens est la chose la plus importante et peut-être la moins bien partagée dans ce monde. Il y a des gens très instruits, on voit même des hommes politiques qui ont beaucoup plus l’esprit de critique que l’esprit critique. Moi je pense que l’éducation ce n’est pas uniquement de développer la science, c’est important d’apprendre quand même, mais l’esprit critique c’est savoir faire la part des choses, c’est ça qui est important. Quand on a délégué son pouvoir il faut savoir à qui on l’a délégué et pourquoi il va le faire, il faut qu’effectivement on lui demande des comptes sur ce qu’il a fait. La démocratie c’est ça aussi, c’est s’impliquer soi-même, parce que si on ne s’implique pas il n’y a plus de démocratie, ça c’est important. Tout le monde peut s’impliquer.

27 - Je vais peut-être choquer, je n’en sais rien, j’ai une petite expérience d’élu, même si maintenant ça fait un peu histoire ancienne, ancien combattant, c’est du passé, non je n’ai pas eu de médaille. Il me semble qu’il y a une certaine incompatibilité à vouloir faire partager les décisions par tout le monde. Lorsque vous êtes en charge de responsabilités à un niveau local, à plus forte raison au niveau national, les dossiers sont pour la plupart tellement complexes que je ne vois pas comment on pourrait soumettre toute décision à l’ensemble du corps électoral. Écoutez, je prends un exemple, vous devez définir une politique d’urbanisme, ça se fait à Caen en ce moment mais ça se fait aussi ailleurs et souvent. Pour ce faire vous avez plus de 400 pages à lire, déjà ça implique que vous sachiez lire, ensuite que vous arriviez à comprendre tous les tenants et aboutissants des décisions que vous allez prendre. Un autre exemple, prendre une décision fiscale suppose que vous ayez connaissance d’un certain nombre de chiffres pour pouvoir en mesurer l’impact. Donc ça me paraît complètement illusoire que de vouloir faire prendre toute décision à tout le monde. Par conséquence je dis que la seule façon de pérenniser un système démocratique est de considérer choisir des individus, que ces individus soient suffisamment ouverts pour ne pas prendre de décision en s’enfermant dans une tout d’ivoire, c'est-à-dire c’est à eux de rechercher à se documenter avant de prendre une décision et dans certaines circonstances le contact avec des gens qui ne savent pas lire ni écrire mais qui connaissent leur vie. Ces contacts me paraissent indispensables mais pour autant il est absolument impossible, déjà demander à tous les conseillers municipaux d’être capables de comprendre tout ce qu’ils votent c’est se faire beaucoup d’illusion, donc ça me paraît complètement utopique que de vouloir élargir la décision à tous. Je termine pour en revenir aux élections, peut-être tout à l ‘heure j’ai été mal compris, la multiplicité des candidatures suppose de s’adapter à un système électoral. Le système actuel, il est fait pour ça d’ailleurs, il est fait par ceux qui sont en place pour éviter que d’autres y viennent, mais des l’instant où vous avez un système majoritaire même à deux tours, ça exclut la multiplicité de candidature. Le faire c’est arriver à ce que j’appelle la dictature des minorités. Dans le temps on choisissait les gens sur leurs qualités, supposées en tout cas, aujourd’hui on est censé les choisir sur un programme ce qui exclut la multiplicité. J’ai vu dans la région il y a une vingtaine d’années, les le panachage était possible, un conseil municipal composé de 6 personnes d’une liste, 6 d’un e autre et un treizième qui était seul. Pendant six ans c’est lui qui a fait la loi. Et rappelons-nous que le premier vote au suffrage universel à l’échelon national a amené Napoléon III.

Animateur - Je vais essayer de reprendre les deux dernières interventions, qui à mon avis ne s’oppose pas tant que ça, l’idée du bon sens dans la décision. On peut être tous d’accord pour dire que c’est nécessaire pour prendre une décision qui semble aller dans le bon sens, encore faut-il définir le bons sens. Après Monsieur Seeuws par expérience dit, oui mais il est quand même illusoire de penser que dans toutes ces petites choses de la vie courante qu’un élu est amener à traiter, on puisse tous connaître tout, c’est l’idée du ministre qui passe par tous les postes. Mais peut-être aussi avons-nous nous-mêmes une illusion de ce que doit faire le politique, c'est-à-dire que peut-être le politique n’a pas à tout connaître sur tout parce qu’il y a une strate dont on n’a pas parlé aujourd’hui, c’est toute la strate administrative, c'est-à-dire les techniciens de la loi. Revenons, monsieur parlait de Montesquieu, revenons à l’esprit de la loi en rapport avec le texte, peut-être que le peuple a dans son bon sens et sa culture à définir l’esprit et peut-être que d’aucun ont à faire le texte le plus à même d’être en accord avec l’esprit. Donc voilà peut-être une piste à trouver dans le débat.

