“Le comptoir d'un café est le parlement du peuple.”

Honoré de Balzac (1799 - 1850)

Bienvenue en Arcadie

Vous êtes ici : Accueil > Comptes-rendus > Peut-on vivre sans voiture ?

Compte-rendu analytique par Sylvie SAPERASCafé Citoyen de Nîmes (01/03/2011)

Animateur du débat : Sylvie SAPERAS

» Environnement

Peut-on vivre sans voiture ?

ShareThis

Le débat est retranscrit par Sylvie SAPERAS.
L’animation et la lecture de la Charte sont assurées par Aurélia DUBUC.

Le préambule est présenté par Marie-Pierre MERCIER :

Je vais partir du constat général que nous vivons dans un monde fini, qu’au niveau de la consommation nous n’avons qu’une planète et aujourd’hui nous faisons comme si l’on en avait deux, voir trois. Il faut, en urgence, réfléchir sur les modes de consommation en se demandant comment peut-on mieux et moins consommer, notamment en ce qui concerne les transports.
Comment diminuer l’énergie utilisée ? D’abord par la sobriété. Ai-je vraiment besoin de prendre ma voiture pour aller chercher mes enfants à l’école, à 500m ou mon pain à 300m ?
Ensuite, nous avons à réfléchir sur l’efficacité énergétique pétrolière. Lors des premières crises, le slogan était « nous n’avons pas de pétrole mais on a des idées », ainsi beaucoup d’avancées ont été faites à cette période, notamment sur la consommation des voitures. Et aujourd’hui ? Il faut trouver d’autres solutions… taxis, co-voiturage, véhicules de location. Mais cette démarche reste individuelle et ne suffit pas. Nous avons besoin d’une décision politique, forte, prioritaire, comme le développement des transports en commun et du réseau ferroviaire. Il en est de même au niveau urbanisme, il s’agit de rapprocher lieu de vie, de travail, de loisirs afin que les habitants trouvent tout cela sur place et n’aient pas besoin de se déplacer sans cesse. Favoriser cette mixité est un enjeu majeur.
Ainsi, il y a des mouvements qui se sont créés : les « territoires en transition » qui ont démarré en 2005. En Angleterre, il en existe 200, aux USA, 100. Ce sont des initiatives qui partent de la base, mais il faut aussi sensibiliser les élus pour qu’une forme de partenariat existe et que les citoyens puissent créer des collectifs solides. Donc il faut trouver des élus qui favorisent les initiatives. Dans ces « territoires en transition », on a coutume de dire qu’il n’y a pas de grand soir mais des petits matins.
En fait, le problème, aujourd’hui est qu’il faut, à la fois, une prise de conscience individuelle ET des relais politiques, par exemple, pour intervenir au niveau des transports collectifs. A Nîmes, nous n’arrivons pas à avoir de relais politique.
Est-ce qu’on peut se passer de voiture ? Oui, je le crois.
Ces « territoires en transition »  sont nés par la prise de conscience liée à la problématique pétrolière. Le prix du baril va augmenter, mais c’est nécessaire. On ne peut pas, comme ça, utiliser les éléments fossiles comme si cette ressource était illimitée. Donc, l’énergie nécessaire pour les voitures et les transports, en général, devra diminuer. On va, peut être, par exemple, arrêter de manger des fruits et légumes de l’autre bout du monde qui imposent un transit important.
Au niveau local cela implique qu’existe un autre mode politique.