28 - Je voulais dire par rapport, vous parliez de bons sens, oui effectivement les gens sont capables de faire preuve de bon sens. Mais quand je parlais d’éducation, je ne parlais pas non plus de remplir des cranes de connaissances. L’éducation, c’est l’éducation à l’esprit critique l’éducation au raisonnement et je ne pense pas qu’on puisse raisonner à vide, ce n’est pas possible. Il faut se confronter à des autres auteurs, il faut lire ou échanger avec des gens, je pense que le bon sens surgisse comme ça, tout seul.

Animateur - Ce qu’au 18° siècle on rappelait la nécessité de connaître les humanités avant de pouvoir avoir un esprit critique. Les humanités c’était avoir un ensemble de connaissances transversales suffisantes et éparses pour pouvoir, non c’était ça le minimum nécessaire à chacun pour être un bon citoyen

29 - Juste deux choses, l’une sur l’éducation, l’éducation de manière générale, enfin c’est mon point de vue, notamment l’éducation dite supérieure sont à mon avis des chemins directement tracés vers des postes industriels, c'est-à-dire que c’est une ligne droite vers des fonctions, vers des métiers. C’est pour ça qu’il y a une multiplicité de filières qui changent régulièrement, qui se modifient, les programmes bougent parce que ça s’adapte à la demande du marché, à la demande industrielle. Donc effectivement il y a une grosse opposition à mon avis entre démocratie et marché. L’idée que la démocratie n’existe pas parce qu’il suffit de constater qu’il y en a qui meurent de faim, meurent de froid, qu’il y a des inégalités énormes me semble intéressante car effectivement si on considère la démocratie çà me semble intéressant je m’arrête là. Si on prend l’image, j’aime beaucoup l’image d’un bateau pour illustrer un pays régit par la démocratie, on prend l’image d’un bateau. Il y a le capitaine du bateau qui donne la direction du bateau, après les techniciens qui font fonctionner le bateau. Je pense que la multiplicité des candidats aux élections est le signe d’un mauvais fonctionnement de la démocratie parce qu’il y un certain honneur, toute une prestance, une présentation, une aura d’être le président de la république, donc évidemment ça peut en attirer plus d’un. Si on prend l’image du bateau, il y a un capitaine, tout le monde sur pont choisit la direction et après le capitaine, on lui dit c’est toi qui va nous dire comment on va faire pour aller par là, tu vas diriger les matelots pour faire fonctionner les rames ou mettre la voile, bouger le gouvernail pour aller dans cette direction. Il n’y a pas besoin de 36000 candidats, s’il y a en a un qui est compétent on peut le déterminer aussi, donc je pense que la multiplicité des candidats est signe d’une mauvaise démocratie.

Animateur - donc le capitaine, le politique, le décideur serait celui qui a connaissance de la direction, il ne sait pas forcément faire marcher ni les rames ni les voiles mais il aurait connaissance de la direction. On revient à ce que vous disiez tout à l’heure, c'est-à-dire il n’y a pas nécessité pour être bon politique de connaître tous les rouages et tous les mécanismes nécessaires pour faire fonctionner un système, normalement non.

30 - Pour répondre à ce que vous disiez, effectivement ils n’ont pas besoin, ils ont des petites mains, que ce soit un jour ceux de droite, de gauche ou du milieu, les techniciens, les gens de l’ombre seront toujours à leur place dans les ministères, les cabinets de travail pour faire le boulot à leurs places, ils peuvent en tirer les avantages en se pavanant devant les caméras. Je reviens à ce que disait monsieur tout à l’heure, on disait effectivement on ne peut pas tout connaître, on n’est pas forcément capable de déchiffrer un texte technique sur l’urbanisme ou un texte juridique sur tel ou tel sujet, mais il y a quand même des tentatives de vulgarisation. Notamment en ce moment, peut-être que c’est de l’esbroufe pré-électorale, mais la ville de Caen organise des soirées où l’on discute de l’urbanisme, des transports, de tout un tas de choses. Ca vaut ce que ça vaut mais enfin moi j’ai constaté, la dernière fois, c’était à la Pierre Heuzé, il y avait douze personnes pour une ville de 111000 habitants. Alors moi je me dis aussi que les gens, je rejoins monsieur, les gens se complaisent dans leur illettrisme au sens large, ils ne veulent pas trop se casser la tête. Monsieur opinait de la tête quand je disais que tout le monde peut accéder à la connaissance, je suis désolé, à la connaissance dans son sens large, à la culture qu’elle soit pointue ou vulgarisée, on a des outils aujourd’hui que nos parents, nos grands-parents n’avaient pas. On peut du jour au lendemain, peut-être ne pas devenir des Einstein, mais on peut quand même être un peu moins bête que la veille. Il y a de gens, et les « illettrés » et les gens défavorisés etc ne sont pas les derniers à avoir les dernières technologies, ce qui m’étonne, je ne sais pas comment ils font parce que moi je ne peux avoir la moitié des dernières technologies que eux possèdent. On peut accéder à la culture et à la connaissance, grâce à ces moyens techniques. Moi ma grand-mère on l’a arrachée de ses études à l’âge de 11 ans pour la mettre derrière le cul de vaches, bien ,il n’empêche qu’elle lisait les grands classiques et avait une excellent culture et savait tenir une conversation et damer le pion à plus d’un interlocuteur.