1 - D’abord sur la partie technique, il faut savoir qu’un moteur englouti 30% de son énergie. Plus globalement, il est quasiment prouvé que sur la totalité des énergies extraites, gaz, métaux, pétrole, c’est la même proportion : pour 100, nous utilisons 30 et le reste est jeté. Donc, une première réflexion démarre à partir de ce constat. Ainsi, au lieu de financer des sommes folles pour des projets fabuleux, il eut été préférable de financer la recherche pour améliorer le rendement des moteurs.
Ensuite, tu parles de la démarche « des territoires en transition », elle va, en effet, tout à fait dans ce sens. Cela a déjà commencé en France et même assez fortement dans la Région. Au-delà des problèmes liés à la consommation du pétrole et des énergies, elle concerne aussi tous les problèmes de l’alimentation et prend en compte la dimension du « vivre ensemble ». C'est-à-dire, comment organiser notre vie pour ne plus être des drogués du pétrole quand on sait que dans 30/40 ans, le pétrole c’est fini. Et on est incapable de dire, aujourd’hui quelles peuvent être les solutions alternatives. Quand on nous parle des algues, de l’hydrogène, ce sont des projets qui n’ont aucune fiabilité dans le temps, d’autant que les besoins énergétiques pour brûler l’hydrogène sont très importants, d’où une perte de rentabilité.
On est en face d’un problème colossal avec néanmoins une certaine volonté de nos dirigeants pour une prise de conscience. Ce n’est pas dans 100 ans ni demain qu’il faut réagir, mais AUJOURD’HUI.
J’étais à une réunion de l’ADEME, la semaine dernière. Et il est évident que les projections en 2030/2050 ne sont pas prises en compte par les constructeurs. Aujourd’hui, les bâtiments sont conçus de manière à être protégés du froid alors que demain c’est le chaud qui posera problème. Ainsi on construit en hauteur alors qu’il faudrait rester au plus près du sol, on utilise des matériaux légers alors qu’ils devraient être inertes, on isole par l’extérieur alors qu’il faudrait isoler par l’extérieur. Je veux dire qu’on est complètement à côté des problématiques qui vont surgir.

2 - Je pense, certes, qu’il faut moins se déplacer en voiture même si aujourd’hui on ne peut s’en passer. Il y a des solutions comme le co-voiturage, mais c’est difficile si ce n’est que sur l’autoroute, par exemple, on ne peut pas faire demi-tour. La location à plusieurs peut être une solution plus fiable. Je connais quelqu’un sur Lyon qui montrait un moteur fonctionnant à partir de l’hydrogène, ça marche. Même si, c’est vrai, c’est un petit moteur. Et ces moteurs qui tournent à l’huile de friture. Les départements n’ont pas voulu soutenir cette initiative… Je pense qu’il n’y a pas de réelle volonté politique pour soutenir ce genre d’initiatives.

3 - A propos de la friture, de l’eau, etc…. j’ai entendu dire – joker, je ne suis pas compétente – que ces initiatives n’étaient pas fiables.

4 - Mais il faut essayer pour savoir si ça marche.

5 - Lorsque je vivais à Paris, vu le maillage, loisirs, habitation, travail, je n’ai jamais eu de voiture pendant de longues années. Sauf que depuis que j’habite une petite ville dans les environs de Nîmes, j’ai BESOIN de ma VOITURE. Et dans ce monde rural, je ne peux même pas envisager de vivre sans voiture si ce n’est que pour aller faire les courses ou aller en clinique. Certes, j’ai un vélo, mais quand il fait froid, ben non ! je ne l’utilise pas.

6 - Pour aller dans le même sens, je pose deux problèmes : l’énergie avec laquelle la voiture fonctionne, comme elle est aujourd’hui ET la question « peut-on se passer de voiture ? ». Je suis beaucoup plus septique que vous. Dans un monde idéal, ce serait possible si les transports étaient parfaits, s’il faisait beau toute l’année, si les pistes cyclables étaient fiables, si tout le monde était en forme, si le bus passait à côté de la maison…. Néanmoins dans le monde réel, la voiture correspond à un sentiment de liberté sur lequel il est difficile de revenir.
Vous avez parlé de friture, d’hydrogène mais la voiture électrique aussi est une solution. Certes elle fonctionne avec le nucléaire qui pose la question des déchets, mais à mon sens, au niveau de l’utilisateur, elle a beaucoup d’avantages : mois de bruits, mois de coûts. SI la pollution nucléaire pose problème, il n’en reste pas moins vrai que la voiture électrique est un produit d’avenir qui prend en compte ce sentiment de liberté.
La question plus importante, à mon sens, est que la voiture « mange l’espace public » qui sert uniquement à la voiture pour se déplacer ou stationner. Cet espace représente à Nîmes, parkings, voieries… 50%de l’espace Nîmois. La discussion n’est jamais posée ainsi : si on n’a plus de voiture – je n’y crois pas trop – cet espace public ne pourrait-il pas être utilisé à meilleur escient vers d’autres fonctions plus utiles pour la société ?
Apparaît aussi le volet économique : la voiture fait vivre un pan important de la société. Je ne parle pas seulement de l’achat de la voiture, mais aussi les garagistes, les vendeurs de pièces détachées, etc…Si on supprime le voiture – imaginons qu’on y arrive – vous mettez des millions de personnes au chômage. Ce n’est pas pour rien, lorsqu’il y a un problème économique que le gouvernement donne des primes pour acheter une voiture. Ceci représente un volet économique très important. Et aujourd’hui dire « on supprime les voitures » suppose qu’il faudrait vraiment beaucoup vendre de vélos pour trouver l’équivalent en emplois. Alors vraiment, ce n’est pas pour demain. Dernier point : il se trouve que je circule en vélo à Nîmes, croyez moi je dois être un peu kamikaze.

7 - A partir de ce qui vient d’être dit, je voudrai faire trois remarques.
1) j’ai du mal à supporter le manque de bruit des véhicules électriques, je ne sais pas pourquoi mais cela me stresse.
2) je n’y connais rien en technologie écologique mais j’ai interviewé un patron loueur de vélos sur Nîmes et de son aveu, il loue très peu aux Nîmois, parce que comme tu viens de le dire, il est périlleux de rouler en vélo à Nîmes.
3) en tant que maman, je voudrais parler du fameux pédibus qui n’existe pas sur Nîmes. Parce que c’est catastrophique de voir les mamans qui, si elles pouvaient, rentreraient dans la cour de l’école avec leur voiture, elles se garent mal, montent sur les trottoirs, klaxonnent, provoquent des embouteillages… ce serait plus simple de réapprendre aux enfants et aux adultes à marcher !

8 - Le véhicule électrique doit être un véhicule hybride qui produit lui-même son électricité. Aujourd’hui, c’est surtout un véhicule qui se recharge et c’est difficilement acceptable d’abord de par la production nucléaire nécessaire au fonctionnement, ensuite pour le manque d’autonomie. Les recherches peuvent améliorer le dispositif mais je pense vraiment qu’un véhicule électrique ne peut être qu’hybride, fonctionnant à la fois à l’essence et à l’électricité qu’il produit lui-même.
A propos du pédibus et des habitudes, je travaille à moins d’un kilomètre et demi de mon domicile – je l’ai choisi ainsi – Pendant longtemps je faisais le parcours en voiture puis je me suis rendue compte que le temps passé à rouler et surtout à me garer valait presque le temps de venir en vélo et question sérénité, c’est beaucoup plus agréable, je n’ai plus le stress de me demander où je vais me garer. Ainsi, je pense qu’il est vraiment possible de changer les habitudes.
C’est vrai, rouler en vélo à Nîmes n’est pas facile. Il faut sûrement des aménagements mais plus encore, il faut sortir d’une société productivisme. Il est urgent de changer nos modes de vie. On ne peut pas continuer à dire, ça oui, ça non…. Parce que cela supprime l’emploi. Il faut surtout aller vers une diminution du temps de travail, vers de nouvelles relations, vers une nouvelle société avec plus de temps libre.