31 - J’ai envie de dire que la démocratie ce n’est pas seulement l’instruction le savoir mais c’est la connaissance. C’est tout autre chose.

Animateur - Je vais vous demandez de préciser on ne peut rester là-dessus.

31bis - Bien c’est le partage des cultures, le partage des connaissances, ce qui fait la multiplicité des faits des décisions et des mises en travaux.

Animateur - On a encore cinq minutes pour répondre à cette fameuse question, la démocratie est-ce le moins mauvais système ?

32 - Pour répondre à la question je crois que l’on a bien dégagé le fait qu’il y a une part d’idéal, et une part d’application qui aujourd’hui à priori est remise en cause. On se pose de plus en plus la question de savoir si on est en démocratie. Mais je pense que l’esprit démocratique c’est surtout ne pas s’interdire d’utiliser tout moyen, ne rien s’interdire essayer toujours de chercher autre chose de nouveaux horizons. Le danger est de croire qu’on est dans une démocratie aboutie, d’ailleurs on nous fait bien remarquer la plupart du temps, on est dans un pays démocratique et d’ailleurs il ne faut pas trop se plaindre, il y a bien d’autres pays où ils n’ont même pas la démocratie. Je crois que c’est un leurre justement, croire qu’on est dans une démocratie aboutie tue l’esprit démocratique. Alors l’esprit démocratique est mis à mal aujourd’hui principalement parce que le mouvement ne suit plus, il n’y a plus de mouvement des idées, c’est quelque chose qui est vraiment figé. A tel point figé qu’on a toujours les mêmes structures partisanes qui se disputent quelques miettes de pouvoir. Deuxième point, pour moi les décisions, on a trop souvent tendance à voir les décisions politiques comme des décisions techniques et finalement penser que la politique est un métier, Victor l’ a rappelé, est un grand danger parce que justement on fait croire que les décaissions c’est savoir des choses techniques très poussées un peu comme la spécialisation des avocats parce que maintenant la loi n’est plus intelligible par tout le monde, il faut avoir un tas de bouquins avant de s’exprimer ce qui est vrai ou juste. Pour moi la décision du peuple dans une démocratie c’est la volonté générale, c’est les grands traits, vraiment les grands traits, ce que les gens veulent, dans quelle direction ils veulent aller. Après charge aux responsables politiques de mettre en œuvre, mais la décision, le cap comme disait Victor c’est le peuple qui décide. Et pour faire un parallèle avec l’illettrisme quand on disait que l’illettré ressentait beaucoup son incapacité, son manque, aujourd’hui est-ce qu’on souffre réellement d’un manque de démocratie, c’est peut-être ça qu’il faut se poser comme question, est-ce qu’on a vraiment l’impression de souffrir de ce manque. Pour faire parallèle avec le 18° siècle on avait envie de savoir, envie de sortir de l’oppression, on avait vraiment cette impression de ne pas être libre, mais est-ce que ça commence à se fracturer aujourd’hui, je ne sais pas, est-ce qu’on a vraiment le sentiment d’être libre. C’est peut-être ça aussi qui va nous faire poser la question de notre carcan ou de notre liberté dans notre système actuel.

Animateur – Tu parlais du 18° siècle, on a deux siècles de recul est-ce que c’est si vrai que ça cette idée qu’ils avaient l’impression d’être sous l’oppression, sous le joug. Finalement la révolution d’est en 1789 ce n’est pas tout le 18° siècle, est-ce qu’on ne cultive pas en France spécifiquement, c’est une autre question, mais je dirais du fantasme à la volonté démocratique et aux lumières françaises.

33 - Pour rebondir sur ce que tu viens de dire, je pense qu’on est peut-être trop idéaliste, la démocratie c’est quelque chose qui se mérite, qui s’atteint doucement, c’est assez difficile de mettre en place du jour au lendemain une démocratie parfaite, je crois. Pour en revenir une dernière fois sur la question de l’éducation, je crois quand même qu’elle est importante parce que en 1789 la révolution est arrivée dans la foulée du siècle des Lumières, et ce qu’avaient voulu faire les Lumières avec l’encyclopédie, c’est justement de donner quelque chose à tout le monde en tout cas dans l’idéal, parce qu’ils considéraient que pour que le peuple, quand même la démocratie c’est ça, c’est le peuple, puisse être libre dans ses décisions il fallait quand même un minimum de connaissance. Est-ce qu’aujourd’hui il est facile d’avoir accès à ces connaissances. ?. Je dodelinais de la tête tout à l’heure effectivement, parce que je ne sais si ici un certain nombre ont une grande expérience des quartiers, ce qu’on appelle les quartiers ou des couches sociales défavorisées. Pour ceux qui l’ont je pense que c’est assez facile de se rendre compte que quand vous vivrez avec 300 euros ou 600 euros par mois, votre préoccupation première n’est pas de courir après le dernier livre d’Onfray ou je ne sais quoi. Leur préoccupation première est de remplir le premier étage de la pyramide de Maslow, c'est-à-dire de manger, parce que pour pouvoir réfléchir et pouvoir remonter cette pyramide de Maslow il faut d’abord et avant tout commencer à souscrire à ces besoins primordiaux. Et une fois de plus il suffit d’aller au devant. On avait fait un café citoyen ici l’année dernière où s’étaient exprimés des SDF, c’était très intéressant de les entendre à ce sujet.

Animateur - On pourrait faire un débat pour savoir quel est le niveau de vie nécessaire pour acheter le dernier livre de Michel Onfray.

34 - Il reste juste 65 secondes pour y revenir, je ne vais pas abuser parce quelqu’un veut peut-être encore parler. Pour revenir à la remarque que tu faisais tout à l’heure, la démocratie n’est pas nait seulement par l’action de ce qu’on appelle les Lumières, c’était une aspiration qui existait depuis des siècles. Il suffit de regarder l’Histoire au moyen âge à l’époque du féodalisme, pour constater que le peuple, sans avoir de théories se soulevait, réagissait pour avoir à manger, c’est ce qu’on appelait les Jacqueries, les incursions paysannes et puis il y a eu Robin des Bois, comment ? Ce n’était pas en France, c’est un phénomène naturel à l’homme. Il faut se rendre compte aussi que parmi les détenteurs de pouvoir il y a eu tout de même des esprits assez éclairés, je pense Henri IV, sa préoccupation de la poule au pot le dimanche n’est pas un pur slogan électoral puisque de toute façon il avait le pouvoir et il a fait ce qu’il pouvait pour améliorer la condition des plus défavorisés.

Animateur - Il est cinq heures moins dix donc hélas on va arrêter là le débat pour passer à la deuxième partie de notre café citoyen qui est le choix du thème du prochain café, le 10 novembre prochain.

Choix du thème pour le prochain Café Citoyen :

1 - Qui éduque aujourd’hui ? 18 voix
2 - Autosatisfaction expression de la réussite ou voie de garage ? 5 voix
3 - Le coût de la vie a-t-il augmenté ? 5 voix
4 - Les préoccupations écologiques ont-elle triomphé ? 7 voix
5 - Études supérieures, peut-on envisager une alternative au sacrifice des parents ? 15 voix
6 - Se changer soi-même pour changer le monde ? 20 voix
7 - L’action humanitaire ou l’aide humanitaire représente-t-elle un risque ? 10 voix
8 - La décroissance sauvera-t-elle la planète ? 7 voix
9 - Ou trouver la morale dans les rapports économiques ? 11 voix

PROCHAIN CAFE LE SAMEDI 10 NOVEMBRE : Se changer soi-même pour changer le monde ?

Interventions

_avatar_30

Sébastien

jeudi 26 novembre 2009 14:05:59 +00:00

Consultation pour une dissertation

Participer au débat

Les champ marqués d'une * sont obligatoires

Marre de retaper vos coordonnées ? Créez un compte ! Créer un compte permet d'être averti des nouvelles contributions, d'être reconnu et donc de ne pas avoir à taper ses coordonnées pour participer aux débats.

Premier ouvrage des Cafés Citoyens

Où en est l'esprit démocratique aujourd'hui ?

La démocratie, c'est nous !

En savoir plus