9 - Je veux d’abord parler de la liberté individuelle. C’est bien mais pour qui ?... Pour les gens qui vont avoir les moyens de payer l’essence ? Déjà aujourd’hui, se déplacer coûte cher. Pour une famille qui veut aller dans les Cévennes, le plein d’essence revient à 80€, c’est beaucoup.
Ensuite, oui, j’essaye de prendre de plus en plus les transports en commun, mais j’habite dans les hauteurs de Nîmes et c’est très dur parce que les horaires correspondent rarement à mes besoins. Cela nécessite toute une organisation à mettre en place.
En ce qui concerne la voiture électrique, de quelle énergie il s’agit ? Peut être un petit panneau voltaïque sur le toit serait la solution ! Et l’emploi ? Cela passe par l’économie de l’énergie, notamment au niveau de l’immobilier, il y a beaucoup à faire. Avant nous avions des cordonniers, il n’y en a plus beaucoup, pour les vendeurs de voiture, ce sera la même chose. Il faut aller vers l’avenir.

10 - Moi, je ne suis pas opposé au nucléaire en tant que tel, tout en ne niant pas les dangers que cela représente. Mais surtout, c’est comme pour le pétrole, dans 40 ans, c’est TERMINE. Quand certains affirment que les centrales vont fonctionner encore 60 ans, c’est une hérésie. A partir de là, je ne vois pas comment la voiture électrique pourra fonctionner. Il faut absolument faire un break et réfléchir sur notre société actuelle qui est FINIE.
Pourquoi, on a besoin de notre voiture ? Parce que par le passé, on a conçu l’urbanisme de façon horizontale, il faut revenir sur la densification. On est complètement en train de délirer sur la création de pôles d’excellence à 600kms des uns des autres. Alors qu’il y a des outils de communication informatiques qui permettent une mise en réseau immédiate et efficace. On n’a pas besoin de créer des usines à gaz, il importe davantage de s’organiser entre personnes concernées et compétentes grâce à l’informatique. Moi, je serais spécialiste en hydraulique, toi en mécanique et ainsi à travers toute la France, on travaille ensemble en ne se déplaçant pas.
Dans une émission récente à la TV, il fût question du « voyage » d’un pot de yaourt. Des thésards ont décrit tout le périple. Avant d’arriver sur l’étale du commerçant, il aura parcouru plus de 3 500kms. En effet, d’un endroit arrive la capsule du pot, d’un autre le carton d’emballage, de plus il y a l’imprimerie… soit 3 500kms. Ensuite, il faut l’amener sur le lieu de distribution, soit 650kms supplémentaire. Enfin le consommateur pour aller chercher le produit fait, en moyenne, par an,
2 800kms par an, pour ses courses ! Tout cela vaut réflexion.
C’est aussi l’histoire de la salade qui pousse en France, qu’on envoie en Tunisie pour être lavée et qui passe par l’Italie pour être mise en sachet. Ce sont aussi les produits fabriqués en Chine puis reconstitués pour avoir le label France.
Nous sommes dans une période de fuel « pas cher » et à ce titre, tout est permis. Sachez qu’un litre de fuel représente 10kw et quand on le passe dans un véhicule, il dégage 3kw. Un homme qui va travailler toute la journée, qui va bouger de la terre avec ses bras, dégage 25kw toute la journée. Un homme qui gravit 3000m, avec ses jambes, dégage 0,50kw. Donc, toute proportion gardée, le fuel à 1,5€ est vraiment bon marché. Toute notre société a été droguée au pétrole, une énergie pas cher. Nous avons eu la CHANCE de trouver du pétrole, mais le problème est qu’aujourd’hui, c’est FINI. Et la foi dans la science n’apporte pas tous les remèdes.
Il faut complètement se repositionner. Comment allons-nous faire pour vivre ensemble ? Moi, je crains ce moment de transition, parce qu’il y a deux solutions à ce manque incontournable de pétrole :
Nous réfléchissons et nous nous organisons
On se réfugie entre nous, nous achetons des armes et nous nous battons.
C’est ce qui se passe en Iran et ailleurs, car ne nous leurrons pas, toutes les guerres actuelles ont bien pour objet la possession de l’énergie.

11 - On parle d’absence de ressources mais il y a aussi la pollution engendrée par ces ressources que cela soit le pétrole ou le nucléaire, et c’est très grave pour les générations futures….

12 - Je crois qu’avant de découvrir le moteur à explosions, les gens ne pensaient pas possibles les avancées techniques et technologiques actuelles. Affirmer que dans 40 ans le monde est fini et pouf ! Il n’y aura plus rien… C’est peut être exagéré, des solutions – qui sait – vont apparaître…. du côté solaire, éolien, d’une meilleure utilisation du nucléaire. L’Homme a toujours eu une part d’inventivité importante et de découverte pour un développement de la science que nous ne connaissons pas encore.
Ensuite, concernant les déplacements personnels comme du lieu d’habitation au lieu de travail, le problème n’est pas le même que le pot de yaourt. Et que je reste convaincu que la voiture fait partie intégrante du sentiment de liberté de chacun, on aura beaucoup de mal à y revenir, même si – et je le souhaite – on doit développer la vie des quartiers, les commerces de proximité, les lieux de loisirs à côté de chez soi, etc… En revanche je suis complètement d’accord avec vous pour taxer, à sa juste valeur, le transport de matières en général. Il n’est pas normal que l’impact écologique des produits, qui viennent de très loin, ne soit pas pris en compte d’autant qu’ils arrivent souvent avec un coût défiant toute concurrence. Mais, nous sommes là, sur des réflexions protectionnistes et penser que cela va être une solution pour les industries françaises et avoir des produits moins chers…. !

13 - Pour aller à Montpellier, j’ai pris l’habitude de prendre le train, le bus, le tram parce que c’est un meilleur moyen, facteur de moins de stress, même si je mets un peu plus de temps. Il faut qu’il y ait une prise de conscience pour moins consommer et se demander. : Qu’est ce que le bonheur ? Est ce avoir plus de choses ? Ou est ce prendre son temps ? Je crois vraiment à la réduction du temps de travail et à la création d’une autre société – même si cela ne se fait pas sans douleur -. J’ai peur que si cela ne se passe pas ainsi, on nous l’imposera de façon violente et nous ne pourrons plus rien maîtriser. Soit on choisit le mode de réflexion en abandonnant le système capitaliste et productivisme. Soit on continue de consommer davantage et les violences à venir sont inévitables.
Sur la question du protectionnisme, nous devons ramener au niveau local et considérer que ce n’est pas du protectionnisme mais de l’intelligence à refuser de « faire faire » à des milliers de kilomètres.

14 - Sur l’idée que l’homme peut s’adapter, etc…Il y a deux philosophes américains du 19ème siècle qui ont réfléchi à partir de la désindustrialisation, du pillage des ressources naturelles et des désastres écologiques (Moko kadis, etc.). On a utilisé la technologie noologiste pour aller sur la lune… on utilise de façon banale des ordinateurs très perfectionnés… Mais maintenant ne faudrait il pas faire un break et manipuler toutes ces techniques, de manière raisonnée, différenciée et correcte par rapport aux exigences écologiques !

15 - Deux points :
1) A quoi sert la science ? Pour moi, elle est forcément au service de l’homme. Pourtant aujourd’hui, la science sert d’abord la science au service de gens qui s’accaparent le POUVOIR de la science. On arrive ainsi à des manipulations qui me font vraiment peur, à savoir la fabrication de « nouveaux hommes » spéciaux, capables de s’adapter aux nouvelles températures, au CO², etc. Les volontés de « tripatouillage » existent. Soyons vigilants !
2) Le problème de la liberté. Mais nous ne sommes pas libres ! Dès la plus tendre enfance, on nous oriente, on nous impose certains choix… Mais la liberté de l’homme n’est pas là. C’est la liberté de penser pas celle de consommer. Attention lorsqu’on parle de liberté, il ne faut pas en avoir peur mais nous ne sommes pas libres tant d’un point de vue économique que social !

16 - Nous avons tout de même la liberté de choix. Bien sûr, et la psychanalyse le démontre, il y a les pulsions, les envies, les désirs qui parfois, rendent opaques nos modes de choix, mais quoiqu’il en soit, la liberté n’est pas faire ce qu’on a envie de faire. Je trouve que c’est trop facile de dire qu’on n’est pas libre notamment par rapport à tous les pays qui sont opprimés. Et même sous contraintes économiques – je me fais l’avocate du diable – on a encore, la liberté par exemple d’habiter dans un monde rural ou citadin.

17 - Non, non ce n’est pas vrai !

18 - La voiture, c’est la liberté parce que je peux me déplacer où je veux, mais si elle tombe en panne, je ne serais plus libre ! On est dépendant de la voiture. Donc on est à la fois libre et pas libre.

19 - Sur la notion de la liberté et de la voiture, nous avons un exemple merveilleux en Europe, c’est Venise. Vous restez 15 jours à Venise et vous n’utilisez jamais votre voiture.

20 - C’est comme à Paris, du temps où j’y habitais, ni mes amis, ni moi n’avions de voiture.

21 - Si le travail et l’habitat convergent au même endroit, tout est possible, mais qui peut habiter Paris ? Comme par hasard, c’est le cadre supérieur qui habite Paris et le balayeur, la banlieue, et la liberté, lui, il ne l’a pas.

22 - J’ai vu une émission à la TV qui montrait des parisiens achetant des caves pour y vivre – même si c’est interdit – mais le coût de la superficie est 25% moins cher. Alors effectivement, les gens sont obligés de partir dans les banlieues lointaines et de faire 1 heure voir 2, pour venir travailler. La moyenne est de 100kms pour un travailleur à bas salaire.

23 - A Nîmes – même si les prix ne sont pas comparables – c’est pareil, les jeunes sont obligés d’aller de plus en plus loin pour se loger parce que c’est moins cher. C’est le gros problème de l’immobilier.

24 - Pour faire les courses, c’est pareil, les grandes surfaces ont tué le petit commerce local et on a besoin de sa voiture pour aller faire les courses. L’Etat devrait intervenir pour soutenir le commerce de village qui tend à disparaître d’autant plus que la consommation, alors est différente.
Je veux dire qu’on a déplacé depuis les années 80, 10% du PIB français de la part des salaires – liés au travail- vers la part de l’argent qui est investi. Grosso modo, le PIB français, c’est 3 000 milliards d’euros, 10% est égal à 300 milliards. Les charges sociales sont à hauteur de 50%, ce qui nous donne un résultat de 150 milliards. En revenant à la richesse des années 80, je remets dans les caisses de l’Etat 150 milliards. Et il n’y a plus de déficit Sécurité Sociale. Les déficits ont été créés artificiellement parce qu’on a déplacé 10% de la richesse nationale ailleurs. Et ça continue, tout le système actuel est orienté de cette façon. C’est ça qu’il nous faut casser. Le système organise sa propre perte mais on n’est pas capable de le voir, ça me déprime.

25 - J’avoue que je n’ai pas tout suivi…. Et pour revenir simplement à mes intérêts premiers, je veux dire que j’ai aussi habité Paris et je n’avais pas de voiture. J’ai habité Marseille, je n’avais pas de voiture. J’ai habité Toulon, je n’avais pas de voiture. Toutes ces villes ont des infrastructures – métro, tram, etc. – qui permettent de circuler y compris avec une poussette. J’ai aussi un ami, à Montpellier, qui n’a pas de voiture. Lorsqu’il en a vraiment besoin, il loue un véhicule même à la demi-journée.
Je voudrais, aussi, rappeler ma première idée qui est la marche. Mes parents qui ne sont pas vraiment écolos marchent pour le plaisir. C’est vraiment une question, à la fois, éducative et culturelle. En outre, j’ai remarqué – bizarrement –que ce sont les familles les plus modestes qui sont le plus accros à leur voiture.

26 - C’est la représentation du véhicule : je fais briller ma voiture et j’y projette toutes mes frustrations. Quand on est ainsi, obligé de projeter sur un objet, c’est qu’on n’est pas libre. A notre décharge, le processus d’intoxication est présent depuis le jeune âge ; à l’école pour être « bien vu », il faut porter des « Nike », on nous conditionne ainsi de A à Z. Pourquoi le logo de Mac Donald a la forme d’un M majuscule (arrondi). Parce que cette image subliminale nous renvoie les seins réconfortants d’une femme. On projette dans la voiture, les vêtements par tous nos acquis culturels. Et on n’arrive pas à s’en sortir.
Quand je parle de liberté, je ne parle pas de liberté physique, je parle de liberté de choix que je ne peux exercer que sous conditions comme celle d’une « bonne » éducation qui favorise l’accès au libre arbitre.
Et on revient au problème de la voiture. Quels sont les gens qui ont le plus envie de posséder, de consommer ? Ce sont automatiquement les gens les plus défavorisés.
Lorsque je suis dans le train, je suis effaré de voir ou plutôt d’entendre les gens continuellement avec leur portable, soit pour vérifier leur dernier mail, soit pour rappeler quelqu’un qu’ils viennent juste de quitter. Quand est ce qu’ils réfléchissent ? Il y a quelques temps, je suis parti en Grèce, je n’avais rien à faire, j’attendais à l’aéroport, j’ai pris mes bouquins, j’ai réfléchi, j’ai avancé, j’ai écris…Alors qu’en temps ordinaire, je suis complètement sollicité par les coups de téléphone, la presse, le boulot, les mails. On ne se rend pas compte de la vie de folie que nous menons. Nous n’avons plus le temps de discuter, de manger ensemble. Autant de raisons provoquant la dislocation des familles. Il n’y a plus de vie collective. Ainsi, peu à peu, de par la structuration nouvelle, on nous prive de liberté.
Une voiture immatriculée 30 qui tourne avec le GPS dans Nîmes, cela n’a pas de sens. Que se passe t-il dans la tête du conducteur ? Il se prend pour un baroudeur. Avant, on avait des cartes, des plans et on demandait sa route aux passants.
J’étais à la manif à Villeneuve en Ardèche, la semaine dernière, j’ai du laisser ma voiture à 4kms, je n’ai pas eu à lever le pouce, quelqu’un s’est arrêté pour me prendre. Et pour revenir, je n’ai même pas eu à me poser la question, spontanément quelqu’un m’a ramené. Intrinsèquement, on n’a pas peur des autres, mais dans la « vraie vie », les réflexes sont autres parce que nous sommes conditionnés.

27 - En vous écoutant, je comprends pourquoi le candidat Europe Ecologie se met à dos, autant les électeurs de droite que de gauche parce que personne ne va renoncer facilement à sa voiture ou à sa piscine – pour ceux qui en ont -.C’est vrai, plus les gens sont de condition modeste, plus ils veulent ce que possèdent les riches. Mais, les valeurs de l’écologie sont hors argent, sauf que personne ne veut se passer de son confort. Le seul moyen pour perdre ces mauvais réflexes est que l’Etat remette en fonction diverses fonctions comme les petits trains qui desservaient les villages ou soutienne le système de covoiturage. Il faut d’abord mettre le cadre en place pour que les gens changent leurs habitudes, sinon ce n’est pas possible.

28 - Il faut que la démocratie avance. C'est-à-dire, il faut que cela soit les gens qui décident de leur avenir. C’est comme l’Education populaire, sans vouloir imposer, il faut mobiliser. La Citoyenneté a été trop abandonnée depuis des années, pourtant la seule issue est de se réapproprier la qualité de la vie locale dans un « vivre ensemble ».

FIN de la SEANCE

Prochain débat le mardi 5 avril, adopté à la majorité :

Comment peut-on rendre le pouvoir aux citoyens ?

Interventions

Participer au débat

Les champ marqués d'une * sont obligatoires

Marre de retaper vos coordonnées ? Créez un compte ! Créer un compte permet d'être averti des nouvelles contributions, d'être reconnu et donc de ne pas avoir à taper ses coordonnées pour participer aux débats.

Premier ouvrage des Cafés Citoyens

Où en est l'esprit démocratique aujourd'hui ?

La démocratie, c'est nous !

En savoir plus